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«Il m’a dit : t’inquiète pas, ça fait longtemps qu’on fait comme ça» : le profil de Joan Kawai, condamné au procès des viols de Mazan

Procès des viols de Mazandossier
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Jugés depuis trois mois à la cour criminelle départementale du Vaucluse, Dominique Pelicot et 50 hommes sont accusés d’avoir violé son ex-épouse sous soumission chimique. Parmi eux, Joan Kawai, qui dit ne pas avoir eu «la notion de consentement».
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 11 décembre 2024 à 21h22

Pendant plus de trois mois, Libération a suivi le procès des viols de Mazan au tribunal judiciaire d’Avignon. Le principal accusé, Dominique Pelicot, est l’architecte d’un système tentaculaire de violences sexuelles sous soumission chimique, dans le cadre duquel il a violé et fait violer celle qui était alors sa femme, Gisèle Pelicot, par des inconnus recrutés en ligne. A ses côtés, 50 coaccusés se sont succédé à la barre de la cour criminelle départementale du Vaucluse. Libération dresse les profils de ces hommes, dont la quasi totalité étaient poursuivis pour «viol aggravé», avant le verdict rendu ce jeudi 19 décembre.

Nom : Joan Kawai

Age : 27 ans.

Profession : Militaire.

Faits : Deux venues, en 2019 et 2020.

Statut : Détenu depuis 2021.

Peine requise : 15 ans de réclusion criminelle.

Verdict : 10 ans de réclusion criminelle.

La première fois que Joan Kawai s’est rendu au domicile des Pelicot, c’était le jour de la naissance de sa fille. Il n’était pas au courant de cet accouchement prématuré – son ex-compagne dont il s’était séparé quelques mois plus tôt est venue plaider à la barre. Sa deuxième visite à Mazan a lieu un mois plus tard. A l’époque des faits, le jeune homme de 22 ans – c’est le plus jeune des accusés – vivait à Carpentras (Vaucluse) chez son grand frère, où ce natif de Guyane a habité quelques années auparavant avant de s’engager dans l’armée. Il restera militaire jusqu’à son interpellation en 2021 dans sa caserne près de Dijon.

En garde à vue, il raconte d’abord aux enquêteurs avoir discuté avec la victime avant d’avoir une relation consentie. Ce n’est que confronté aux images qu’il admettra que Gisèle Pelicot était inconsciente. «A cette époque, je n’avais même pas la notion de consentement», s’est-il justifié devant la cour, estimant comme d’autres, avoir été manipulé par Dominique Pelicot : «Il m’a beaucoup rassuré, il m’a dit : t’inquiète pas, ça fait longtemps qu’on fait comme ça.» «Pour moi, il s’est fait douiller», avait assuré son ex-compagne à la barre avant lui. Consommateur chronique d’alcool et de cannabis, «dépressif» selon les enquêteurs, impulsif et solitaire, ses compagnes et l’armée l’ont aidé à affronter des «angoisses potentiellement envahissantes», avait décrypté la psychologue qui l’a rencontrée durant l’instruction. Lui veut bien reconnaître les faits, mais pas l’intentionnalité : «Je n’y allais pas pour violer une dame.»