La corruption était l’infraction pénale la plus représentée dans les affaires jugées en première instance pour des atteintes à la probité en 2021 et 2022, suivie de celle de détournement de fonds ou de biens publics, selon une étude de l’Agence française anticorruption (AFA) publiée lundi 9 décembre. A l’occasion de la Journée internationale de lutte contre la corruption, l’AFA, créée en 2016 et qui a pour mission d’objectiver le phénomène corruptif, a analysé 504 décisions de justice de première instance rendues entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2022 portant sur des atteintes à la probité, correspondant à 489 affaires et 1 350 prévenus.
La corruption, active ou passive, est l’incrimination pénale la plus représentée parmi l’ensemble des six infractions d’atteinte à la probité. Elle représente 36,9 % des infractions et 29,2 % des affaires. La corruption des agents publics concerne 67,25 % des affaires, suivie par la corruption privée (24,56 %). La corruption liée aux élus publics (5,85 %) et la corruption liée à la justice (1,75 %) viennent ensuite. Le détournement de fonds ou de biens publics représente 22,1 % des infractions et 26,4 % des affaires, le favoritisme 15,5 % des infractions et 18,3 % des affaires.
La prise illégale d’intérêts (conséquence de la gestion inadaptée d’un conflit d’intérêts dans une mission de service public qui aurait dû conduire à un déport ou une abstention de la personne concernée), le trafic d’influence (le fait de monnayer son influence pour peser sur une décision) et la concussion (la perception illicite d’argent par un fonctionnaire) arrivent ensuite, représentant respectivement 17,1 %, 5,8 % et 3,2 % des affaires.
«Les femmes sont-elles moins corrompues que les hommes ?»
Concernant le profil des prévenus, 79,7 % sont des hommes et 20,3 % des femmes. Dommage que l’AFA ne s’attarde pas sur ces chiffres sur le genre et la corruption, sujet abordé il y a plus de dix-sept ans par Transparency international dans un document de travail. Plusieurs études, dont une menée dans 150 pays au début du millénaire par la Banque mondiale, ou celle menée par le centre Iris de l’Université du Maryland, ont estimé que plus les femmes participaient à la vie publique, plus le degré de corruption diminuait. Et en 2020, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime a publié un rapport sur la question, interrogeant : «Les femmes sont-elles moins corrompues que les hommes ?» Ou ont-elles moins l’occasion de l’être ?
Sur le total, les acteurs «corruptifs» sont, à 30,1 % d’entre eux, des agents publics, 23,2 % des dirigeants de société, 18 % des particuliers, 11,6 % des élus et 9,9 % des employés. Un peu plus de la moitié (51,6 %) des décisions de justice concernent le secteur public. Dans le détail, les collectivités territoriales concentrent près de la moitié des décisions de justice impliquant le secteur public, suivies des administrations centrales et déconcentrées de l’Etat (24,3 %), «avec une prédominance des services assurant des fonctions régaliennes», telles que les forces de sécurité intérieure, la justice (administration pénitentiaire) et les finances publiques. Dans le secteur privé, les secteurs des activités spécialisées, scientifiques et techniques – activités juridiques et comptables, gestion, architecture, publicité et marchés publics – (15,4 % des décisions) et de la construction (14,5 %) sont les plus exposés aux atteintes à la probité.
Enfin, dans 71,7 % des cas, une condamnation a été prononcée. Dans 37,8 % des cas, les personnes ont été condamnées à une peine d’emprisonnement seule. Dans 37,5 % des cas, le prévenu personne physique est condamné à une peine d’emprisonnement et à une amende et dans 22 %, seule une amende est prononcée.