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Justice

Guet-apens homophobes : les trois accusés condamnés à huit, sept et cinq ans de prison

La cour d’assises de Paris a rendu son jugement mardi 4 juin dans la soirée, dans l’affaire de deux «home-jackings» visant des homosexuels commis en région parisienne en 2022. Les peines vont plus loin que les réquisitions de l’avocat général. La circonstance aggravante en raison de l’orientation sexuelle des victimes été retenue.
Les trois hommes étaient jugés pour séquestration, extorsion et vol avec arme en bande organisée, le tout en raison de l’orientation sexuelle des victimes. (Riccardo Milani /Hans Lucas. AFP)
publié le 5 juin 2024 à 9h47

Le verdict est tombé. Les trois accusés dans l’affaire des guet-apens organisés en janvier 2022 contre deux professeurs homosexuels ont été condamnés mardi 4 juin dans la soirée par les jurés de la cour d’assises de Paris. Les deux auteurs des agressions, âgés de 18 et 19 ans au moment des faits, retourneront derrière les barreaux pour respectivement huit ans et sept ans, reconnus coupables de séquestration, de vol et d’extorsion en bande organisée en raison de l’orientation sexuelle des victimes des faits étaient passibles de la réclusion à perpétuité. La circonstance aggravante du mobile homophobe avait rythmé le procès. Le troisième homme jugé – à l’époque âgé de 21 ans et considéré comme leur complice pour leur avoir fournit un RIB écope pour sa part de cinq années de prison pour extorsion en bande organisée.

Les deux premières condamnations dépassent les réquisitions du procureur Jean-Christophe Muller, qui avait demandé lundi 3 avril sept et six ans d’emprisonnement. Il s’était également prononcé en faveur de la retenue de la circonstance aggravante. La peine du complice demeure néanmoins conforme à sa demande de 5 ans. Les deux principaux accusés avaient tout de suite après leur arrestation reconnu les faits, se défendant néanmoins au long des interrogatoires et du procès de toute homophobie. Après avoir dans un premier temps contesté avoir choisi les victimes en raison de leur orientation sexuelle, ils avaient reconnu qu’il leur semblait «plus facile» de commettre leurs actes sur «ces gens-là».

Armes, séquestration et «violence inouïe»

Les faits reprochés, survenus à deux jours d’intervalles en janvier 2022, ont suivi un scénario identique. Après avoir pris contact avec leur victime sur un site de rencontres homosexuelles, Guillaume N. arrivait à leur domicile armé, rapidement rejoint par Karim B. Le premier homme, séquestré pendant environ une heure par les deux accusés à la recherche d’argent et d’objets de valeur, avait reçu plusieurs coups. Il est finalement abandonné dans son appartement les mains et les pieds attachés.

Deux jours plus tard, les deux accusés réitèrent le scénario chez la seconde victime, dont la séquestration dure deux jours et demi. «Il est resté plusieurs heures nu, menotté dans le dos», a martelé à l’audience son avocate, Me Pauline Alexandre, quand l’avocate du premier, Me Élisabeth Aboucaya, a insisté sur la «violence inouïe» endurée par les deux hommes. Durant cette seconde séquestration, le troisième homme, Guy N., fournit à distance un RIB pour contraindre la victime à verser une somme de 20 000 euros.

Seul accusé à comparaître libre, son audition lundi matin a fait apparaître une dissension parmi les accusés. Si Guillaume N. et Karim B. ont reconnu l’ensemble des faits, Guy N. a fermement contesté devant la Cour d’assises avoir été au courant de la séquestration en cours, s’opposant aux affirmations de ses coaccusés. Me Jean-Baptiste Boué-Diacquenod, avocat de l’association Stop homophobie, qui s’est portée partie civile, a plaidé que les jurés n’étaient «pas ici pour savoir si les auteurs sont homophobes», mais les enjoignant à retenir la circonstance aggravante en insistant sur le fait que le choix des victimes par les accusés avait été guidé par leur orientation sexuelle. Lundi, il avait déclaré : «Il faut que cette affaire fasse évoluer la prise en charge de ce genre de dossier, et que la circonstance aggravante puisse être retenue même en l’absence de haine homophobe.»