Un procès, plus de quarante ans après. Le parquet national antiterroriste (Pnat) a annoncé ce mercredi 9 juillet avoir requis le renvoi en procès de six personnes, dont Abou Zayed, dans l’enquête sur l’attentat antisémite de la rue des Rosiers, qui avait fait six morts et vingt-deux blessés en 1982 dans le centre de Paris.
Le Pnat demande un procès devant la cour d’assises spéciale pour Abou Zayed, 66 ans, accusé d’être l’un des tireurs de l’attentat et détenu en France depuis fin 2020, ainsi que pour H. T., 65 ans, mis en examen en avril car soupçonné d’avoir caché des armes à l’époque, et actuellement sous contrôle judiciaire. Un procès est également requis pour quatre autres protagonistes centraux, faisant l’objet d’un mandat d’arrêt et localisés en Cisjordanie, en Jordanie et au Koweït.
Le 9 août 1982, un commando attaquait le restaurant casher «Jo Goldenberg», en plein quartier juif de Paris, rue des Rosiers. Il est 13 h 15 ce jour-là. Une cinquantaine de personnes sont présentes dans le restaurant, situé dans une petite rue très passante du vieux quartier juif de Paris, dans le IVe arrondissement. Un commando de trois à cinq hommes arrive rue des Rosiers, en deux groupes. Le premier groupe jette une grenade en direction du restaurant. Le second pénètre dans l’établissement et ouvre le feu avec des pistolets-mitrailleurs «WZ-63» de fabrication polonaise. Quelques instants plus tard, les assaillants remontent en courant la rue des Rosiers. Ils tirent sur des passants affolés, qui cherchent désespérément un refuge et courent en tous sens en hurlant. Des corps ensanglantés gisent sur les trottoirs et la chaussée. L’attaque aura duré trois minutes.
Abou Zayed «expressément désigné comme l’auteur»
L’attentat a été attribué au Fatah-Conseil révolutionnaire (Fatah-CR) d’Abou Nidal, un groupe palestinien dissident de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Abou Zayed, principal suspect, risque un procès pour assassinats et tentatives d’assassinats. Il conteste les faits. Extradé de Norvège fin 2020 et incarcéré, il est «expressément désigné comme l’auteur des assassinats et tentatives d’assassinats, de manière constante et concordante depuis près de 14 ans par plusieurs témoins», même s’il est mis hors de cause par deux autres hommes, souligne le Pnat dans ses réquisitions dont l’AFP a eu connaissance ce mercredi.
S’agissant d’H. T., les expertises menées ont souligné «la similarité parfaite» entre les armes et munitions retrouvées sur les lieux et au bois de Boulogne avec celles saisies «lors d’attentats formellement attribués à ce groupe terroriste à Londres, Rome, Athènes et Bruxelles», détaille le ministère public.
L’attentat «relève sans conteste d’une volonté de faire régner la terreur» comme «en atteste l’acharnement du commando à faire le plus de victimes possibles dans un lieu touristique réputé fréquenté par la communauté juive française et internationale», insiste encore le Pnat. Les avocats des mis en cause n’ont pas commenté dans l’immédiat.
«C’est un sentiment partagé pour les parties civiles aujourd’hui, entre l’immense soulagement de savoir que la République n’abandonne pas ses victimes, malgré les années passées, les errements de la justice et des politiques, et le regret de constater que c’est un procès incomplet qui s’annonce, avec plusieurs accusés réfugiés à l’étranger», a réagi auprès de l’AFP Romain Boulet, avocat de proches de victimes.