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Justice

Affaire Griveaux : 6 mois de prison ferme sous bracelet pour Piotr Pavlenski, 6 mois avec sursis pour Alexandra de Taddeo

L’artiste russe et sa compagne ont été condamnés pour avoir enregistré et diffusé les vidéos à caractère sexuel ayant entraîné la chute de l’homme politique, alors en lice pour la mairie de Paris, en février 2020.
Alexandra de Taddeo et Piotr Pavlenski lors de leur arrivée au tribunal, le 28 juin. (Alain Jocard/AFP)
publié le 11 octobre 2023 à 13h52

Jugés pour avoir enregistré et diffusé les vidéos à caractère sexuel ayant entraîné la chute de l’homme politique Benjamin Griveaux en février 2020, l‘artiste russe Piotr Pavlenski a été condamné ce mercredi 11 octobre à six mois de prison ferme sous bracelet électronique, sa compagne Alexandra de Taddeo se voyant infliger six mois de prison avec sursis. Lors d’un procès agité le 28 juin, le parquet avait requis ces peines, estimant que «n’importe quelle action ne peut être commise au nom de la liberté d’expression».

Alors candidat LREM (aujourd’hui Renaissance) à la mairie de Paris, Benjamin Griveaux avait abandonné le 14 février 2020 la campagne en fustigeant des «attaques ignobles mettant en cause (sa) vie privée». Moins de 48 heures plus tôt, des vidéos d’un homme se masturbant avaient été publiées sur un site baptisé «Pornopolitique», dont le lien était relayé sur les réseaux sociaux. Ces vidéos avaient été adressées par Benjamin Griveaux à Alexandra de Taddeo lors d’une brève relation entre mai et août 2018. Elles avaient fait l’objet d’un montage avec des captures d’écran de messages échangés entre eux. Cette démission de l’ancien secrétaire d’Etat, porte-parole du gouvernement et député, avait provoqué un scandale politique : gauche et droite avaient critiqué unanimement un «naufrage voyeuriste» et une «menace pour la démocratie».

Un «événement d’art sujet-objet» pour Pavlenski

Piotr Pavlenski avait immédiatement pris la responsabilité de cette action d’«art politique» visant à dénoncer l’«hypocrisie dégoûtante» de Benjamin Griveaux, qui «utilisait sa famille en se présentant en icône pour tous les pères et maris de Paris». L’artiste de 39 ans, connu pour des performances extrêmes en Russie et réfugié en France depuis 2017, a défendu en arrivant au tribunal cette diffusion comme étant son «huitième événement d’art sujet-objet», invoquant la «liberté artistique». Il a ensuite usé de son droit au silence pendant l’audience.

Alexandra de Taddeo, 32 ans, a soutenu à la barre n’avoir «à aucun moment voulu piéger» Benjamin Griveaux. Si l’accusation estime qu’elle est directement impliquée, l’étudiante en histoire de l’art a maintenu que Piotr Pavlenski avait publié les images à son insu, tout en précisant «soutenir» son compagnon et sa démarche artistique.

Le procès s’est tenu en l’absence de Benjamin Griveaux, 45 ans, qui a abandonné la politique. Son avocat Me Richard Malka a appelé à «protéger» la vie privée. «En réalité, le modèle qu’ils réclament, c’est la terreur 2.0 aux mains des plus violents», a-t-il lancé. «L’art n’a jamais été un instrument de délation pour détruire des vies, un instrument totalitaire, de puritanisme.»