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Justice

Isolement des narcotrafiquants : les quartiers de haute sécurité dans les prisons sont «légaux», juge le Conseil d’Etat

Dans une décision rendue ce mardi 28 octobre, le juge administratif estime qu’ils apportent «les garanties nécessaires» au «respect des droits des détenus». Gérald Darmanin s’en est félicité.

Gerald Darmanin à la prison de Vendin-le-Vieil le 25 juillet 2025. ( Joseph Grosjean/AFP)
Publié le 28/10/2025 à 18h19, mis à jour le 28/10/2025 à 18h19

Ils sont voués à se multiplier. Le Conseil d’Etat a juge légal le décret créant les quartiers de haute sécurité pour y placer en détention des narcotrafiquants, comme celui qui a ouvert à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais). Les quartiers de lutte contre la criminalité organisée (QLCO) apportent «les garanties nécessaires», que ce soit pour la procédure conduisant à la décision d’y placer des détenus ou «pour le respect des droits des détenus», a fait valoir le Conseil d’Etat ce mardi 28 octobre, saisi par l’Association des avocats pénalistes.

L’objectif de ces structures ultra-sécurisées est de placer les détenus totalement à l’isolement, selon un régime de détention très strict inspiré de la lutte antimafia en Italie, et de les empêcher de communiquer avec l’extérieur notamment pour continuer à gérer leurs trafics.

Le premier de ces quartiers a ouvert cet été à Vendin-le-Vieil, à l’initiative du ministre de la Justice Gérald Darmanin, où est incarcéré Mohamed Amra, dont l’évasion sanglante en mai 2024 dans l’Eure a coûté la vie à deux agents pénitentiaires. Près de 90 détenus ont rejoint le QLCO de cette prison du Pas-de-Calais entre fin juillet et début août. Un deuxième doit commencer à fonctionner à Condé-sur-Sarthe (Orne) dans les prochaines semaines.

Selon le Conseil d’Etat, «les motifs de placement» dans ces quartiers «sont définis par la loi avec une précision suffisante et les décisions de placement sont soumises à une procédure contradictoire préalable». En outre, «les détenus concernés bénéficient des mêmes droits que les autres, sous réserve des aménagements nécessaires pour prévenir tout lien avec des réseaux criminels (fouilles intégrales, parloirs séparés, téléphonie restreinte)», poursuit la plus haute juridiction administrative.

Quatre nouveaux centres

Mi-octobre, Darmanin avait annoncé l’ouverture de quatre nouveaux centres à Valence, Aix-en-Provence et Réau (Seine-et-Marne) ainsi qu’au futur centre pénitentiaire de Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane, provoquant l’ire d’élus locaux, qui y voient un «retour du bagne». A terme, l’objectif est de placer dans ces quartiers d’ici à «quelques mois», «500 de ces 700 criminels» considérés comme très dangereux par les autorités pénitentiaires, avait déclaré le ministre de la Justice.

«En respectant totalement l’État de droit, après un vote massif du Parlement sur ma proposition, une validation du Conseil Constitutionnel et désormais par le Conseil d’État, notre politique carcérale concernant la criminalité organisée est changée radicalement», s’est félicité ce mardi Gérald Darmanin sur X, qui y voit «un grand pas en avant […] pour restaurer l’autorité de l’Etat».

Le décret est loin de faire l’unanimité. «Ce régime n’est pas sans rappeler celui des quartiers de sécurité renforcée, supprimé par une circulaire de Robert Badinter du 26 février 1982, ce dernier considérant qu’un tel traitement est inhumain et broie les hommes», rappelait dans Libé l’avocat Robin Binsard en mars dernier. En parallèle au recours de l’Association des avocats pénalistes, plusieurs dizaines de détenus ont contesté sans succès leur transfert et leurs conditions de détention à Vendin-le-Vieil devant la justice administrative et judiciaire.