Trois mineurs accusés d’avoir roué de coups un jeune homme en raison de son orientation sexuelle, samedi 21 septembre à Mazamet, dans le Tarn, ont été déférés ce lundi 23 septembre au parquet de Castres pour être placés sous contrôle judiciaire, a indiqué la procureure.
Accompagné par une amie à qui il était venu rendre visite à Mazamet, près de Castres, Paul, 17 ans, a été pris à partie samedi après-midi par une dizaine de jeunes qui l’ont roué de coups après avoir appris son homosexualité, avant de prendre la fuite grâce à l’intervention d’un passant. Les trois mineurs poursuivis à l’issue des gardes à vue, lundi, le sont «pour des faits de violences aggravées par deux circonstances», la commission des violences «en réunion et le caractère homophobe de l’acte», a précisé à l’AFP la procureure de la République de Castres, Elodie Buguel.
Si deux des trois mis en cause, des mineurs de moins de 15 ans, reconnaissent «avoir porté quelques coups», ils nient le caractère homophobe de l’agression, a précisé à l’AFP leur avocat, Me Jean-Antoine Escande. «On est plus dans une sorte de rivalité géographique […] On avait quelques conflits d’ego entre jeunes gens qui ont vite dérapé et le rapport des forces a fait que rapidement, il y en a un qui a dégusté beaucoup plus que tout le monde», a déclaré Me Escande, soulignant que «l’enquête n’est pas encore complètement pliée».
«Suffisamment d’éléments pour établir ce caractère homophobe de l’agression»
«On estime qu’il y a suffisamment d’éléments pour établir ce caractère homophobe de l’agression», a au contraire assuré la procureure, précisant que l’un des agresseurs était préalablement connu de la justice pour des faits de violences. Pour le maire de la ville, Olivier Fabre (DVD), le mobile homophobe est «clairement établi». «On est tous abasourdis de se dire qu’on peut se réveiller un matin en 2024 […] et découvrir qu’il y a un jeune de 17 ans qui se fait tabasser parce qu’il est homo», a-t-il déclaré à l’AFP.
Au rapport
Selon le maire, qui s’est entretenu avec la mère de Paul, les agresseurs présumés se sont ensuite rendus à l’hôpital pour tenter de dissuader la victime de porter plainte. Des faits additionnels sur lesquels la procureure a indiqué n’avoir «aucun élément à ce stade». Sur BFMTV ce lundi soir, Paul explique «avoir peur de sortir» de chez lui, et confondre «[ses] agresseurs avec des gens dans la rue».
Cette affaire, révélée dimanche soir par le quotidien régional la Dépêche du Midi, a suscité de nombreuses réactions indignées, à commencer par celle, dimanche, de l’association Stop Homophobie qui a publié un communiqué dans lequel elle dénonce une «violente agression homophobe» et «exprime tout son soutien à Paul, Emma [l’amie de Paul également agressée, ndlr] et leurs familles». La présidente PS de la région Occitanie Carole Delga a aussi apporté son soutien à la victime sur X. «Il nous faut une justice intransigeante et ne rien lâcher sur la prévention et l’éducation pour que chacun puisse vivre librement sa sexualité sans discrimination», a martelé Carole Delga.
Olivier Faure interpelle Bruno Retailleau
Dans la nuit de dimanche à lundi, le nouveau secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur, Othman Nasrou, qui s’était prononcé contre le mariage pour tous en 2013, a également exprimé sur X son «soutien» et condamné «l’agression homophobe honteuse dont [Paul] a été la cible», affirmant que «les services de l’Etat sont pleinement mobilisés pour identifier tous ses agresseurs». Le Premier secrétaire du parti socialiste, Olivier Faure, a profité lundi du «témoignage poignant» de Paul pour interpeller Bruno Retailleau qui, selon le socialiste, «continue de penser que l’homosexualité est une perversion que l’on peut corriger au moyen de thérapies de conversion».
Olivier Faure reproche au nouveau ministre de l’Intérieur d’avoir voté en 2021 contre la création d’un délit punissant les thérapies de conversion, pratiques visant à «guérir» des personnes homosexuelles ou transgenres pour les faire renoncer à leur orientation sexuelle ou à leur identité de genre. La proposition de loi portée par la majorité présidentielle avait quand même été adoptée au Sénat, par 305 voix pour, avec seulement 28 voix contre, toutes venant du groupe Les Républicains.