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Libération
Tout répressif

Gérald Darmanin détaille les contours de sa prison bunker pour narcotrafiquants

Dans une interview au «Figaro», le ministre de la Justice annonce que sa «prison de haute sécurité» pour les trafiquants de drogue condamnés ou en détention provisoire jugés les plus dangereux devrait être opérationnelle en juillet. Les détenus y seront soumis à un «nouveau régime carcéral d’isolement» visant à les «couper du monde».
Gérald Darmanin lors des questions au gouvernement du 19 février. (Stéphane De Sakutin /AFP)
publié le 20 février 2025 à 20h32

On en sait plus sur le régime de détention draconien voulu par Gérald Darmanin pour les narcotrafiquants. Dans une interview au Figaro publiée ce jeudi 20 février, le ministre de la Justice a détaillé les contours de sa «première prison de haute sécurité» qui se veut inspirée d’un dispositif en vigueur en Italie.

Le premier établissement de ce genre, dont on ignore la localisation, devrait être opérationnel le 31 juillet, selon le ministre, qui précise que les «premiers transferts» de détenus auront lieu «dès la fin mars». Les narcotrafiquants qui y seront détenus seront soumis à un «nouveau régime carcéral d’isolement» visant à les «couper du monde». La visioconférence y sera généralisée «afin d’éviter les sorties», tandis que la fouille sera rendue «systématique après les parloirs», a notamment détaillé celui qui fut ministre de l’Intérieur de juillet 2020 à septembre 2024.

Particulièrement dans son viseur, l’accès au téléphone, qui sera drastiquement réduit : «Les détenus ne pourront plus communiquer que trois fois deux heures par semaine», selon le ministre, qui précise aussi que le régime prévoira aussi une «suppression de l’accès aux unités de vie familiale». Les détenus, condamnés définitivement ou en détention provisoire, y seront placés pour une durée de «quatre ans renouvelables, par décision ministérielle».

«600 à 700» détenus potentiellement concernés

Ce modèle d’établissements annoncés comme «totalement inviolables» devrait ensuite être dupliqué. «D’ici 2027, je souhaite la création de quatre à cinq établissements du même genre», précise Gérald Darmanin au Figaro, évaluant entre «600 à 700» personnes le nombre de détenus potentiellement concernés par ce régime de détention. Une «formation particulière des agents pénitentiaires» sera mise en place afin de «mieux les équiper, mieux les former, mieux les rémunérer», annonce également le ministre.

Ce nouveau régime carcéral «fera l’objet d’amendements gouvernementaux» dans le cadre de la loi narcotrafic, adoptée au Sénat le 4 février et examinée à l’Assemblée nationale le 17 mars, indique Gérald Darmanin. Une annonce à l’encontre de ses propos de ces dernières semaines : le ministre avait répété ne pas «avoir besoin d’un texte législatif» pour mener à bien son projet. «Je n’ai pas besoin de loi pour ça, j’ai besoin de la volonté et on va en avoir, un petit peu d’argent et j’en aurai», avait-il ainsi déclaré le 12 janvier.

Un régime italien dénoncé par les ONG

Gérald Darmanin dit vouloir s’inspirer du modèle italien. Début février, dans le cadre de ce projet, le ministre de la Justice s’était rendu à Rome pour une visite d’étude du régime carcéral transalpin réservé aux détenus les plus dangereux. Il avait notamment visité le centre pénitentiaire romain de Rebibbia, où une cinquantaine de détenus affiliés au crime organisé sont soumis à un régime d’isolement et de surveillance particulièrement strict, régulièrement dénoncé par les ONG.

Depuis sa nomination le 23 décembre place Vendôme, le ministre de la Justice a répété vouloir faire de la lutte contre le narcotrafic une de ses priorités. Le garde des Sceaux avait annoncé vouloir placer à l’isolement les «100 des plus grands narcotrafiquants écroués», «comme on le fait pour les terroristes», dans une interview au Parisien fin décembre, avant de préciser, le 12 janvier sur LCI, vouloir ouvrir un établissement ultra-sécurisé d’ici à six mois. La gestion de ces détenus est devenue un enjeu politique depuis l’évasion meurtrière de Mohamed Amra, le 14 mai, soupçonné d’avoir commandité un meurtre lié au narcotrafic à Marseille.

Au Figaro, Gérald Darmanin a également répété vouloir créer des «prisons à taille humaine pour les courtes peines», tout en voulant «doubler les places de semi-liberté», et développer la «détention à domicile» et le travail d’intérêt général.