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Attaque dans un lycée à Nantes : après le choc, le temps de l’hommage et de l’enquête

Au lendemain de l’attaque au couteau qui a coûté la vie à une élève du lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides, un hommage a été organisé ce vendredi dans l’établissement. Le procureur de Nantes, Antoine Leroy, a tenu ce vendredi une conférence de presse.
Nantes, le 25 avril 2025. Etablissement scolaire Notre Dame de Toutes Aides. (Theophile Trossat/Libération)
publié le 25 avril 2025 à 8h54
(mis à jour le 25 avril 2025 à 22h04)
  • Une lycéenne est morte dans une attaque au couteau jeudi 24 avril au lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides à Nantes, dans le quartier Doulon. Trois autres personnes ont été blessées, dont l’une a vu son état s’améliorer ce vendredi. Le lycéen est désormais hors de danger, selon le procureur de Nantes.
  • L’assaillant, armé de deux couteaux, a été maîtrisé par un membre du personnel. Il a été interné jeudi soir à l’hôpital, après qu’un psychiatre a jugé que son état de santé était incompatible avec une garde à vue, a annoncé le procureur de la République de Nantes, Antoine Leroy.
  • Elèves, parents et amis se sont rassemblés en nombre dans l’après-midi au sein de l’établissement en hommage à la jeune Lorène, tuée par l’adolescent jeudi.
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Quelles suites pour l’enquête ? Lors de sa conférence de presse, le procureur de Nantes a expliqué que «le jeune mis en cause est dans un centre de soins dans lequel il va être traité quelques jours». Il a précisé ne pas connaître la durée, «ni à partir de quand la garde à vue pourra reprendre pour que l’audition puisse se poursuivre». Et le magistrat d’ajouter : «l’enquête a débuté sous la qualification de meurtre, mais il y a des éléments susceptibles de caractériser une préméditation, auquel cas nous serions sur un crime d’assassinat.»

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Déroulé de l’attaque, profil de l’assaillant, mobile... Ce qu’il faut retenir de la conférence de presse du procureur de Nantes. Un article à retrouver ici.

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Pas de «relation affective» avec la victime, «qu’il appréciait». Le procureur de Nantes, Antoine Leroy, écarte, lors de sa conférence de presse, l’hypothèse d’une «potentielle relation affective» entre l’assaillant et la jeune fille tuée. «Le concept de déception amoureuse n’est pas le concept que [le suspect] avance lui-même, donc en l’état on ne peut pas parler de déception amoureuse», a précisé Antoine Leroy. Paradoxalement, rapporte le procureur, «c’était la seule personne de ce lycée avec laquelle il pouvait avoir un dialogue de qualité. Il l’appréciait. Il l’avait rencontrée lors d’un séjour scolaire à Rome il y a quelques temps». C’est la raison pour laquelle, selon Antoine Leroy, «lorsqu’il entre dans la pièce, il ne s’en prend pas à elle par hasard», contrairement aux trois autres victimes.

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L’hypothèse du harcèlement écartée. Le procureur de Nantes assure que les enquêteurs n’ont trouvé aucun mobile à cette attaque. En revanche, ils écartent plusieurs hypothèses, à commencer par le harcèlement scolaire dont le mis en cause aurait pu être victime. «Le jeune indique n’avoir fait l’objet d’aucun harcèlement, ni à l’école, ni ailleurs, rapporte Antoine Leroy. Il avait simplement parfois le sentiment qu’on le traitait de façon différente des autres.»

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Un jeune suicidaire, solitaire, fasciné par Hitler, qui vivait avec sa mère. Le procureur de Nantes, Antoine Leroy, détaille ensuite la personnalité du mis en cause à travers quatre points. «C’est un jeune décrit par tout le monde comme étant extrêmement solitaire», commence-t-il. «Il a peu d’ami, voire pas du tout, il a peu de dialogue avec grand monde.» Sa mère, chez qui il vivait principalement, s’était inquiétée de cette solitude et avait organisé une rencontre avec du personnel éducatif de la maison des adolescents de Nantes. «Ce jeune a eu des entretiens à six reprises avec des personnes susceptibles de l’aider», explique le magistrat. Deuxième point mis en lumière : «Il résulte assez clairement dans cette personnalité une certaine fascination pour Hitler. Une fascination repérée par le personnel enseignant.» Il a été convoqué à ce sujet à la veille des vacances de Pâques, avec sa mère, par la direction de l’école.

