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Justice

Accusation de violation du secret de l’instruction : Dupond-Moretti poursuivi en diffamation par le magistrat Edouard Levrault

Le magistrat reproche à Eric Dupond-Moretti de l’accuser d’avoir violé le secret de l’instruction au détriment de l’un de ses clients, dans son livre comme sur scène.
Eric Dupond-Moretti, le 29 janvier 2023, alors garde des Sceaux, en visite au tribunal de proximité de Morlaix, dans le Finistère. (Vincent Feuray /Hans Lucas / AFP)
publié le 8 avril 2025 à 21h46

Le magistrat Edouard Levrault poursuit en diffamation l’ex-garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, qui l’accuse dans son livre et son spectacle J’ai dit oui ! de violation du secret de l’instruction, a annoncé ce mardi 8 avril son avocat, Me François Saint-Pierre. Ce nouvel épisode du conflit au long cours entre les deux hommes se jouera devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, lors d’une audience dont la date doit être déterminée le 12 mai. Le magistrat, ancien juge d’instruction de Monaco, reproche à Eric Dupond-Moretti de l’accuser d’avoir violé le secret de l’instruction au détriment de l’un de ses clients, dans son livre comme sur scène. Il demande à l’ex-ministre et son éditeur, Michel Lafon, 30 000 euros de dommages et intérêts, ainsi qu’une mesure de publication judiciaire.

Nommé garde des Sceaux en juillet 2020, après trente-six ans à gagner son surnom d’«Acquittator» dans les cours d’assises de France, Eric Dupond-Moretti avait été accusé quelques semaines plus tard d’utiliser ses nouvelles fonctions de ministre pour régler de vieux comptes avec des magistrats. Peu après sa nomination à la chancellerie à l’été 2020, il avait lancé des enquêtes administratives contre quatre magistrats, dont Levrault, à qui il avait eu affaire en tant qu’avocat et dont il avait dénoncé les méthodes de «cow-boy».

«Sans aucune base factuelle»

En septembre 2022, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) avait blanchi l’ancien juge d’instruction de Monaco, infligeant ainsi un revers à Dupond-Moretti. Le CSM avait estimé que Levrault s’était exprimé «de façon non outrancière, sans divulguer d’information secrète, sur un sujet d’intérêt général» et n’avait donc «pas excédé les limites de sa liberté d’expression», dans un reportage télévisé à l’origine des poursuites disciplinaires. Ainsi, selon le texte de la citation directe, consultée par l’AFP, Levrault juge que Dupond-Moretti «a proféré ces propos gravement diffamatoires de mauvaise foi, sans aucune base factuelle de nature à les justifier, avec une animosité et une intention de nuire caractérisées».

Le déclenchement des poursuites disciplinaires avait valu à l’ex-garde des Sceaux de comparaître devant la Cour de justice de la République (CJR), seule habilitée à poursuivre et juger des membres du gouvernement pour des faits commis dans l’exercice de leurs fonctions, avant d’être finalement relaxé. De son côté, l’avocate de Dupond-Moretti, Me Jacqueline Laffont, a estimé que ces poursuites en diffamation traduisent «une forme d’acharnement», «une fois encore nous répondrons point par point devant la justice».