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Libération
Féminicide

Confondu par son ADN, un suspect écroué dix ans après le viol et le meurtre d’une octogénaire en Seine-et-Marne

L’homme de 39 ans, identifié grâce à son inscription au fichier national des empreintes génétiques dans le cadre d’une autre affaire, reconnaît les crimes perpétués contre une femme dans une résidence pour seniors en 2015. Il encourt vingt ans de réclusion criminelle.

Le suspect a été détecté grâce à son ADN, prélevé en 2024 lors d'une garde à vue pour un autre motif. (Mehdi Fedouach/AFP)
Publié le 16/10/2025 à 17h44

Dix ans d’enquête judiciaire pour un meurtre que le suspect avoue avoir dissimulé «en faisant les mêmes gestes que l’on peut voir dans un film». Le suspect, qui a finalement reconnu les faits, a été mis en examen pour «homicide volontaire précédé, accompagné ou suivi de viol et viol sur personne vulnérable» et placé en détention provisoire mercredi 15 octobre, a annoncé le procureur de la République de Meaux dans un communiqué. Soit presque dix ans après son crime.

Le 12 juillet 2015, une octogénaire est retrouvée morte dans une résidence pour personnes âgées de la commune de La Ferté-Gaucher, en Seine-et-Marne, avec des traumatismes graves sur le crâne et le ventre. Son logement, situé au rez-de-chaussée, est verrouillé de l’intérieur ; les enquêteurs ne relèvent ni vol, ni traces de fouille. Ils emportent pour seul indice un gilet maculé de sang, posé près du corps de la victime.

Garde à vue pour violences conjugales

Durant une décennie, l’enquête mobilise de nombreuses expertises médico-légales, génétiques et des théories sur le profil du meurtrier. La section de recherches de la gendarmerie de Paris, chargée des investigations convoque un premier suspect en 2019, quatre ans après le meurtre. Il avoue être l’auteur du crime, avant de se rétracter ; il sera libéré un an plus tard, faute de preuves de sa présence sur les lieux.

L’affaire connaît un tournant décisif en 2024. Les analyses génétiques, renouvelées plusieurs fois par les enquêteurs au cours de l’instruction, révèlent un ADN fraîchement inscrit au fichier national des empreintes génétiques. Elles appartiennent à un homme de 38 ans, né en 1986, dont l’ADN a été prélevé dans le cadre d’une garde à vue pour violences conjugales au mois de mars. Passé sous les radars des enquêteurs, l’individu n’avait été jusque-là mis en cause par la justice que pour des délits routiers.

Interpellé, puis entendu par les magistrats le 15 octobre 2025, le suspect passe aux aveux. Il reconnaît être un familier de la résidence séniors où son arrière-grand-mère avait été prise en charge et confirme avoir prémédité son geste. Il avoue qu’au moment des faits, il pensait depuis plusieurs semaines «à violer quelqu’un». Sa mère rapporte d’ailleurs qu’à cette période, le comportement de son fils avait changé ; il s’enfermait, refusait de sortir ou même de s’alimenter.

«Du mauvais côté»

Devant les enquêteurs, le prévenu livre le récit détaillé de la nuit du 12 juillet 2015. Après avoir passé la soirée au domicile d’un ami, au cours de laquelle il s’alcoolise fortement, il pédale jusqu’au parc de la résidence seniors de La Ferté-Gaucher. Repérant une fenêtre ouverte, celle de la chambre de l’octogénaire, il y jette «une pomme de terre». La victime se serait alors réveillée et l’aurait interpellé. Il aurait alors basculé «du mauvais côté», dit-il.

Il rapporte lui avoir porté de nombreux coups de poing et de pied avant de l’étouffer à l’aide d’un coussin et d’une couverture. L’homme justifie les faits de viols, commis post-mortem avec la canne de la victime, par «la rage» et «l’alcool». Faisant preuve d’une grande méthode – empruntée aux films policiers – il nettoie ses empreintes à l’aide d’un plaid, et prend soin de quitter les lieux en évitant les caméras de surveillance. Il jette le plaid et la canne dans une rivière située à proximité. Seul oubli du prévenu dans la liste des précautions : le gilet ensanglanté, retrouvé à proximité de la victime, qui a permis de l’inculper.

Après dix ans de silence, l’homme de 39 ans a affirmé aux magistrats chargés de l’enquête «être soulagé d’avoir dit la vérité et que la machine soit enclenchée», exprimant «d’immenses regrets pour la famille». Il encourt jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle.