C’est une étape cruciale, attendue depuis un an et demi par la famille. Une nouvelle expertise menée en Belgique confirme le rôle des gendarmes dans la mort d’Adama Traoré le 19 juillet 2016 et renforce dans le même temps l’hypothèse du «coup de chaleur». Mandatés par les juges d’instruction, quatre médecins belges devaient déterminer si la mort d’Adama Traoré, dans la caserne de Persan (Val-d’Oise), quelques minutes après son arrestation dans la ville voisine de Beaumont-sur-Oise au terme d’une course-poursuite, un jour de canicule, a été causée ou non par les gendarmes.
Selon les conclusions du rapport d’expertise consulté par Libération, «les nouvelles auditions et les documents médicaux établis par la médecine du travail [en France, ndlr] ne modifient pas les conclusions du rapport d’expertise collégiale précédent». Celui-ci affirmait en février 2021 que le décès d’Adama Traoré était dû à l’imbrication de plusieurs facteurs : un «coup de chaleur» lors d’un effort qui n’aurait probablement pas été mortel sans les gestes de «contention» des gendarmes. Dans leurs nouvelles conclusions, les experts belges notent que «les manœuvres de contraintes physiques sont intervenues alors que l’intéressé présentait un état de faiblesse» et que «les éléments issus des auditions renforcent même la conviction des experts quant aux mécanismes physiopathologiques ayant mené au décès».
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Contacté par Libération, l’avocat de la famille Traoré, Me Yassine Bouzrou, souligne que «ce complément d’expertise demandé par les juges d’instruction confirme le rapport d’expertise rendu par les médecins belges en février 2021». «Sans l’interpellation violente des gendarmes, Adama Traoré ne serait pas mort. Autrement dit, les gendarmes ont causé la mort d’Adama Traoré, affirme-t-il. La mise en examen et le renvoi devant une juridiction s’imposent en droit.»
«Ce rapport d’expertise confirme que la cause principale du décès est le coup de chaleur en lien avec un effort intense», réagit de son côté Me Rodolphe Bosselut, avocat de deux des trois gendarmes mis en cause. Celui-ci insiste sur le fait que «l’asphyxie qui découle du coup de chaleur était installée bien avant l’interpellation par [ses] clients». Me Bosselut rappelle que «le dossier n’a révélé aucune blessure portée à Adama Traoré» et estime qu’il ne peut «pas y avoir de responsabilité pénale» imputée aux gendarmes. «Nous ne pouvons désormais qu’attendre, enfin, la clôture de l’instruction», ajoute Me Pascal Rouiller, autre avocat du troisième gendarme.
Depuis les premiers jours de l’enquête, la famille pointe du doigt les gestes d’interpellation des militaires comme cause de la mort du jeune homme de 24 ans. Il s’agit, selon la description de l’intervention livrée par les gendarmes, d’un plaquage ventral. Cette technique consiste à placer la personne interpellée sur le ventre pour lui passer les menottes dans le dos. Une pression peut alors être exercée sur la cage thoracique et conduire à une mort provoquée par une «asphyxie positionnelle».
Mis à jour à 20 h 18 avec la réaction de l’avocat du troisième gendarme.