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Libération
Droit de suite

Attaque au couteau à Pau : le suspect «nourrissait des reproches» envers l’association

Le Soudanais suspecté d’avoir tué un travailleur social vendredi à Pau reprochait une insuffisance de traitement de sa situation par la structure d’accueil. Il a été mis en examen et écroué dimanche.
Devant le centre d'accueil Isard-Cos Pau, le 19 février. (GAIZKA IROZ/AFP)
par Cyrille Pitois
publié le 20 février 2021 à 16h36
(mis à jour le 21 février 2021 à 14h23)

[Actualisation dimanche avec la mise en examen du suspect]

On en sait un peu plus sur son profil et ses motivations. Le Soudanais de 38 ans, placé en garde en vue après avoir causé la mort d’un travailleur social chargé de l’accueil des demandeurs d’asile, vendredi à Pau (Pyrénées-Atlantiques), a reconnu les faits, a indiqué ce samedi la procureure de Pau, Cécile Gensac. Il s’en est pris au représentant de la structure associative Isard-Cos, à qui il reprochait une insuffisance de traitement de sa situation. Le trentenaire voulait obtenir un papier permettant son maintien sur le territoire et sa sortie de la précarité, a précisé la procureure lors d’une conférence de presse.

C’était sa troisième visite dans les bureaux de l’association, située au nord de la ville, depuis le début de la semaine. Le Soudanais a indiqué aux enquêteurs sa peur de devoir retourner dans son pays d’origine en raison des guerres locales, ce qui était le motif du départ pour la France en 2015. «Il nourrit des reproches à l’encontre de la structure suite à la déshérence qu’il connaît depuis sa sortie de prison, considérant que sa situation n’a pas été correctement traitée», a retracé la procureure avant de préciser : «Rien ne dit que ces reproches étaient fondés bien évidemment.»

«Préméditation»

Au terme de sa garde à vue, qui avait été prolongée samedi, l’auteur présumé a été mis en examen pour assassinat et placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de Pau dimanche. «L’assassinat suppose une préméditation. Cette circonstance se déduit du fait que le gardé à vue semble être arrivé avec un couteau qu’il n’a pas trouvé sur les lieux», avait précisé la procureure la veille. L’enquête écarte toute intention terroriste et aucune pathologie psychiatrique n’apparaît à ce stade.

Les investigations de la sûreté départementale de Pau ont permis de remonter l’enchaînement des faits. Vendredi à 10h30, l’individu se présente dans les locaux de l’association pour rencontrer le chef du pôle asile. L’individu avait déjà été suivi précédemment par la structure. Le responsable, Cyril, 46 ans, père de deux enfants, professionnel aguerri et estimé, l’invite à quitter les lieux et au moins à sortir du couloir pour des raisons sanitaires. Pourtant, le visiteur le suit dans un bureau. D’autres salariés du site sont rapidement alertés par les cris. Ils alertent la police et interviennent eux-mêmes pour ceinturer le visiteur, l’isoler dans un bureau annexe et porter secours à leur collègue.

La victime décède des suites de ses blessures environ une heure après. Treize coups de couteau, principalement sur le thorax, ont été relevés. L’auteur présumé n’était plus hébergé dans le cadre du dispositif d’accompagnement de cette association. Entré en France en 2011, il bénéficiait de la protection subsidiaire internationale du droit d’asile sur décision de la Cour nationale du droit d’asile, a rappelé la procureure. Sur demande de la préfecture, il a été convoqué à deux reprises par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), en vue de la suppression de son statut de protection, en raison des deux condamnations pénales prononcées à son encontre. Il avait été incarcéré en 2017 et 2018 pour avoir provoqué une rixe à l’arme blanche, puis pour violence pendant sa détention. Il ne s’était pas présenté à ces deux convocations.