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Polémique

Annulation du film «Barbie» à Noisy-le-Sec : le préfet de police de Paris saisit la justice, une enquête est ouverte

A la suite d’une plainte déposée par le maire de la commune, le parquet de Bobigny a ouvert une enquête, ce jeudi 14 août, pour «menaces, violences ou actes d’intimidation». De son côté, Laurent Nunez dénonce «un repli communautaire».
La mairie travaille à «la reprogrammation de ce film» dans des délais raisonnables, a annoncé le maire de Noisy-le-Sec. (Warner Bros. Entertainment)
publié le 14 août 2025 à 20h12

Les faits sont pris très au sérieux. Une enquête a été ouverte ce jeudi 14 août en Seine-Saint-Denis après l’annulation de la projection du film Barbie la semaine dernière dans un quartier de Noisy-le-Sec, a-t-on appris auprès du parquet de Bobigny. D’après une source judiciaire, l’enquête concerne des «menaces, violences ou actes d’intimidation envers un chargé de mission de service public pour qu’il accomplisse ou s’abstienne d’acte de sa mission». Elle a été confiée au commissariat de Noisy-le-Sec.

Le parquet a reçu la plainte déposée jeudi matin par le maire de la commune, Olivier Sarrabeyrouse (PCF). La ville avait annulé le 8 août la diffusion en plein air sur écran géant de Barbie dans le quartier du Londeau, parce qu’une dizaine de jeunes hommes avaient proféré des «menaces insistantes», selon l’édile, de mettre un terme eux-mêmes à la séance.

Une reprogrammation du film prévue

Après Rachida Dati mercredi, ministre de la Culture, le préfet de police de Paris, Laurent Nunez, a également condamné ce jeudi ces intimidations. «Après avoir pris connaissance de cette déprogrammation et que les faits qui en sont à l’origine relèvent du repli communautaire et du séparatisme, sont contraires aux fondements de notre République et sont susceptibles de relever de qualifications pénales, j’ai saisi ce jour la Justice», a-t-il écrit sur X.

Devant la presse, Olivier Sarrabeyrouse a rappelé qu’il avait qualifié «d’obscurantisme et de fondamentalisme» leur attitude et condamné leur argument «totalement fallacieux» selon lequel ce film «prônait l’homosexualité et portait atteinte à l’image de la femme». La mairie travaille à «la reprogrammation de ce film» dans des délais raisonnables, a-t-il annoncé, en souhaitant un moment de débat pour ne pas laisser «un groupe d’hommes se poser en censeurs moraux».

Mais l’élu s’est indigné du caractère «totalement disproportionné» de la polémique ayant suivi. «Je condamne avec encore plus de fermeté la récupération politicienne, la spéculation et la haine raciste islamophobe qui se déverse depuis 24 heures par la droite et l’extrême droite», a-t-il insisté. A l’instar du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau qui a dénoncé ce jeudi des «pressions d’une minorité violente qui veut “hallaliser” l’espace public».

Censuré dans plusieurs pays

Sur l’esplanade où le film devait être projeté, plusieurs jeunes hommes ont estimé jeudi que pour les nombreux enfants de moins de 10 ans présents le 8 août, le film n’était «pas adapté», «pas correct», «trop vulgaire», tout en affirmant que ce rejet «n’a rien à voir avec l’islam ou la religion».

Sorti en 2023, le film de Greta Gerwig avait connu un succès mondial, attirant notamment près de 6 millions de spectateurs en France. Sorte de satire féministe, il raconte l’histoire de Barbie, interprétée par Margot Robbie, qui découvre la misogynie du monde réel. Il avait fait l’objet de censure au Koweït, en Algérie ou au Liban, qui y voyaient «la promotion de l’homosexualité et du changement de sexe».