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Gens du voyage

«Personne ne parlait de cet épisode» : dans le Maine-et-Loire, la si longue émergence de la mémoire du camp d’internement des Tsiganes

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Grâce à l’opiniâtreté d’un historien amateur, un mémorial verra le jour en 2026 sur le site du plus grand camp pour gens du voyage de la Seconde Guerre mondiale. Il vient réparer des décennies d’oubli.
A l’entrée du camp de Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire) en 1944. (Jacques Sigot/Archives des Soeurs Franciscaines Missionnaires de Marie)
par Maxime Pionneau, envoyé spéciale à Montreuil-Bellay
publié le 3 août 2024 à 14h31

«Qu’est-ce que c’est que ces ruines ? Qu’est-ce que c’est que ces marches ?» (1) On est en avril 1980 et un instituteur de 40 ans est occupé à chasser les ammonites, ces mollusques fossilisés qui sont légion dans la région de Montreuil-Bellay, commune de 4 000 habitants du sud-est du Maine-et-Loire. L’homme à la barbe brune et à la légère calvitie réside ici depuis sept ans. Pourtant, il a beau chercher : on ne lui a jamais causé de ces vestiges situés le long de la route départementale qui s’enfuit vers la Vienne voisine. Une ancienne usine ? Non. Alors quoi ? Pour Jacques Sigot commence une longue quête dont l’aboutissement sera l’ouverture, en 2026, d’un mémorial budgété à 800 000 euros. «Comment expliquer ce si long silence et la gêne provoquée par mon travail ?» se demandait-il en 2011. Cinq ans plus tard, le président Hollande le qualifiera pourtant de «grand historien». Revenons en arrière.

1981 : François Mitterrand est élu président et mettra onze années à faire un premier pas vers la reconnaissance du rôle de l’Etat français dans la rafle du Vél d’Hiv. 1981 toujours : Jean Richard voit débarquer Jacques Sigot, qui deviendra «Tchopa» («Ça veut dire “le portail”, celui qui ouvre, ou “l’abri”, celui qui protège»,