Dans une grande maison du Loiret vit un homme de 88 ans au passé prestigieux, autour duquel tous se déchirent. Il avait un collier, grigri longtemps arboré dépoitraillé puis posé sur sa table de chevet, où étaient passées une médaille appartenant à son père, une croix, une dent de lait… toute son identité. Il a disparu. On l’a retrouvé au fond d’un bocal dans la salle de bains. L’homme n’a plus qu’un filet de voix, rechigne à mettre son sonotone, regarde peu la télé. Assis dans sa cuisine, son berger malinois à ses pieds, il feuillette les gros titres des journaux, regarde par la fenêtre, vit dans ses pensées.
En quelques années il s’est fait opérer de la hanche, a traversé deux AVC, deux infections pulmonaires et était encore récemment traité contre une longue maladie. Tandis que la maison bruisse d’informations contradictoires au sujet de cette cessation de soins et que des médecins se succèdent à son chevet pour réaliser diverses expertises, il ingurgite une vingtaine de cachets quotidiens. Ça le gonfle, comme il dit. Il le décrivait déjà dans une interview à l’hebdo suisse l’Illustré en 2019 : «Vieillir est un naufrage. Comme une voiture de 400 000 bornes, il manque un peu d’eau, d’huile, tu as les pneus dégonflés… On ne peut rien y faire. Tu perds la tronche, la vue. Tu te lèves et, merde, tu as mal à la cheville. Tu te cognes. Vieillir, c’est chiant !» La vie