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Justice

Affaire Ghosn : Rachida Dati ne parvient pas à obtenir l’annulation du réquisitoire du parquet financier

Dans son réquisitoire définitif, le PNF réclamait que la ministre de la Culture soit jugée pour corruption et trafic d’influence, aux côtés de l’ex-patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn.
La ministre de la Culture Rachida Dati, au ministère de la Culture à Paris, le 24 juin 2025. (Serge Tenani/Hans Lucas. AFP)
publié le 26 juin 2025 à 10h57
(mis à jour le 26 juin 2025 à 11h26)

Nouvel échec pour Rachida Dati qui voit la menace d’un procès dans l’affaire Ghosn se rapprocher : la cour d’appel de Paris a rejeté ce jeudi 26 juin son recours contre le réquisitoire du Parquet national financier (PNF) réclamant qu’elle soit jugée pour corruption au côté de l’ex-patron de Renault-Nissan Carlos Ghosn.

«Nous allons proposer à Mme Rachida Dati de faire un pourvoi [en cassation] de cette décision», a fait savoir à la presse son avocat, Olivier Pardo, à l’issue du délibéré. Une source judiciaire a confirmé que les juges avaient «rejeté la demande de nullité formulée par les conseils de Mme Dati». Renault, partie civile dans cette affaire, et son avocat Kami Haeri n’ont pas souhaité réagir.

Des juges d’instruction parisiens se penchent depuis 2019 sur un contrat signé le 28 octobre 2009 entre Rachida Dati et RNBV, filiale de l’alliance Renault-Nissan. La ministre de 59 ans est soupçonnée d’avoir perçu, «en toute confidentialité, voire en toute opacité» selon l’enquête, 900 000 euros entre 2010 et 2012 pour des prestations de conseil actées dans une convention d’honoraires. Mais sans avoir réellement travaillé. Elle était à cette époque avocate et député européenne (2009-2019).

Dans son réquisitoire, signé en novembre 2024, le PNF demande que la ministre soit jugée notamment pour corruption et trafic d’influence passifs par personne investie d’un mandat électif public au sein d’une organisation internationale (le Parlement européen donc).

«Les nombreuses investigations» réalisées «n’ont permis d’identifier que très peu de preuves de l’existence et de la réalité des prestations réalisées par Mme Dati» en termes de conseils juridiques, «qu’il s’agisse de preuves matérielles (comptes-rendus, mails, notes) ou testimoniales (auditions, attestations)», est-il écrit dans ce document de 134 pages signé par le procureur financier Jean-François Bohnert et deux magistrats.

De nombreux recours rejetés

«Moi en tout cas, je sais ce que j’ai fait», avait affirmé lors d’un interrogatoire Mme Dati qui soutient avoir travaillé. Elle a multiplié les recours, en vain, pour obtenir l’abandon des poursuites.

La défense de la ministre avait déposé auprès de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris une requête en nullité contre ce réquisitoire car il s’appuierait sur des pièces annulées par la justice en 2022. Lesdites pièces concernent en particulier d’autres clients de Rachida Dati quand elle était avocate, comme le groupe de télécoms Orange.

Pour l’avocat général, en revanche, ces pièces annulées n’étaient pas citées dans le document. Selon lui, la violation du secret professionnel qu’elles pouvaient constituer n’avait jamais été avancée par la défense lors de la procédure, selon des sources proches du dossier.

Soupçons de lobbying

Les investigations ont aussi cherché à déterminer si cette convention d’honoraires avait pu servir à masquer une activité de lobbying au Parlement européen, interdite à tout élu. Pour les magistrats du PNF, l’ancienne garde des Sceaux de Nicolas Sarkozy a «conseillé le groupe Renault dans la promotion de ses droits et intérêts auprès du Parlement européen». Elle aurait «pris des positions favorables» au constructeur et «usé de son influence réelle ou supposée pour mener des actions de lobbying».

Et «jamais» le Parlement européen n’a été informé de ses «activités privées lucratives» avec la marque au losange.

Le parquet a également demandé un procès contre Carlos Ghosn. L’ex-patron de Renault-Nissa vit actuellement au Liban et fait l’objet d’un mandat d’arrêt international depuis 2023 dans cette affaire, pour corruption et trafic d’influence actifs notamment. Charge aux juges d’instruction d’ordonner ou non un procès contre Rachida Dati et Carlos Ghosn - tous deux contestent les accusations.

La potentielle candidate de la droite à la mairie de Paris en 2026 a par ailleurs été accusée début juin par le magazine Complément d’enquête d’avoir perçu 299 000 euros de GDF Suez quand elle était eurodéputée, sans en déclarer la provenance au Parlement européen. Elle réfute ces accusations, qu’elle juge «diffamatoires».

Mise à jour à 11 h 26 avec des extraits du rapport du PNF.