La veille, en se couchant, Michel Gosse a changé d’avis. Tant pis pour la journaliste de Libé, il n’irait pas. C’était trop difficile de reparler de tout ça. Il ne l’a avoué que bien plus tard car ce matin de juillet, il était pile à l’heure dans le bar PMU près de la gare de Bordeaux, le visage fatigué et le corps à la peine dans son vieux survêtement. Sans même attendre une question, sans même goûter à son demi de blonde, il s’est mis à dérouler très vite. Voilà, il avait 4 ans quand sa mère l’a confié à la Ddass, enfin, l’a «jeté à la poubelle». Par la suite, son père, revenu de la guerre d’Algérie, l’a récupéré pendant six mois mais il est mort un matin de juin 1967 à l’hôpital. «Je crois que c’était un cancer de la gorge», évoque Michel Gosse. A 11 ans, sans famille, il a été placé aux Orphelins d’Auteuil, une vénérable fondation créée par un abbé pour venir en aide aux enfants défavorisés. Il est entré dans une grande bâtisse rue de la Fontaine à Paris. Et toute sa vie a foutu le camp.
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La patronne du rade somnole. Le flipper clignote. Et Michel Gosse pleure sans pouvoir s’arrêter. En mars 2023, le père Jean-Pascal L. de la congrégation du Saint-Esprit est venu le voir à Bordeaux dans le cadre de