Les préfectures de Corse ont appelé ce vendredi 11 avril la population à «déposer les armes» via une opération d’abandon simplifié d’armes dans une île où leur taux de détention est plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale. Pointant «une situation préoccupante en matière de détention et d’usage d’armes à feu en Corse» avec «un taux de détention atteignant 350 armes pour 1 000 habitants en 2022», soit «plus du double de la moyenne nationale qui est de 150 armes pour 1 000 habitants», les préfectures de Haute-Corse et de Corse-du-Sud organisent cette opération du 28 avril au 4 mai.
Pendant cette période, «tout détenteur d’armes ou de munitions non déclarées pourra s’en dessaisir en toute sécurité et sans aucune conséquence administrative ou judiciaire» et de façon totalement gratuite, précisent-elles. Ces armes, y compris celles détenues légalement, pourront être rapportées dans les brigades de gendarmerie ou les commissariats de police des principales villes corses. Cette importante détention d’armes s’explique notamment par un grand nombre de chasseurs. La Corse compte ainsi «plus de 17 000 détenteurs d’un permis» de chasse, soit «un homme sur cinq» sur l’île, indique la Fédération départementale des chasseurs de Corse-du-Sud.
Reportage
Mais l’île est aussi «au premier rang national» en termes d’homicides rapportés à la population, avec «18 homicides et 16 tentatives d’homicides» en 2024 pour 355 000 habitants – l’équivalent de Nice –, avait rappelé en janvier le préfet de Corse, Jérôme Filippini. Depuis le début de l’année, sept homicides dont six règlements de comptes ont déjà ensanglanté la Corse.
«Cette violence n’est pas une fatalité», avait assuré le préfet, estimant que la Corse «porte en elle les ressources» pour «échapper à cette histoire. Mais il faut le vouloir et le décider ensemble», avait-il insisté en annonçant son intention d’organiser cette opération «Déposons les armes». «Je ne m’illusionne pas sur le fait que les bandits qui détiennent des armes ne vont pas venir à la gendarmerie pour les déposer mais moins il y aura d’armes présentes en Corse, mieux nous nous porterons», a insisté le préfet fin février lors de la présentation du bilan de la délinquance.
Une opération nationale il y a deux ans
Le principe de la collecte d’armes n’est pas nouveau en France. Une vaste opération avait déjà été organisée fin 2022 dans 300 points de récolte sur tout le territoire et avait permis de récupérer quelque 150 000 objets, pour la plupart hérités d’un proche ou dédiés à la chasse. Contrairement aux idées reçues, les Français sont très armés et, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, ce sont 2 millions de fusils et autres pistolets qui circuleraient dans le pays sans être déclarés. Ce qui reste ridicule comparé aux plus de 120 armes à feu pour 100 habitants des Etats-Unis (selon le Small Arms Survey) qui se placent au premier rang mondial du sujet.
Trouvailles
Ces récoltes avaient également permis la découverte d’objets étonnants ou historiques : des obus, grenades, dagues nazies ou fusils antichars de l’Empire allemand ont notamment refait surface. L’événement, pas toujours très organisé, a également connu quelques couacs. Un policier du Val-de-Marne a été arrêté le 9 décembre 2022 pour avoir volé au moins six armes. Il expliquait aux personnes qui voulaient déposer pistolets ou fusils qu’il allait venir lui-même les récupérer à leur domicile. Il a été trahi par une dame âgée bien intentionnée : celle-ci a rappelé le commissariat car elle avait oublié de rendre des munitions. Les collègues du policier-voleur se sont alors rendu compte de l’arnaque.