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Justice

Féminicide : trois ans après la mort d’Aurélie Vaquier, son compagnon jugé pour meurtre

Samire L., 41 ans, sera jugé à partir de ce mardi 9 janvier devant les assises de l’Hérault pour le meurtre de sa compagne, dont le corps avait été retrouvé sous une dalle de béton au domicile du couple à Bédarieux.
A Bédarieux (Hérault), le 15 avril 2021, devant le domicile d'Aurélie Vaquier. (David Richard/Transit pour Libération)
publié le 9 janvier 2024 à 9h00

En 2021, Aurélie Vaquier, 38 ans, était retrouvée sous une dalle de béton au domicile conjugal, à Bédarieux (Hérault). Selon son compagnon, c’est un inconnu qui l’aurait tuée, avant de fabriquer ce sarcophage improvisé. Une version entachée d’incohérences qui sera décortiquée devant les assises de l’Hérault, à Montpellier. Jugé à partir de ce mardi 9 janvier et jusqu’au 17 janvier, Samire L., 41 ans, est en détention préventive depuis la découverte du corps, le 7 avril 2021.

L’accusé signale la disparition de sa compagne le 23 février 2021. Il dit alors ne pas avoir de ses nouvelles depuis près d’un mois. Selon lui, elle aurait quitté le domicile conjugal avec uniquement son téléphone portable et quelques vêtements. Puis elle aurait envoyé un message étrange, évoquant son désir de «se reposer quelques jours chez [un] pote à la campagne» pour «souffler, lire et écrire».

Son cadavre a finalement été découvert au domicile du couple, un mois et demi après le signalement de sa disparition, sous une dalle de béton coulée sous une estrade en bois couverte d’un empilement d’objets. Selon l’hypothèse «privilégiée» par les médecins légistes, Aurélie Vaquier aurait été étranglée.

Comportement «inadapté et incohérent»

Agé de 39 ans à l’époque, en instance de divorce et père de deux enfants, Samire L. s’est installé dans l’Hérault pendant l’été 2020, après avoir vécu dans l’Ain. Il rencontre Aurélie, qui devient sa nouvelle compagne. Ils emménagent rapidement ensemble à Bédarieux, commune de 6 000 habitants du Haut-Languedoc. Ils projetaient d’y créer une boutique de produits cosmétiques biologiques, ou un restaurant végan.

Ils avaient pour projet de créer un point de vente de produits cosmétiques biologiques fabriqués par la jeune femme, mais le couple enchaînait les disputes depuis plusieurs semaines.

«Tout au long de l’instruction, le mis en examen a affirmé n’être impliqué en rien dans le décès […] malgré de nombreux éléments à charge», a souligné l’an dernier le procureur de Béziers, Raphaël Balland. L’instruction a ainsi mis en avant un comportement jugé «inadapté et incohérent» de l’accusé, selon l’ordonnance de mise en accusation consultée par Libération. Et notamment ce départ «précipité» de Bédarieux le 28 janvier 2021, pour se rendre en région lyonnaise et récupérer son fils et un neveu.

De retour au domicile conjugal une semaine plus tard, le 6 février, il n’avait pas signalé la disparition d’Aurélie Vaquier, effectuant en revanche des travaux dans la maison. Il avait continué à utiliser la carte bancaire de sa compagne, tout en tenant des propos désobligeants à son égard et en fréquentant assidûment des sites de rencontres.

Les enquêteurs estiment par ailleurs que le message, étonnamment truffé de fautes d’orthographe, par lequel Aurélie Vaquier aurait fait part de son intention de quitter momentanément Bédarieux, le 28 janvier, n’a été écrit ni sur l’ordinateur du couple ni sur le portable de la jeune femme, retrouvé plusieurs mois plus tard caché derrière une plaque de plâtre, en juillet 2022, par le nouveau propriétaire de la maison.

L’accuse encourt la réclusion criminelle à perpétuité

Ils sont également persuadés que le cercueil de béton où la victime a été retrouvée a bien été réalisé par son compagnon. Un tel ouvrage aurait nécessité au moins «six heures de travail par un maçon qualifié non sujet à un état de panique ou de stress particulier», assurent-ils. De même les enquêteurs relèvent qu’il était «plus aisé» pour l’accusé de cacher le cadavre de sa victime à son domicile, la France étant alors soumise à un couvre-feu, face à la pandémie de Covid-19, qui rendait difficile d’évacuer un corps «en plein jour ou aux heures prohibées».

Réfutant cette version, Samire L. explique que sa compagne aurait été tuée durant son absence de Bédarieux, entre le 28 janvier et le 6 février. Et il n’aurait découvert cette dalle, sous l’estrade, que le 7 avril, lors de la découverte du corps.

Evalué par les psychiatres et psychologues comme un homme «impulsif», à la «personnalité caméléon» et «borderline», l’accusé présentait «une toute-puissance infantile» doublée «d’une immaturité psychoaffective». Mais cela n’aurait pas aboli ou altéré son discernement lors du meurtre. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.