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Le Louvre reste fermé ce lundi, le ministère de l’Intérieur demande aux préfets d’évaluer la sécurité autour des musées

«D’importantes failles» de sécurité au Louvre sont pointées dans un rapport de la Cour des comptes révélé ce lundi. Le ministère de l’Intérieur a par ailleurs donné l’ordre aux préfets de «renforcer les mesures de sécurité» des établissements culturels, à l’issue d’une réunion dans la matinée.

La fenêtre brisée par les voleurs au Louvre, dimanche 19 octobre 2025. (Dimitar Dilkoff/AFP)
ParCoppélia Piccolo
Emilia Spada
Lucas Biosca
Chef de service - Actu
AFP
Publié le 20/10/2025 à 9h41, mis à jour le 20/10/2025 à 10h54

Environ 24 heures après le «casse du siècle», les portes du Louvre restent fermées ce lundi 20 octobre, a appris Libération de la direction du musée. L’annonce a été transmise vers 10 heures aux nombreux visiteurs présents sur place, surpris, qui ont mis du temps à évacuer les abords du musée parisien. Une réouverture mercredi – mardi étant le jour de fermeture hebdomadaire – ne peut pas encore être garantie à ce stade, précise la direction de l’établissement.

En parallèle, la polémique ne cesse d’enfler sur la sécurisation du premier musée du monde, après le vol dimanche matin de huit bijoux «d’une valeur inestimable». Au micro de France Inter, le ministre de la Justice a reconnu ce lundi matin la responsabilité des pouvoirs publics. «On ne peut pas faire la sécurisation totale de tous les lieux mais ce qui est sûr, c’est que nous avons failli», a admis Gérald Darmanin. «Le fait que les vitres n’aient pas été sécurisées, c’est une question qu’on peut se poser. Le fait qu’il y ait un monte-charge sur la voie publique, c’est une question qu’on peut se poser», a développé le garde des Sceaux.

Ce sujet brûlant a été au menu d’une réunion ce lundi dans la matinée à Beauvau, entre le ministre de l’Intérieur Laurent Nuñez, la ministre de la Culture Rachida Dati et les représentants des forces de l’ordre. Ces discussions ont permis, dans un premier temps, «d’identifier ce qui a fonctionné et qui a dysfonctionné» dimanche, selon le ministère de l’Intérieur. Il va en outre être demandé à l’ensemble des préfets de France «d’organiser sans délai un point sur l’existence des dispositifs déjà déployés autour des établissements culturels, et renforcer les mesures de sécurité le cas échéant», d’après la même source

France Info révèle par ailleurs un rapport à paraître de la Cour des comptes, qui pointe les défaillances de sécurité de l’établissement, avec des retards «considérables» et «persistants» dans la mise aux normes de ses installations techniques. Ce document, basé sur des observations menées entre 2019 et 2024 et dont la publication est prévue pour début novembre, révèle par exemple qu’un tiers des salles ne dispose d’aucune caméra de surveillance dans le secteur Denon, qui abrite notamment la Galerie d’Apollon, cambriolée dimanche, mais aussi la Joconde.

Malgré un budget annuel de fonctionnement de 323 millions d’euros, «les montants engagés sont de faible ampleur au regard des besoins estimés», soulignent les sages de la rue Cambon dans leur rapport. En cinq ans, seules 138 caméras supplémentaires ont été installées dans le musée. Dans le secteur Richelieu, les trois quarts des salles sont dépourvus d’équipement de vidéosurveillance, et à peine plus d’un tiers des salles sur la totalité du musée du Louvre disposent d’au moins une caméra, note la Cour des comptes.

S’il faut rappeler que la vidéosurveillance ne permet pas d’éviter qu’un fait advienne, seulement de le filmer, la Cour des comptes déplore plus largement un manque de volonté de la direction du musée, évoquant «une tendance à faire du lancement des travaux une variable d’ajustement budgétaire». Les sages estiment par ailleurs que «sous l’effet d’une fréquentation croissante, le cycle d’obsolescence des équipements techniques du musée s’est accéléré de façon nettement plus importante que le rythme des investissements engagés par l’établissement pour y remédier».

Les conclusions dressées par l’institution de la rue Cambon sont claires : «l’essentiel des études préalables (aux travaux nécessaires) a été réalisé au cours des dernières années», mais leur «mise en œuvre opérationnelle apparaît inégale et d’une façon générale très limitée». A titre d’exemple, en 2024, la mise aux normes du système de protection incendie entamée en 2010, n’était «n’est toujours pas achevée».

Premières alertes en juin

Un constat partagé par les agents du musée, qui s’étaient mobilisés pendant quelques heures de grève à la mi-juin, pour dénoncer des problèmes de «sous-effectif» les empêchant de mener à bien leurs missions. Selon certaines organisations syndicales, la sécurisation du musée a été mise à mal par des réductions de personnels au cours des récentes années, alors même que la fréquentation du musée a explosé.

C’est d’ailleurs pour cette raison que le Louvre est resté fermé ce lundi. «Une ouverture retardée et certaines salles exceptionnellement fermées» avait été évoquée dans un premier temps. Mais une réunion entre les salariés a finalement été programmée à 11 heures. «Les personnes ayant réservé pour une visite dans la journée seront remboursées», peut-on maintenant lire sur le site de l’établissement.

Sous couvert de l’anonymat, une source syndicale affirme auprès de l’AFP que 200 équivalents temps plein sur 2 000 ont été supprimés au musée au cours des quinze dernières années, notamment sur des postes de sécurité.

La sécurisation du musée devrait à nouveau être au cœur des débats autour du vaste projet d’extension du musée parisien intitulé «Louvre Nouvelle Renaissance», annoncé fin janvier par Emmanuel Macron et prévu pour 2031. Le chef de l’Etat a d’ailleurs rappelé dimanche soir que ce projet, évalué à environ 700 à 800 millions d’euros sur une dizaine d’années, «prévoit un renforcement de la sécurité. Il sera le garant de la préservation et de la protection de ce qui constitue notre mémoire et notre culture».

«Des mesures de sécurisation sont intégrées dans le nouveau grand projet du musée du Louvre», a assuré dimanche de son côté la ministre de la Culture, Rachida Dati, évoquant un nouveau «schéma directeur de la sécurité».

Le précédent vol ayant frappé le plus grand musée du monde remonte à 1998. Une toile du maître français Camille Corot y avait été dérobée en plein jour et n’a jamais été retrouvée depuis. «C’est un musée fragile», avait alors déclaré son président de l’époque Pierre Rosenberg ; près de trente ans plus tard, le constat semble encore d’actualité.

Mise à jour à 14 h 45, avec l’ajout de la réunion entre la direction du Louvre et les salariés.