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Justice

Disparition d’Estelle Mouzin : l’Etat condamné pour faute lourde

Le père de la fillette disparue en 2003 avait mis en cause le travail des enquêteurs dans ce dossier, en particulier concernant la piste menant à Michel Fourniret.

Une policière consultant un dossier sur la disparition d'Estelle Mouzin, à Versailles le 9 janvier 2004. (Daniel Janin/AFP)
Publié le 03/09/2025 à 8h06, mis à jour le 03/09/2025 à 17h59

Tout a-t-il été fait pour retrouver Estelle Mouzin, victime de Michel Fourniret il y a plus de 20 ans ? Le tribunal judiciaire de Paris a estimé que non, ce mercredi 3 septembre, donnant raison au père de l’enfant de neuf ans, qui assignait l’Etat pour faute lourde et déni de justice. «Le manque de moyens humains et les dysfonctionnements» dans ces investigations «constituent une faute lourde et engagent à ce titre la responsabilité de l’Etat», précise le tribunal, le condamnant à payer 50 000 euros au titre du préjudice moral à Eric Mouzin.

En juin, le père de la fillette disparue le 9 janvier 2003 en rentrant de l’école à Guermantes (Seine-et-Marne), avait qualifié, devant la première chambre civile du tribunal, les actes du service enquêteur d’«amateurisme», considérant que l’Etat n’avait pas tout fait pour retrouver sa fille.

Au début de l’enquête, la piste Michel Fourniret avait un temps été suivie avant d’être abandonnée. Ce n’est qu’en 2020 que la juge Sabine Khéris, succédant à sept autres magistrats, avait réussi à faire reconnaître à ce tueur en série son rôle dans la mort de la fillette.

Condamné à la perpétuité incompressible pour les meurtres de sept jeunes femmes ou adolescentes entre 1987 et 2001, Michel Fourniret est mort en 2021, sans avoir été jugé pour la disparition d’Estelle Mouzin, dont le corps n’a pas été retrouvé.

L’instruction de deux décennies a mené à la condamnation en décembre 2023 de Monique Olivier à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de vingt ans, pour sa complicité dans trois enlèvements et meurtres commis par son ex-mari Michel Fourniret, dont celui d’Estelle Mouzin.

«Manquements du service public de la justice»

L’avocat d’Eric Mouzin, Me Didier Seban, rappelait avant le rendu de la décision qu’il a fallu «plus de vingt ans de combat pour savoir la vérité». «On aurait pu arrêter le parcours criminel de Michel Fourniret bien avant», affirme-t-il. «On aurait pu évidemment, dès les premiers jours de l’arrestation de Michel Fourniret, orienter l’enquête dans sa direction», insiste l’avocat.

De son côté, le procureur avait reconnu des «manquements du service public de la justice à l’égard de la partie civile». «Il y a une faute lourde mais entre cette faute lourde et le fait que Michel Fourniret n’a pas été mis en examen, il n’y a pas de causalité directe», avait-il déclaré. Au sujet du délai déraisonnable de l’instruction, le représentant du ministère public a estimé qu’il n’était «pas démontré de particulière période de carence ou d’inaction».

Eric Mouzin a demandé 150 000 euros au titre des préjudices matériel et financier et 200 000 euros pour le préjudice moral. Pour Me Seban, ce combat est également mené par son client pour d’autres proches de victimes de crimes non élucidés, car «il y a encore beaucoup de dossiers où les efforts ne sont pas faits pour donner la vérité aux familles».

Mise à jour à 18 heures avec la décision et la condamnation.