Troisièmement, «il s’agit d’un jeune à l’évidence suicidaire», souligne Antoine Leroy. Un état révélé par plusieurs éléments factuels : il a notamment écrit au feutre sur les murs des toilettes où il était avant le passage à l’acte qu’il souhaitait «qu’on lui tranche la gorge». «Cette tendance suicidaire a aussi été relevée par le médecin qui l’a vu en garde à vue», note le magistrat qui précise que l’adolescent «va rejoindre une unité susceptible de traiter cette tendance suicidaire». Enfin, le magistrat souligne que le mis en cause, dont les parents sont divorcés, vivait avec sa mère «avec qui il entretenait de très bonnes relations et qui a fait des démarches pour l’aider». Il avait «des relations moins fréquentes et plus difficiles avec son père».

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L’assaillant stoppé par un responsable informatique. Après avoir tué la lycéenne, le suspect se «rend dans la pièce d’en face». Alors, «sans distinction aucune», l’adolescent s’en prend «à trois étudiants les plus proches de lui». «Une première jeune fille prend quelques coups de couteau non-graves. La deuxième victime, un jeune homme, prend des coups de couteau un peu plus graves et la troisième victime, également un jeune homme, prend des coups de couteau encore plus graves sur la partie haute du corps, notamment un ou plusieurs sur le crâne», détaille le magistrat.

Selon le procureur, en entendant l’ensemble des hurlements à l’étage, «un technicien informatique est monté très vite». Il est alors arrivé dans la salle de classe, dans laquelle il a dénombre trois victimes. En entrant dans la pièce, ce responsable informatique «voit le mis en cause avec le couteau à la main». Il décide «de lui asséner un coup de chaise dans le dos, sur le crâne». Le jeune adolescent se retourne et tente de riposter, avant d’être pris en chasse par le technicien, qui finit par le bloquer dans une «sorte de sas» duquel il ne pouvait plus ressortir. Il s’est alors engagé, selon le magistrat, «un dialogue rapide entre le personnel présent et le mis en cause, qui s’est alors calmé et a accepté de déposer le couteau et le petit canif».

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57 coups de couteau sur la victime. Le procureur, s’appuyant sur l’autopsie du corps de la victime, insiste sur la «violence de l’action». «Le mis en cause a donné 57 coups de couteau au total, sur le haut du corps, sur le crâne et dans la gorge, les plus mortels étant ceux donnés dans la veine jugulaire et la carotide». Le magistrat indique que l’assaillant a frappé sa victime alors qu’elle était debout et a continué alors qu’elle était à terre. «Il a continué à s’acharner sur elle».

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Un passage à l’acte le visage masqué. Le procureur de la République de Nantes, Antoine Leroy, poursuit sa conférence en retraçant la matinée du mis en cause. A 12h30, alors qu’il venait de quitter les toilettes, le jeune homme se rend dans une première classe de seconde où se déroule un cours de mathématiques. Il a alors «le visage découvert» et «reste sur le pas de la porte». Là, «il demande si l’un de ses camarades se trouve présent, le prof et les élèves répondent que non», explique le magistrat. L’adolescent fait alors demi-tour, retourne aux toilettes où il se masque le visage. «Tous les évènements qui vont suivre se feront à visage dissimulé. Il ne prononcera strictement aucune parole.» Il retourne alors dans la même classe de seconde, et s’en prend «immédiatement et exclusivement à une seule personne, qui sera la jeune fille qui décèdera des coups de couteau qu’il lui a donnés», devant l’ensemble des élèves et la professeur.

