Menu
Libération
Justice

«Grosse pute» : relaxe pour le policier ayant injurié une femme qui portait plainte pour agression sexuelle

Violences sexuellesdossier
Dans un message vocal laissé involontairement, un policier insultait une femme qui portait plainte pour agression sexuelle. Ce jeudi 25 janvier, le tribunal de police de Paris l’a relaxé.
Suspendu pendant plus de quatre mois, le policier a finalement été sanctionné d’une mutation professionnelle, puis en juin 2023 d’une interdiction de contact avec les victimes et les mis en cause. (Edouard Richard/Hans Lucas. AFP)
publié le 25 janvier 2024 à 17h05

«Grosse pute» ne serait pas une insulte sexiste pour la justice, en tout cas pas dans ce contexte. Un policier ayant employé ces termes pour injurier une femme qui portait plainte pour agression sexuelle, dans un message vocal qu’il lui avait laissé par erreur, a été relaxé ce jeudi 25 janvier par le tribunal de police de Paris, suscitant la colère de la victime. «La présidente du tribunal de police a considéré que le fait, pour un policier, de dire à une femme agressée sexuellement ‘grosse pute’, n’était pas une injure à caractère sexiste», dénonce l’avocat de la plaignante, Arié Alimi. «L’institution judiciaire continue à protéger les policiers. Ma cliente souhaite faire appel pour faire changer les mœurs judiciaires», a-t-il poursuivi.

Les faits remontent à février 2022 : la victime avait déposé une première plainte dans un commissariat parisien pour agression sexuelle en état d’ivresse. Un officier de police judiciaire lui avait alors laissé un message sur son répondeur pour qu’elle vienne compléter sa plainte. Croyant avoir raccroché, on l’entendait se plaindre du cas puis, après un silence de quelques secondes, ajouter : «C’est vraiment une pute. […] Putain, elle refuse la confront en plus la pute. Comme par hasard. En fait c’était juste pour lui casser les couilles, je suis sûr. […] Putain, grosse pute», avant de raccrocher correctement le combiné.

«J’ai dû supplier le ministre de ne pas me révoquer»

Ces injures étaient-elles prononcées à l’attention de ses collègues, ce qui aurait constitué une injure non publique en raison du sexe, ou pour lui-même, «comme lorsqu’on s’énerve contre un cycliste en voiture», ce qu’arguait le policier ? Lors de l’audience, début décembre, le parquet avait invité le tribunal à répondre à cette question «en son âme et conscience». Il avait suggéré que, dans le premier cas, le policier devait être condamné mais dispensé de peine, étant donné son parcours exemplaire, et que dans le second cas il devait être relaxé. La jeune femme n’avait alors pas caché sa déception, disant se sentir «écrabouillée».

Cette affaire avait suscité de nombreuses critiques sur la prise en charge par les forces de l’ordre des victimes de violences sexuelles. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait dans un premier temps estimé que le policier n’avait «plus sa place» dans la police. «J’ai dû supplier le ministre de ne pas me révoquer», avait expliqué le mis en cause au tribunal. Suspendu pendant plus de quatre mois, le policier a finalement été sanctionné d’une mutation professionnelle, puis en juin 2023 d’une interdiction de contact avec les victimes et les mis en cause. A l’audience, il s’était défendu d’être «sexiste ou misogyne» et s’était dit «vraiment désolé que la victime ait entendu ces malheureux propos».