Cela fait trente ans qu’Alain G., 66 ans, va chercher des champignons dans la forêt de Rosheim, à une cinquantaine de kilomètres de Strasbourg. Il en connaît le moindre recoin, sait sonder l’humeur de la terre et pronostiquer la récolte à venir en quelques secondes. Le 23 octobre 2019, vers 9h30, il est passé chercher sa fille, gendarme, puis ils ont commencé à remplir leur panier. «Vous en ramassiez un et puis un autre, et puis un autre», s’exalte-t-il encore à la barre de la cour d’assises du Bas-Rhin, dans son tee-shirt jaune fluo, banane sur la hanche. Puis de continuer, soudain sérieux : «Ce sont les champignons qui m’ont amené jusqu’au crâne. Vous savez, je suis croyant, je lui ai demandé ce qu’il faisait là, où était le reste ?» Sa fille a plutôt donné l’alerte. Voilà comment Alain G. s’est retrouvé parmi les uniformes sur son terrain de chasse aux champignons devenu scène de crime, à fureter dans les branchages pour tenter de trouver «le reste». Mais rien. Alors il a repris sa voiture, décidé à poursuivre la cueillette vers le rucher – «c’est juste baraque» – situé 450 mètres plus loin. Là, il a tout de suite vu «l’humérus», puis le «thorax» dans une «sorte de fosse». Il a rappelé les gendarmes.
Ce jour d’octobre, le corps de Sophie Le Tan, qu’aucune battue citoyenne ou policière n’avait jusqu’alors découvert, a ainsi surgi d’entre les bois. Par un coup du hasard et d’un acharné des champignons.