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L’assaillant reste enfermé plusieurs minutes dans les toilettes avant de commettre son geste. «Tout commence à 12 heures, introduit le procureur Antoine Leroy, lorsque le mis en cause se rend dans les toilettes à l’étage de l’établissement où il reste un certain nombre de minutes». Le magistrat explique que dans ces toilettes, «il va se passer un certain nombre de choses». L’assaillant va notamment déposer son sac à dos, «dans lequel les policiers trouveront une réplique de pistolet dont il ne fera pas usage». Et d’ajouter que deux couteaux ont été retrouvés : l’un avec une lame de 20 centimètres dont il a fait usage, et un autre dont il ne s’est pas servi. Durant ces «quinze minutes» environ dans les toilettes, «il écrit quelques phases aux murs», «se scarifie». Puis, à 12 h 15, il envoie son manifeste via l’ENT.

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Des victimes âgées entre 15 et 16 ans. Le procureur indique que l’assaillant vient d’avoir 16 ans, et que la lycéenne qui a été tuée venait d’atteindre 15 ans. Les trois autres blessés sont deux garçons et une jeune fille âgés de 15 ans pour les deux premiers et de 16 ans pour la jeune fille. Antoine Leroy précise aussi que le suspect est entré dans l’établissement au collège en 2021, avant d’entrer au lycée où il est en seconde.

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Le moment de recueillement s’achève. Aux abords du lycée, une élève scolarisée en seconde dans la classe de l’auteur présumé des coups de couteau nous lâche que «c’était horrible». Elle ne souhaite pas être interviewée. A peine laisse-t-elle entrevoir à Libération un aperçu du recueillement qui vient de s’achever à Notre-Dame-de-Toutes-Aides. «On a déposé des fleurs sur un autel et on a lu des textes. Ensuite il y a eu une minute de silence», glisse la jeune fille avant de s’éclipser.

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«On préfère ne donner aucune information». Les élèves du lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides, commencent à sortir du bâtiment où avait lieu le rassemblement. Ils naviguent entre la foule compacte qui patiente toujours à l’extérieur. Les visages sont graves, fermés, les têtes basses. La demande de la famille de Lorène semble respectée jusqu’au bout : ne pas parler aux journalistes. «Je ne parle pas», peut-on par exemple entendre.

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Sur place, lors du rassemblement en l’hommage des victimes de l’attaque.

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«Ça sera pour toujours l’histoire de notre quartier.» Impossible de rentrer à Notre Dame de Toutes Aides pour Maxime et Albane. Mais les deux élèves du lycée voisin de la Colinière n’y comptaient pas vraiment : «On a reçu un mail de notre CPE nous demandant de ne pas y aller. De toute façon, on n’avait pas besoin d’entrer. L’objectif n’est pas de venir voir, mais de rendre hommage et d’apporter du soutien, indique Maxime. On habite tous dans le quartier donc on est tous liés dans un sens.» Pour Albane, elle aussi habillée en blanc, «avec les faits divers dans les médias, il y a de la distance. Ici, ça sera pour toujours l’histoire de notre quartier».

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«On ne peut pas tout demander aux profs.» Plusieurs centaines de personnes, des lycéens des environs pour la plupart, patientent toujours devant le lycée. Ils sont venus en soutien des victimes, tout comme de nombreux parents d’élèves, qui, eux, ne sont pas autorisés à pénétrer à l’intérieur de l’établissement. Parmi eux, Céline, maman d’une élève de cinquième : «C’est sorti aujourd’hui, ma fille m’a parlé. Elle m’a décrit ce qu’il s’est passé. Elle était dans le bâtiment. Elle a entendu des cris, des gens qui couraient». Elle poursuit : «Est ce qu’il faudrait plus de sécurité ? Il faut être vigilant avec nos enfants, voir ce qu’ils font sur les réseaux sociaux. Je pense au professeur. Il faut les aider davantage plutôt que de mettre de l’argent dans des portiques de sécurité. Moi, je crois aux rôles des parents. On ne peut pas tout demander aux profs.»

