Des «actes abjects», une «profanation», ou encore un geste «inqualifiable». Ce mardi 9 septembre, de nombreuses réactions indignées ont suivi la découverte au petit matin, de plusieurs têtes de cochon, animal considéré comme impur dans l’islam, devant des édifices religieux musulmans à Paris et en région parisienne. De cinq au départ, puis sept, leur chiffre s’élève désormais à «au moins neuf», selon les déclarations à la mi-journée du préfet de police de la capitale.
Libération fait le point sur ce que l’on sait de ces découvertes macabres.
Où ces têtes de porcs ont-elles été découvertes ?
Le parquet de Paris indique auprès de Libération que les premières têtes de porc ont été découvertes sur la voie publique devant une mosquée du XVe arrondissement de Paris, devant la mosquée Anwar El-Madina dans le XXe arrondissement et enfin devant deux mosquées du XVIIIe arrondissement. «Sur l’un des lieux, le mot “Macron” a été peint à l’encre bleue», ajoute la même source. D’autres têtes d’animaux ont également été retrouvées devant des mosquées de proche banlieue, à Montreuil (Seine-Saint-Denis) - devant deux lieux distincts - à Montrouge (Hauts-de-Seine), à Malakoff (Hauts-de-Seine) et enfin à Gentilly (Val-de-Marne).
Au total, au moins neuf têtes ont été retrouvées, «quatre à Paris et cinq en petite couronne», a détaillé le préfet de police de Paris Laurent Nuñez lors d’un point presse, disant ne pas exclure «qu’on en découvre d’autres».
Une enquête ouverte
Après ces découvertes macabres, «une enquête a immédiatement été ouverte», a expliqué le préfet de police de Paris. La brigade criminelle de la préfecture de police de Paris a ainsi été saisie pour «provocation publique à la haine ou à la violence en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion» et «violence sans incapacité commise en raison de la race, l’ethnie, la nation ou la religion», fait savoir le parquet.
La maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo, qui a condamné des «actes racistes» et a assuré de sa «solidarité avec la communauté musulmane», a par ailleurs indiqué que la ville de Paris avait saisi la justice sur les mêmes faits. «Ça suffit !» a-t-elle encore fustigé sur Instagram.
La piste d’une ingérence étrangère
Pour le préfet de Paris, Laurent Nunez, «il est évident quand même qu’une action d’une telle ampleur, menée simultanément forcément par plusieurs personnes - on a quelques vidéos sur certains lieux où ces têtes de cochons ont été déposées - il est évident qu’une telle action interroge [...] On ne peut s’empêcher de faire des rapprochements avec des actions précédentes […] dont il a été avéré que c’étaient des actions d’ingérence étrangère», a souligné le préfet lors de son point presse, appelant toutefois à rester «très prudent».
Ces derniers mois, des étoiles de David et des mains rouges avaient été taguées dans la capitale et sa proche banlieue, ainsi que des cercueils disposés sous la tour Eiffel. A chaque fois, des personnes originaires d’Europe de l’est avaient été interpellées, avec des suspicions de pilotage par Moscou.
De Macron à Jean-Luc Mélenchon, une vive réaction des politiques
Dans la matinée, de nombreux politiques ont rapidement fait part de leur indignation sur les réseaux sociaux. Le ministre de l’Intérieur sortant, Bruno Retailleau, a notamment exprimé sur X «tout [s]on soutien aux responsables et aux fidèles des mosquées touchées par ces provocations insupportables. S’en prendre à des lieux de culte est d’une lâcheté insondable». Devant la presse, à l’issue d’une réunion des dirigeants de LR, il a ensuite abondé : «C’est l’indignation […] C’est absolument inadmissible […], j’espère qu’on retrouvera celles et ceux qui ont pu commettre cette sorte de profanation».
Philippe Goujon, maire LR du XVe arrondissement, a également dit sur X condamner «fermement cet acte inqualifiable», et apporter son «soutien à la communauté musulmane».
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Les réactions se sont également multipliées du côté de la gauche. Le député écolo Benjamin Lucas s’est indigné sur le même réseau social d’un acte «glaçant». «L’islamophobie gangrène la société, encouragée et amplifiée par le ministre démissionnaire de l’Intérieur et une galaxie médiatique dominée par l’extrême droite», a-t-il ajouté. Le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon a, lui, accusé Bruno Retailleau de «chauffer à blanc» l’islamophobie en France.
Aurore Bergé, ministre sortante déléguée chargée de la Lutte contre les discriminations, s’est pour sa part entretenue avec le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, «pour exprimer la solidarité du gouvernement à l’égard de nos compatriotes musulmans après que six mosquées à Paris et en petite couronne ont fait l’objet d’actes abjects». Lui a ensuite dénoncé «une nouvelle et triste étape dans la montée de la haine antimusulmane». «La Grande Mosquée de Paris condamne avec la plus grande fermeté les actes islamophobes perpétrés cette nuit», qui «visent à diviser notre communauté nationale», a-t-il déploré dans un communiqué, appelant «à une prise de conscience et à une solidarité nationale contre cette trajectoire de péril».
En début d’après-midi, Emmanuel Macron s’est lui entretenu avec les représentants de la communauté musulmane de Paris et leur a exprimé son «soutien», rapporte son entourage.
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