Trois policiers poursuivis pour des faits de violences commises en réunion ont été condamnés, jeudi 20 mars, à de la prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris. Ils comparaissaient pour avoir agressé trois personnes d’origine maghrébine devant le pub Saint-Michel, en plein cœur de Paris, en mai 2024. Les fonctionnaires, qui n’étaient pas en service au moment des faits, ont écopé de peines allant de huit à dix mois de prison avec sursis. Le tribunal les a en outre condamnés à l’interdiction de porter une arme pendant cinq ans.
La scène se déroule au petit matin du 4 mai 2024, devant ce bar installé au bord de la Seine. Les vidéos d’une riveraine, transmises à la justice et révélées par Libération, ont permis d’identifier la commission de violences par deux agents du commissariat des Ve et VIe arrondissements : Maxime Derouet, 26 ans, et Clément Balaguer, 29 ans. Le frère de celui-ci, Romain, 26 ans et aussi policier, est également impliqué et interpellé. Seuls ces deux derniers étaient présents à l’audience. Clément Balaguer a été condamné à 8 mois d’emprisonnement avec sursis, une interdiction de porter une arme durant 5 ans et une interdiction de paraître sur les lieux des faits pendant 3 ans ; les deux autres ont écopé d’une peine de 10 mois avec sursis et des mêmes interdictions. Leurs demandes de non-inscription sur leurs casiers judiciaires ont été rejetées.
«Ici on est en France, on parle français»
Le pub Saint-Michel, proche de la fontaine du même nom, est un bar assidûment fréquenté par des policiers. Un autre agent, passé par le même commissariat, occupe d’ailleurs le poste de videur au moment de l’agression – sans pour autant intervenir. Une enquête de Libération a aussi révélé les penchants néonazis d’un autre physionomiste, ainsi que la condamnation d’un cogérant pour des violences racistes.
Jeudi, Clément et Romain Balaguer racontent à la barre qu’ils ont été insultés et menacés par des personnes en état d’ébriété. «On allait vers le RER mais trois individus nous ont suivis et se sont montrés menaçants», dit le cadet. La présidente rappelle qu’une vidéo montre les trois prévenus asséner un violent coup à la tête, par-derrière un homme ; donner un coup de pied au visage à un autre, à terre ; et en poursuivre un troisième pour lui donner plusieurs coups. «C’étaient des coups extrêmement violents», résume la magistrate, rappelant que des remarques racistes ont été proférées par les prévenus – même si cette circonstance aggravante n’a pas été retenue. Quant aux victimes, elles n’ont pas été retrouvées et ne se sont pas manifestées au cours de l’enquête.
Déjà condamnés dans une affaire de graves violences
«C’étaient des violences réciproques», assure Romain Balaguer, qui ne se souvient pas des propos comme «sale chien» ou «ici on est en France, on parle français». «Un policier, même hors service, n’a pas à se comporter ainsi», souligne la présidente. «C’était complètement disproportionné», convient Clément Balaguer, qui dit comprendre «que des gens ont été choqués». «Ce sont des faits qui sont loin d’être anodins», estime le procureur, qui en appelle à «l’exemplarité» de la police. «Ce n’est pas une rixe mais un lynchage», dit-il, avant de réclamer deux ans de prison avec sursis contre les deux frères et deux ans dont six mois ferme contre Maxime Derouet.
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L’avocate de ce dernier, May Sarah Vogelhut, parle d’un «homme à terre» qui vit «une longue descente aux enfers». Son client, sans famille et sans ressources, a depuis l’affaire perdu son travail et son domicile. Grégory Hania, avocat des deux frères, souligne pour sa part que ses clients «ont conscience que c’est allé trop loin». Et Romain Balaguer d’affirmer : «On présente nos excuses aux victimes. On est loin d’être des personnes violentes.» Pourtant, son frère Clément et Maxime Derouet ont déjà été condamnés dans une autre affaire de graves violences commises contre une personne placée en garde à vue : en janvier, le tribunal de Paris leur a notamment définitivement interdit d’exercer la profession de policier.