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LGBTphobie

A Strasbourg, deux militaires condamnés pour une violente agression homophobe

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Dans la nuit du samedi 27 avril, deux jeunes militaires ont violemment agressé un homme gay dans le centre-ville de Strasbourg. Ils ont été condamnés à deux ans de prison, dont un ferme.
Tribunal judiciaire de Strasbourg. (Abdesslam Mirdass/Hans Lucas. AFP)
publié le 30 avril 2024 à 12h39

«Une agression d’une rare violence», «totalement gratuite», mue par une «homophobie assumée et décomplexée». Ce sont les mots du représentant du parquet de Strasbourg, Eric Haeffele, pour décrire l’agression homophobe perpétrée par deux militaires à Strasbourg samedi 27 avril. Les deux militaires ont finalement été condamnés ce lundi 30 avril à deux ans de prison, dont un ferme mais sans mandat de dépôt.

Alexis Coutelle, 19 ans, et Temoana Teautoua, 21 ans étaient poursuivis pour des violences sur la victime, un homme de 28 ans, mais seul le premier était poursuivi pour les injures homophobes. Le second était quant à lui poursuivi pour le vol avec violence de la sacoche de la victime qui contenait de l’argent et deux téléphones portables.

Les deux hommes, fraîchement engagés au 152e régiment d’infanterie de Colmar et qui encouraient 10 ans de prison, ont comparu détenus. Le tribunal, qui les a jugés en comparution immédiate, s’est montré plus clément que le ministère public, qui avait requis trois ans de prison, dont deux fermes.

Traumatisme crânien et dents déchaussées

Dans la nuit du samedi 27 avril, entre 4 heures et 5 heures du matin, les deux militaires ont roué de coups un homme gay dans le centre-ville de Strasbourg. Le duo, qui sortait d’une soirée arrosée - avec un taux d’alcool de 1,60 gramme dans le sang pour Alexis Coutelle -, est d’abord entré en conflit avec deux autres personnes. Ils ont ensuite frappé directement la victime, qui n’avait aucun lien avec la première rixe. Selon plusieurs témoignages, Alexis Coutelle a ensuite abreuvé la victime d’injures homophobes, tout en insistant sur son statut de «militaire».

La victime, présente à l’audience, souffre notamment d’un traumatisme crânien, d’un tympan percé et de dents déchaussées. Il s’est vu prescrire une ITT (incapacité totale de travail) de 10 jours. Son conseil, Clarisse de Bailliencourt, a ainsi dénoncé «une agression sauvage» et «barbare» dont le «caractère odieux» est «amplifié par la profession des prévenus».

Obligation de soins

Temoana Teautoua avait déjà fait l’objet par le passé de compositions pénales pour violence et dégradation. En garde à vue, celui qui était également jugé pour avoir détenu au moment des faits un poing américain a déclaré ne «jamais [avoir] aimé les homosexuels» et avoir été «énervé encore plus» quand il a pensé que la victime l’était. Il a aussi dit avoir entendu dans son éducation en Polynésie des choses négatives sur les «homosexuels» et les «Arabes», la victime étant également d’origine maghrébine. De son côté, Alexis Coutelle, aussi jugé pour avoir eu sur lui un couteau à cran d’arrêt, avait dit durant sa garde à vue avoir agi selon «le code d’honneur du soldat». A l’audience, il a évoqué l’éducation raciste et homophobe dispensée par son père et assuré ne pas vouloir «lui ressembler».

Leurs avocats avaient demandé des peines moins lourdes que les réquisitions, le conseil d’Alexis Coutelle, David Lefèvre, brossant le portrait d’un jeune «pas encore complètement constitué» et pour lequel une peine équilibrée constituerait «un coup de semonce lui permettant de rentrer dans le droit chemin».

Dans le box vitré, les deux jeunes militaires ont reconnu les faits, corroborés par des témoins, et présenté des excuses à leur victime. Le tribunal a également prononcé à leur encontre une obligation «de soigner au plus vite» leur «impulsivité», selon le président Marc Picard. Ils n’ont pas le droit d’entrer en contact avec la victime et de paraître à Strasbourg pendant trois ans. Il leur est également interdit de détenir une arme pendant 5 ans.