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Justice

En Martinique, quinze mois de prison ferme requis contre Rodrigue Petitot

Le leader du mouvement contre la vie chère en Martinique est jugé pour «menaces et actes d’intimidation» envers le préfet du territoire. La décision du tribunal sera rendue vendredi.
Rodrigue Petitot, à Paris, le 3 novembre 2024. (Geoffroy Van der Hasselt/AFP)
publié le 23 janvier 2025 à 8h58

Au moins trente mois de prison, dont quinze avec sursis, ont été requis contre Rodrigue Petitot, leader du mouvement contre la vie chère en Martinique, qui comparaissait détenu mercredi pour «menaces et actes d’intimidation» envers le préfet du territoire.

La procureure, Odile de Fritsch, a requis contre le leader du Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens (RPPRAC) «une peine qui ne sera pas inférieure à trente mois d’emprisonnement, dont quinze maximum» avec sursis, assortie d’un sursis probatoire de deux ans et d’un maintien en détention. La décision du tribunal de Fort-de-France a été mise en délibéré à vendredi à 8 heures locales (13 heures à Paris).

Elle a en outre demandé au tribunal la confiscation des biens saisis et que soit prononcé à l’encontre de celui qu’on surnomme le «R» une interdiction de s’approcher de la résidence préfectorale et d’entrer en contact avec les victimes qui se sont constituées parties civiles. «Il eût été naturellement préférable que la décision soit rendue ce jour», a déclaré à l’AFP Eddy Arneton, l’un des cinq avocats du prévenu. «Nous attendons la décision sereinement», assure-t-il.

Il est reproché à Petitot d’avoir tenté le 11 novembre dernier de rencontrer le ministre chargé des Outre-mer de l’époque, Jean-Noël Buffet, qui effectuait un déplacement de quatre jours en Martinique, au terme de deux mois de tensions et plusieurs nuits d’émeutes en marge des manifestations contre le coût élevé des denrées alimentaires sur l’île. Après un face-à-face tendu devant la porte de sa maison, le préfet Jean-Christophe Bouvier avait refusé d’accéder à la demande du RPPRAC.

Atteinte à l’autorité de l’Etat

«C’est le procès de l’atteinte à l’autorité de l’Etat, a indiqué la procureure en débutant son réquisitoire. Il s’agit d’une rébellion en réunion parfaitement constituée.» Murielle Renar-Legrand, bâtonnière du barreau de Fort-de-France et avocate de quatre policiers qui se sont constitués parties civiles, a, avant elle, dénoncé dans sa plaidoirie les «dérives insupportables» d’un mouvement pourtant «parfaitement légitime». «M. Petitot n’est pas un Robin des bois, il n’est pas Nelson Mandela. C’est juste un prévenu de droit commun», a-t-elle affirmé.

Sa consœur Mélanie Luce, en défense, a asséné en réponse que «la justice doit servir à autre chose qu’à museler la contestation sociale». «On veut incarcérer le symbole de la vie chère, avait soutenu le prévenu la veille depuis son box. Tout est fait pour éteindre le vrai combat.» «Je ne reconnais pas être auteur de violation de domicile. Je suis arrivé, la barrière était ouverte», a-t-il par ailleurs soutenu devant le tribunal. Le visionnage durant l’audience d’images de la caméra de surveillance et de plusieurs vidéos de l’incident a permis de confirmer ce point.

Dans un dossier différent, Rodrigue Petitot avait été condamné en décembre à dix mois de prison ferme aménageable pour intimidation à l’encontre de maires de Martinique. Des émeutes ont éclaté à plusieurs reprises ces derniers mois en Martinique, île des Antilles où les denrées alimentaires sont en moyenne 40 % plus chères que dans l’Hexagone, selon l’Insee.