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Terrorisme

Attentat dans un lycée d’Arras : l’assaillant Mohammed Mogouchkov mis en examen

Le procureur national antiterroriste a détaillé les déroulés des faits après l’attaque qui a fait un mort et trois blessés dans le collège-lycée Gambetta-Carnot d’Arras. Le terroriste islamiste avait enregistré et publié un message de revendication au nom de l’Etat islamique avant de passer à l’acte.
Au lycée Gambetta, à Arras, le 14 octobre 2023, au lendemain de l'attentat. (Stéphane Dubromel/Hans Lucas pour Liberation)
publié le 17 octobre 2023 à 10h52
(mis à jour le 17 octobre 2023 à 21h13)

Une allégeance à l’Etat islamique retrouvée dans son portable et une «haine de la France» dans ses propos. Lors d’une conférence de presse, le procureur national antiterroriste, Jean-François Ricard, a détaillé ce mardi 17 octobre les découvertes de l’enquête sur le déroulé des faits et les motivations de Mohammed Mogouchkov, après l’attentat qu’il est suspecté avoir commis vendredi 13 octobre à Arras (Pas-de-Calais). Dans cette attaque, Dominique Bernard, un professeur de Français, a été tué par des coups de couteau, et trois autres personnels du groupe scolaire Gambetta-Carnot ont été blessés. Sur les treize personnes qui avaient été placées en garde à vue ces derniers jours, trois avait été déférées en vue de leur mise en examen ce mardi : Mohammed Mogouchkov, son petit frère et un cousin. Dans la soirée, Mohammed Mogouchkov a été mis en examen pour assassinat et tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste.

Le jour de l’attaque, à 10 h 37, a retracé le patron du Parquet national antiterroriste (Pnat), Mohammed Mogouchkov, de nationalité russe et âgé de 20 ans, s’est filmé devant le monument aux morts du parvis de la gare d’Arras, avec un téléphone portable qu’il avait acheté plus tôt dans la matinée. Dans cette séquence, retrouvée dans l’appareil après l’attentat, il s’en prenait de «manière répétée aux valeurs des Français» et tenait des «propos menaçants». Vingt minutes plus tard, le jeune homme a croisé la route de quatre professeurs, dont Dominique Bernard, devant l’établissement scolaire. A ce moment, Mohammed Mogouchkov, armé de deux couteaux, «frappait violemment Dominique Bernard au niveau du cou et de l’épaule, un autre professeur tentait de s’interposer et recevait des coups de couteau au visage».

«Appelle ta République»

Puis, toujours selon le récit de Jean-François Ricard, Mohammed Mogouchkov est entré dans la cour intérieure de l’établissement, où il tentait d’agresser une nouvelle fois ce professeur qui était intervenu à l’extérieur. «Son attention était détournée par l’intervention d’un agent d’entretien muni d’une chaise, en tentant de s’interposer celui-ci tombait et l’agresseur tentait de le poignarder à plusieurs reprises», poursuit le magistrat. Une description qui correspond à l’une des vidéos de l’attentat diffusées sur les réseaux sociaux lors de l’attaque. C’est à ce moment qu’un agent technique de l’établissement, qui est intervenu en tentant de s’interposer, «recevait des coups de couteau au visage».

«Plusieurs témoins l’entendaient demander aux personnes présentes si elles étaient le proviseur ou un professeur d’histoire», a précisé Jean-François Ricard. Mohammed Mogouchkov s’est aussi adressé à l’un d’entre eux en disant : «Appelle Marianne, appelle ta République.» Un témoignage a également permis d’apprendre qu’il s’était dirigé vers le bureau du proviseur mais ce dernier n’était pas présent. Enfin, quelques instants avant son interpellation par la police, l’assaillant avait tenté de quitter le groupe scolaire sans y parvenir.

«Projet mortifère»

Si Mohammed Mogouchkov n’a pas répondu aux questions lors de sa garde à vue, les enquêteurs ont retrouvé dans son téléphone un enregistrement audio qui confirme les motivations islamistes de l’attaque. «Après avoir prêté serment à l’émir de l’Etat islamique, il développait sa haine de la France, des Français, de la démocratie et de l’enseignement dont il avait bénéficié dans notre pays, développe le procureur national antiterroriste. Au cours de cette longue intervention en arabe, émaillée de références religieuses, [il] mentionnait son soutien aux musulmans en Irak, en Asie, en Palestine, mais sans relier son acte directement aux événements récents.»

Cette précision du magistrat contredit les déclarations floues faites par Gérald Darmanin vendredi à propos du lien avec la guerre en Israël et à Gaza. «D’après nos renseignements, il y a un lien malheureusement [avec] ce qu’il s’est passé, sans doute, au Proche-Orient», avait affirmé le ministre de l’Intérieur sur le plateau du journal télévisé de TF1. Contacté à ce propos, son cabinet n’a pas souhaité réagir.

Le Parquet national antiterroriste a requis l’ouverture d’une information judiciaire, notamment pour assassinat en relation avec une entreprise terroriste. Le Pnat avait également requis la mise en examen et le placement en détention provisoire du frère de Mohammed Mogouchkov âgé de 16 ans, mis en cause pour avoir «apporté un certain soutien dans son projet mortifère» en délivrant des conseils sur «le maniement des couteaux», d’après Jean-François Ricard. Le Pnat a aussi requis la mise en examen d’un cousin de la fratrie âgé de 15 ans, suspecté d’avoir été «informé du projet» d’attentat sans «rien faire pour l’empêcher».

Mise à jour à 21h10 avec la mise en examen de l’assaillant