Berneville, 500 habitants, à dix minutes au sud-ouest d’Arras (Pas-de-Calais). Des fermes, un terrain de pétanque et des pavillons en brique rouge. C’est dans ce village que résidait Dominique Bernard, le professeur de lettres tué vendredi 13 octobre, au sein du lycée Gambetta où il enseignait, par un ancien élève âgé de 20 ans, fiché S (pour sûreté de l’Etat).
La rue de la famille Bernard est bloquée par les gendarmes. De nombreuses personnes déposent des roses blanches sur un rebord de fenêtre, derrière une gouttière d’une maison voisine. Giovanni, venu avec sa compagne : «Très peu de gens le connaissaient. Il était très, très discret. On le voyait peu, toujours le nez dans ses bouquins. Son épouse, un peu plus. Elle donne un coup de main au comité des fêtes.» Les trois filles du couple n’habitent plus dans le village, selon le maire, qui a mis les drapeaux en berne sur l’hôtel de ville juste à côté «dès qu’on a appris que c’était quelqu’un de chez vous, vu l’atrocité de la chose».
«Il avait sans doute sauvé des vies»
Ethan, 15 ans, est scolarisé à la cité scolaire Gambetta-Carnot, où a eu lieu l’attaque vendredi peu après 11 heures. L’assaillant, un ancien élève de 20 ans fiché S pour sa radicalisation, a frappé devant l’établissement et dans une des cours. Frappé à la gorge, Dominique Bernard s’est effondré sur le parvis et a succombé à ses blessures. «Avec ma rose, j’ai déposé un petit mot, explique Ethan. J’ai écrit qu’il avait sans doute sauvé des vies. Et qu’on ne devrait pas mourir en allant à son travail.»
Depuis l’attaque de vendredi, la Première ministre, Elisabeth Borne, a rehaussé le plan Vigipirate au niveau «urgence attentat» et l’Elysée a annoncé le doublement des effectifs militaires de la force Sentinelle d’ici à lundi soir. Au total, 7 000 soldats supplémentaires seront déployés dans toute la France.
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La mère d’Ethan, Aurore, est prof dans une école d’un village voisin. Elle a couru récupérer son fils entre midi et deux vendredi quand les élèves ont pu sortir de confinement, puis elle est retournée auprès de ses élèves de maternelle : «Deux policiers avec des mitraillettes étaient là. Ils nous ont demandé de fermer les volets en classe. Pas de récréation. Cela faisait une ambiance bizarre… Maintenant, on va aller travailler la peur au ventre.»
Après les hommages spontanés devant la cité scolaire d’Arras et le domicile de l’enseignant samedi, un rassemblement citoyen doit être est organisé dimanche à 11 heures en l’honneur de Dominique Bernard. L’hommage se tiendra sur la bien nommée place des Héros, à Arras. De son côté, le maire de Berneville, Julien Bellengier, vient d’ouvrir un livre de condoléances et a prévu de déposer une gerbe devant sa maison, avec les élus, en fin de journée. «Sa femme ne souhaite pas pour l’instant des hommages. A leur image. Des gens discrets.»