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Justice

Balcon effondré à Angers: le parquet fait appel de la relaxe de l’architecte et du conducteur des travaux

Cinq ans après la chute du balcon qui avait entraîné la mort de quatre jeunes dans le centre-ville, trois personnes impliquées dans la construction de l’immeuble ont été condamnées le 31 mai dernier. Deux autres ont été relaxées mais le parquet annonce faire appel.
Des personnes se consolant mutuellement près du balcon effondré, le 16 octobre 2016 à Angers. (JEAN-FRANCOIS MONIER/AFP)
publié le 31 mai 2022 à 11h13
(mis à jour le 9 juin 2022 à 18h38)

C’était un procès technique et de grande ampleur. Pendant quatre semaines, entre février et mars, 83 parties civiles, cinq personnes mises en examen, impliquées dans la construction de l’immeuble, et 22 avocats étaient réunis au tribunal correctionnel d’Angers (Maine-et-Loire). L’objectif était de comprendre comment et pourquoi un balcon s’était détaché d’un immeuble du centre-ville d’Angers en octobre 2016, tuant quatre jeunes de 18 à 25 ans et en blessant quatorze autres. Et de définir ou non les responsabilités de chacun.

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A l’issue de quatre semaines d’audience en février et mars, le procureur de la République d’Angers avait requis la peine la plus lourde, quatre ans de prison dont deux ferme, à l’encontre de l’architecte du bâtiment, Frédéric Rolland. Les juges se sont finalement montrés plus cléments. Dans le jugement rendu public mardi 31 mai, trois prévenus ont été condamnés à des peines allant de dix-huit mois à trois ans de prison avec sursis. Deux autres prévenus, dont Frédéric Rolland et le conducteur des travaux Eric Morand, ont eux été relaxés par le tribunal, provoquant des soupirs et des pleurs dans les bancs des parties civiles.

Ce jeudi 9 juin, le parquet annonce avoir fait appel des relaxes de l’architecte et du conducteur des travaux. «Ce dossier sera donc partiellement réexaminé par la chambre des appels correctionnels de la cour d’appel d’Angers, sur le cas de ces deux prévenus, au cours de l’année 2023», écrit le procureur de la République d’Angers, Éric Bouillard, dans un communiqué.

Une faute «grave» et «inexcusable»

«Les manquements aux obligations professionnelles de l’architecte, bien que partiellement établis par des éléments de la procédure, sont sans lien de causalité certain avec l’effondrement du balcon», a justifié la présidente du tribunal, lors de la lecture du jugement. La seule faute de l’architecte ayant concouru à l’effondrement «est une faute simple liée à la surveillance du chantier» et une telle faute «n’engage pas sa responsabilité pénale», a-t-elle ajouté. C’est pourtant à son encontre que la peine la plus lourde avait été requise. A la barre, ce dernier avait assuré n’être «intervenu ni sur la conception, ni sur le dessin, ni allé sur le chantier» lors de la construction de l’immeuble en 1997-1998, époque à laquelle il était occupé par la création d’un cabinet à Shanghai.

Trois ans de prison, dont dix-huit mois avec sursis, avaient en outre été requis à l’encontre du conducteur des travaux, Eric Morand, 53 ans, qui a lui aussi été relaxé. Il avait expliqué que le mode de construction des balcons avait été modifié pour tenir les délais du chantier. Le patron de l’entreprise de construction, Patrick Bonnel, 73 ans, a en revanche été condamné à trois ans de prison avec sursis et près de 25 000 euros d’amende. A la barre, il avait reconnu une faute «grave» et «inexcusable», se disant «honteux» du travail de ses équipes. Le patron de l’entreprise de BTP «ne s’est pas assuré de la formation et de la compétence du chef de chantier et des ouvriers», ce qui a entraîné un «risque qu’il ne pouvait pas ignorer en tant que professionnel de la construction», a dit la présidente du tribunal.

Le chef de chantier Jean-Marcel Moreau, 63 ans, et le représentant du bureau de vérification Apave, André de Douvan, 84 ans, ont tous deux été condamnés à dix-huit mois de prison avec sursis et 1 000 euros d’amende, des peines conformes aux réquisitions.

Mis à jour : le 9 juin à 18 h 40 avec l’appel du parquet