Eternelle métaphore de l’arroseur arrosé. Edouard Levrault, 45 ans, magistrat français un temps détaché à Monaco, ayant inculpé localement deux anciens clients de l’actuel garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti pour trafic d’influence, comparait ce mercredi en matière disciplinaire devant le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), pour manquement «à ses devoirs de réserve et de délicatesse», suite à un entretien accordé à France Télévisions en juin 2020, dans le cadre de l’émission Complément d’enquête. Mais avec le renfort de l’Union syndicale des magistrats (USM), il devrait transformer l’audience en procès de rupture, renvoyant la politesse et reversant l’accusation envers Eric Dupond-Moretti, soupçonné de conflit d’intérêts : «Son abus de pouvoir, caractéristique d’une instrumentalisation des services de l’Etat à des fins privées, ne saurait être admis dans un Etat de droit», dénonce le syndicat majoritaire dans la magistrature.
Formellement, ce n’est pas le ministre de la Justice qui a orchestré le renvoi devant le CSM du juge Levrault. Prudemment, il s’est réfugié derrière un décret attribuant au Premier ministre (Jean Castex en octobre 2020 puis Elisabeth Borne en juin 2022) le soin de diligenter à sa place ces poursuites disciplinaires sur fond de tambouille judiciaire franco-monégasque. Mais la chronologie procédurale ne plaide pas complètement en sa faveur. Car les dates ont toutes leur importance.
Le 10 juin 2020, le juge Levrault se confiait