«Tu la fermes ou t’en veux une autre ?» : voilà les propos qui étaient contenus dans un document audio, révélés par la presse trois jours après les faits et diffusés intégralement lors du premier jour d’audience le 3 avril. À savoir plusieurs menaces lancées à Souleyman Adoum Souleyman, un étudiant tchadien qui faisait partie de sept personnes arrêtées en marge de manifestations contre la réforme des retraites à Paris. Ils étaient soupçonnés d’avoir pris part à des dégradations dans un cortège sauvage dans le centre de la capitale, dans la nuit du 20 au 21 mars 2023. L’un des interpellés avait alors discrètement enregistré les échanges avec les policiers.
Après une première journée d’audience il y a deux mois, le procès de policiers de la brigade de répression de l’action violente motorisée (Brav-M) pour des violences commises sur deux personnes, reprend ce jeudi 12 juin devant le tribunal correctionnel de Bobigny. Deux agents ont été renvoyés devant la justice par le parquet pour violences par personne dépositaire de l’autorité publique et menaces de violences réitérées envers Souleyman Adoum Souleyman. Huit autres policiers de la brigade comparaissent sur sa demande et celle d’une autre étudiante, arrêtée dans le même coin de rue que l’étudiant tchadien, via le mécanisme de citation directe qui permet à un plaignant de saisir directement le tribunal.
«Tu n’as pas de couilles, toi»
Souleyman Adoum Souleyman, qui a toujours nié avoir participé au cortège sauvage, a expliqué au tribunal le 3 avril, avoir subi une «balayette» et avoir été mis au sol par un agent de la Brav-M avant même qu’un mot ne lui soit adressé. Dans la foulée, un policier effectue une palpation du jeune, lui touchant fermement les parties génitales en lui disant «tu n’as pas de couilles, toi». Pour ce geste, l’étudiant tchadien accuse le gardien de la paix d’agression sexuelle et les dix agents de cette brigade de complicité d’agression sexuelle.
A la barre, les deux policiers poursuivis par le parquet ont peiné à expliquer les violences et menaces qu’ils reconnaissent avoir infligées au jeune étudiant. «Dans l’enregistrement, à aucun moment Souleyman Adoum Souleyman ne manque de respect» a souligné le président du tribunal Youssef Badr, «votre phrase aujourd’hui, c’est ma main a heurté son visage. Non, vous l’avez giflé», a-t-il fustigé. L’interrogatoire des huit policiers cités à comparaître débutera dans la matinée et le délibéré de ce procès sera rendu le 7 juillet.