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«Etre là pour eux.» «Ce qu’ils ont vécu, c’est pas facile, il faut qu’ils aient du soutien», arguent trois ados aux abords du lycée. Ils n’y sont pas scolarisés et ne peuvent donc pas y rentrer. Mais Hugo, Ethan et Baptiste ont tenu à venir ce vendredi «pour rendre hommage à la famille». Il ont aussi quatre amis qui étaient présents en classe au moment de l’attaque au couteau : «certains ont fui et d’autres sont restés dans la classe car la porte a été fermée à clé». Hier soir, «pour être là pour eux», le petit groupe a organisé une soirée autour d’un barbecue. «On a beaucoup parlé de ça, ils en avaient gros sur la patate. On était là pour les écouter et leur changer les idées», ajoutent les adolescents. Partie de foot et musique brésilienne, «pour mettre un peu de soleil dans la vie», étaient au programme.

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«C’est terrible.» Aux pieds du tram sur la petite place envahie du blanc des tenues des lycéens, à l’entrée du lycée toutes aides, Marc (prénom modifié), scolarisé en seconde, se tient sous le magnolia en attendant son groupe de copains. «C’est terrible», répète-t-il les yeux rougis, «encore plus pour ceux qui étaient dans les classes attaquées». A côté de lui, une femme avec deux roses blanches sanglote. «Je ne peux pas parler, c’est trop dur pour moi. Je suis venue pour mes enfants scolarisés ici», déclare-t-elle avant de rejoindre l’entrée de l’établissement. Par notre correspondante, Marine Dumeurger.

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«J’espère que ça va leur faire chaud au cœur». Être présent au rassemblement de ce vendredi après-midi, «c’est hyper important en tant qu’humain et en tant que Nantais», souligne une ancienne élève du lycée Notre-Dame de Toutes-Aides. Elle est l’une des rares à prendre la parole. Les élèves encore scolarisés au sein de l’établissement répondent de concert «on ne peut pas parler» aux journalistes. La forte présence médiatique est au cœur de toutes les conversations. «J’espère que la famille pourra voir à quel point on est tous solidaires, même si je suis sûre que plein de gens n’ont aucun lien avec cet établissement, j’espère que ça va leur faire chaud au cœur, même pour les personnes qui ont été blessées et pour les élèves qui ont été trop traumatisés», continue de son côté l’ancienne lycéenne, à l’ombre d’un arbre. «Je pense que c’est très difficile pour la famille. C’est important pour eux de voir qu’ils ne sont pas tout seuls et que tout le monde est là», poursuit-elle.

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Sur place, le rassemblement est sur le point de commencer. Les élèves passent un par un le filtrage mis en place par la police et l’établissement, en prenant soin de montrer leurs cartes d’étudiants. Une file d’attente blanche d’adolescents vêtus de blanc se forme aux abords de l’établissement. Beaucoup d’entre eux viennent avec des fleurs et attendent de pouvoir pénétrer dans l’enceinte de Notre Dame de Toutes Aides. Par notre journaliste Léonard Cassette.

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«J’ai trop de raisons dans la tête.» Les premières déclarations de l’assaillant lors de sa garde à vue ont été dévoilées ce vendredi par le journal local Presse Océan. Devant les enquêteurs, l’adolescent né en 2009 a expliqué qu’il était «dans un genre de rêve lucide» lors de l’attaque. Il raconte s’être enfermé dans les toilettes en arrivant au lycée jeudi matin, tout en achevant son manifeste écrit «quelques jours plus tôt». Il y reste plusieurs heures. Lorsqu’il sort des toilettes, il raconte s’être «mis à courir avec le couteau [qu’il] avait à la main, un peu déconnecté de [lui-même]». Et de poursuivre : «Je suis rentré dans une classe et là, c’est parti […] J’ai commencé à planter des gens.» L’élève se dit «sous adrénaline» lors de cette attaque, et avoue ne «pas se souvenir» des coups de couteau commis. L’adolescent, qui évoque aussi le sentiment d’être perçu comme «quelqu’un de ringard, un peu stupide», finit par souligner qu’il n’a pas de motivations, car «il a trop de raisons dans la tête en ce moment».