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Mémoire

Christian Delorme, le «curé de Minguettes» : «Nous ne sommes pas guéris de notre histoire coloniale»

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Rencontre avec le prêtre qui fut l’un des artisans de la Marche pour l’égalité et contre le racisme. Pour lui, le rapport entre les jeunes et la police n’a pas été résolu.
Le père Christian Delorme, à Gretz-Armainvilliers (Seine-et-Marne), en 2016. (Philippe Lissac/Leemage. AFP)
publié le 13 octobre 2023 à 7h11

Changé ? «Avec l’âge, j’ai perdu trois centimètres», lâche dans un grand sourire Christian Delorme. «1,89 m au lieu de 1,92 m. Et cela m’a un peu agacé !» Pour le reste, celui qui a été baptisé «le Curé des Minguettes» (1), à l’origine de la Marche pour l’égalité et contre le racisme, n’a pas franchement changé, avec sa haute silhouette, ses mots fermes, son sourire élégant, et cette façon bien à lui de bouger les bras comme pour réchauffer l’atmosphère.

Christian Delorme aime parler. Il a un peu plus le temps en ce moment ; depuis cet été, il est à la retraite. De passage à Paris, on le rencontre dans un café. Nous ne l’avions pas revu depuis plus de trente ans. Et alors que s’approche un nouvel anniversaire de cette marche (dont le départ à Marseille avait été donné le 15 octobre 1983 pour se terminer en apothéose en décembre à Paris), comment ne pas remonter le temps avec lui ? Et tenter de répondre à cette question : «Comment se fait-il que l’on soit arrivé à cet échec, avec aujourd’hui des banlieues souvent en lambeaux, des jeunes gangrenés par la violence, la drogue et parfois le repli identitaire, et cela alors que cette marche, surnommée “la Marche des beurs” signifiait l’inverse ?» «C’était une main tendue. Les jeunes se découvraient en nombre et voulaient être pleinement intégrés.»

Reprenons. En 1983, Christian Delorme était alors jeune. Né en 1950, prêtre dans une paroisse près de Lyon, à Saint-Fons, il avait derrière lui un passé imposant, marq