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Retrouvailles

Le procès de Cyril Hanouna pour injures publiques envers le député insoumis Louis Boyard renvoyé au 17 décembre

Pour avoir insulté l’élu dans son émission en novembre 2022, l’animateur risque jusqu’à 12 000 euros d’amende. La séquence avait déjà valu à la chaîne une amende record de 3,5 millions d’euros de l’Arcom.
Cyril Hanouna, à Boulogne-Billancourt, le 30 septembre 2021. (Denis Allard/Libération)
publié le 12 novembre 2024 à 12h11
(mis à jour le 12 novembre 2024 à 15h52)

La séquence avait été surmédiatisée et avait largement fait réagir le monde politique. Ce mardi 12 novembre devait s’ouvrir au tribunal judiciaire de Paris le procès de Cyril Hanouna pour injures publiques envers le député de La France insoumise (LFI) Louis Boyard. Le 10 novembre 2022, lors d’une passe d’armes de plus de huit minutes, diffusée en direct dans l’émission Touche pas à mon poste (TPMP) sur C8, Cyril Hanouna avait insulté à plusieurs reprises l’élu du Val-de-Marne. L’animateur encourt jusqu’à 12 000 euros d’amendes. Le procès a finalement été renvoyé au 17 décembre, à la demande de la partie civile, en raison d’une incompatibilité de calendrier, l’avocate de Louis Boyard se trouvant en Guyane pour une autre affaire.

Invité dans l’émission de Cyril Hanouna pour parler du sort du navire Ocean Viking, bloqué plusieurs semaines en mer avec 230 migrants secourus à son bord et finalement accueilli au port militaire de Toulon, Louis Boyard en avait profité pour rappeler les déboires judiciaires au Cameroun de Vincent Bolloré, patron de la chaîne. L’élu avait également cité le milliardaire breton comme étant l’une des cinq personnes les plus riches de France qui «appauvrissent l’Afrique» et «particip [ent] à la déforestation».

«T’es qu’une merde»

Une prise de position qui avait fait sortir de ses gonds Cyril Hanouna. «Tu sais que t’es dans le groupe Bolloré ici ? Qu’est-ce que tu viens foutre ici alors ?», avait-il lâché, lançant une séquence qui avait fait le tour des réseaux sociaux. Pendant plusieurs minutes, Louis Boyard avait été violemment pris à partie par l’animateur et ses chroniqueurs. «T’es qu’une merde», «espèce d’abruti», «tocard», avait notamment lancé l’animateur au jeune élu. La séquence s’était transformée en règlement de compte entre les deux hommes, s’accusant mutuellement de «faire monter le racisme en France». L’élu avait finalement quitté le plateau, sous les huées des téléspectateurs.

La scène avait fait vivement réagir la sphère politique. «Ce qui s’est passé ce soir sur #TPMP est gravissime. Personne ne dit «ferme ta gueule» à un député de mon groupe», avait réagi la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot, avant de saisir l’Arcom. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet avait considéré la séquence «dégradante». Enfin, l’ouverture par l’Assemblée nationale d’une commission d’enquête sur l’empire Bolloré avait été demandée par Louis Boyard. De son côté, regrettant uniquement «de l’avoir insulté», Cyril Hanouna avait contre-attaqué en annonçant porter plainte pour «diffamation» contre le député insoumis, alors qu’il n’a jamais caché son amitié avec son patron Bolloré.

Au-delà de la plainte de Louis Boyard pour «injure publique envers une personne chargée d’une mission de service public», la séquence avait eu des conséquences pour C8. Les insultes envers un député en direct à la télévision avaient valu une amende record à la chaîne de 3,5 millions d’euros de l’Arcom en février 2023, confirmé par le Conseil d'Etat en juillet dernier, pointant du doigt «un défaut de maîtrise de son antenne par l’éditeur».

Corruption en Afrique

La séquence a aussi pesé dans la décision de l’Arcom de ne pas renouveler la fréquence TNT de la chaîne, privant Bolloré d’un de ses outils pour avancer ses sujets favoris dans le débat public. Les 33 mises en demeure, amendes et rappels au règlement selon un décompte du Monde et les 7,8 millions d’euros d’amendes cumulés pour dérapages contre C8 avaient été l’un des sujets épineux pour la chaîne lors de son audition, préalable à l’attribution des fréquences. La chaîne avait alors promis de diffuser TPMP avec un léger différé de 15 à 45 minutes, pour prévenir les dérapages et éviter d’autres sanctions. Une décision qui n’avait pas suffisamment convaincu l’Arcom.

Si cette affaire médiatique a pris des proportions démesurées, elle a presque occulté le sujet premier : les soucis judiciaires de Vincent Bolloré au Cameroun. En 2023, son entreprise a été condamnée à verser 140 000 euros à un groupe de riverains camerounais, affectés par des plantations d’hévéas destinés à produire de l’huile de palme. Surtout, en juin dernier, le Parquet national financier a requis un procès contre le breton pour «corruption d’argent public étranger» et «complicité de corruption d’agent public étranger», alors qu’il est visé depuis dix ans par une enquête pour ses activités autour des ports de Lomé au Togo et de Conakry en Guinée. Il est accusé d’avoir utilisé les activités de conseil politique de sa filiale Euro RSCG, devenue Havas, pour décrocher frauduleusement leur gestion.

Mise à jour : à 16 heures, avec le renvoi du procès au 17 décembre.