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Justice

Affaire Bétharram : l’établissement catholique jugé en 2006 «civilement responsable» de viol et agressions

Une décision de justice de la Cour d’Appel de Pau a été révélée dimanche 11 mai par le quotidien régional «Sud Ouest». Elle concerne des agissements du père Carricart, ancien directeur de l’établissement, suicidé en 2000.
Un bâtiment de Notre-Dame-de-Bétharram, le 29 mars à Lestelle-Bétharram. (Angeline Desdevises/Hans Lucas / AFP)
publié le 12 mai 2025 à 20h46

La justice s’était déjà saisie des faits commis à Bétharram, et plutôt deux fois qu’une. L’établissement catholique Notre-Dame-de-Bétharram (Pyrénées-Atlantiques), au cœur d’un scandale de violences s’étalant sur plusieurs décennies, avait été déclaré en 2006 «civilement responsable» de viol et agressions sexuelles commises par un ex-directeur, selon une décision de justice révélée dimanche 11 mai par le quotidien Sud Ouest.

Dans un arrêt rendu le 25 septembre 2006, que l’AFP a également pu consulter, la cour d’appel de Pau avait condamné l’établissement au titre des agissements de son ancien directeur Pierre Silviet-Carricart, mis en examen pour viol en 1998 avant de se suicider à Rome en 2000.

Sa mort avait entraîné un non-lieu pénal, mais le plaignant et son avocat de l’époque, Me Gérard Boulanger, avaient poursuivi la procédure au civil et obtenu six ans plus tard la condamnation de l’institution, reconnue «civilement responsable» du viol et des agressions sexuelles commises par le prêtre. La cour d’appel relève dans son arrêt que le dossier d’instruction pénal a «mis en évidence la responsabilité du père Silviet-Carricart dans les faits reprochés».

Des «suspicions de mythomanie» sur le premier plaignant

Si l’intéressé niait le viol survenu, selon le plaignant, en 1988 dans une salle de bain de Bétharram réservée aux adultes, le religieux avait concédé avoir aidé l’élève à s’y laver, sans pouvoir «expliquer ce choix de local», soulignent les magistrats. De même, le fait que l’ancien directeur soit visé par des accusations de «caresses et masturbations» venant d’une autre victime permet de «surmonter les suspicions de mythomanie pesant à l’origine» sur le premier plaignant, avaient noté les magistrats à l’époque.

Me Daniel Del Risco, nouvel avocat du plaignant et de sa mère, juge «hallucinant» que cette décision n’ait pas fait plus de bruit en 2006. «Cet arrêt permet d’établir une vérité judiciaire», a déclaré l’avocat à l’AFP. «Il y a eu des agissements qui ont été reconnus partiellement par le curé […], et c’est sur cette base que [les juges] ont considéré qu’il y avait une faute de l’établissement», résume-t-il.

Le plaignant, qui a bénéficié à l’époque de 17 000 euros de dommages et intérêts, a plus récemment saisi la Commission reconnaissance et réparation (CRR) mais cette instance, créée en 2021 pour indemniser les victimes de religieux, n’a pas encore tranché, selon l’avocat.

Notre-Dame-de-Bétharram, au cœur d’une affaire ayant donné lieu à quelque 200 plaintes pénales pour violences physiques et sexuelles, avait déjà été condamnée au civil par le tribunal de Pau, saisi par le père d’un élève victime de coups, comme l’avait révélé Mediapart en février.