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Drogues

Chemsex : des enquêtes ouvertes à Bordeaux après quatre surdoses dont deux mortelles

Le parquet de Bordeaux a annoncé ce mercredi 20 mars avoir ouvert trois enquêtes distinctes sur quatre overdoses, dont deux mortelles, subies mi-mars à plusieurs jours d’intervalle par des hommes consommant des produits stupéfiants au cours de sessions «chemsex».
De la 3-MMC (méthylméthcathinone), nouveau produit de synthèse de la famille des cathinones de synthèse. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
publié le 20 mars 2024 à 22h03

Trois enquêtes distinctes portant sur quatre overdoses, dont deux mortelles, ont été ouvertes ce mercredi 20 mars par le parquet de Bordeaux. Ces surdoses aux produits stupéfiants sont survenues mi-mars à plusieurs jours d’intervalle par des hommes adeptes de sessions «chemsex». Basé sur la contraction de «chemicals» (produits chimiques) et de «sex», le «chemsex» désigne le fait de consommer des produits psychotropes dans le but d’intensifier et /ou de prolonger les rapports sexuels.

C’est après la découverte le 12 mars des corps de deux hommes morts, «manifestement d’overdoses» dans leur appartement de Bordeaux, qu’une première enquête a été ouverte pour «homicide involontaire». Selon le parquet, qui exclut l’intervention d’un tiers et attend les résultats des «analyses toxicologiques et anatomopathologiques», les deux victimes, en relation depuis trois ans, étaient des consommateurs de stupéfiants «de type GHB et 3MMC». Quelques jours plus tard, c’est un autre homme qui est hospitalisé pour un malaise survenu à son domicile. L’individu avait consommé de la 3MMC, de la kétamine et du poppers avec deux autres hommes, a ajouté le parquet. Une enquête a depuis été ouverte pour trafic de stupéfiants et blessures involontaires.

Dans une troisième procédure, un homme, également «adepte de chemsex» selon le parquet, a été renvoyé devant le tribunal fin avril pour importation, acquisition, transport et cession de stupéfiants (3MMC, cocaïne, ecstasy et MDMA). Le 15 mars, le suspect, âgé d’une quarantaine d’années, avait été découvert seul et inconscient à son domicile par un personnel de ménage. Hospitalisé et interpellé à sa sortie de l’hôpital, il a reconnu devant les enquêteurs «organiser des soirées» chemsex et y «vendre des stupéfiants depuis 2021». «Aucun lien n’a pu être fait entre ces trois procédures», toutes confiées à la Division de la criminalité territoriale, a précisé le parquet de Bordeaux dans son communiqué.

Décupler le plaisir sexuel, l’excitation ou encore augmenter l’endurance

Dans un message posté sur X (anciennement twitter), l’addictologue William Lowenstein, président de SOS Addictions, sonne l’alerte autour de ces substances «achetées [dans] la rue» et recommande de ne pas consommer seul, «de faire tester les produits» ou bien de consommer «une mini dose d’abord».

De quelles substances parle-t-on ? Le GHB, pour acide gamma-hydroxybutyrique, est surnommé la «drogue du violeur», l’acide gamma-hydroxybutyrique peut être utilisé à des fins criminelles par des agresseurs qui souhaitent placer leur victime dans un état de sédation pouvant entraîner une amnésie. La 3MMC, pour 3-méthylméthcathinone, est une substance de synthèse appartenant à la famille des cathinones. Sa consommation ne se cantonne plus aux espaces accueillant la pratique du chemsex, généralement associé à la communauté gay sans lui être exclusif. Cette molécule a fait irruption dans le milieu festif queer et les soirées alternatives technos où des personnes se définissant comme hétérosexuelles et ne pratiquant pas le chemsex consomment cette poudre blanche. Ces deux drogues de drogues de synthèse sont souvent prisées des usagers de «chemsex», car leurs effets décupleraient le plaisir sexuel, l’excitation ou encore permettraient d’augmenter l’endurance.

Le «chemsex» est apparu dans les années 2000 et la pratique a été favorisée ces dernières années par les applications de rencontre comme Grindr, pour des sexparties sur un temps long (un week-end, plusieurs jours d’affilée). Outre les risques de surdose ou liés à l’injection de stupéfiants, cette pratique peut entraîner une fatigue intense, avec des effets de déprime, d’anxiété et de paranoïa chez ses adeptes les plus assidus.