De la prison ferme pour «le Squale». L’ancien patron du renseignement intérieur, accusé d’avoir mobilisé les moyens de l’Etat au service du géant du luxe LVMH, a été condamné à quatre ans de prison dont deux avec sursis, vendredi 7 mars. Il avait comparu en novembre, aux côtés de neuf autres prévenus, dont un préfet, un ancien magistrat, ainsi que des policiers et consultants en intelligence économique.
Mission patriotisme économique
L’ancien haut fonctionnaire était jugé pour onze infractions, allant du trafic d’influence passif au détournement de fonds publics, en passant par la compromission du secret de la défense nationale, le faux en écriture publique ou encore la complicité de violation du secret professionnel. En somme, Squarcini est accusé d’avoir usé de ses connexions dans le monde de la police au profit d’intérêts particuliers, et notamment ceux du milliardaire et patron de LVMH Bernard Arnault.
A la barre, le maître espion a fait valoir les missions qui étaient les siennes au sein de la direction créée sous Nicolas Sarkozy, en particulier la protection du patrimoine économique. C’est à ce titre qu’il avait dépêché une dizaine d’agents pour aider à l’identification d’un «corbeau» souhaitant faire chanter Bernard Arnault au moyen de photos compromettantes. Faisant valoir un risque d’ingérence étrangère, l’homme avait également missionné un ancien commissaire divisionnaire pour finaliser l’affaire, le corbeau s’avérant être un ancien chauffeur de LVMH.
L’affaire avait également un tour plus médiatique avec les soupçons d’espionnage des équipes de Fakir, le journal dirigé par François Ruffin, alors en plein tournage du film Merci patron ! Celui qui est aujourd’hui député de la Somme avait été mis sous surveillance entre 2013 et 2016 par Bernard Squarcini, tout frais retraité et au service de Bernard Arnault, alors qu’il prévoyait d’interpeller ce dernier lors des assemblées générales du groupe de luxe.
LVMH s’épargne des poursuites
A la barre, le milliardaire avait admis, tout en jurant n’être au courant de «rien» : «Je pensais que Monsieur Ruffin mettrait un peu de bazar dans l’assemblée, ça me perturbait un peu.» Pour éviter les poursuites, LVMH avait conclu une convention judiciaire d’intérêt public de 10 millions d’euros lui permettant d’éviter les poursuites.
Le parquet avait requis quatre ans d’emprisonnement avec sursis et 300 000 euros d’amende contre Bernard Squarcini. Outre les deux ans de prison ferme, l’homme de 69 ans a écopé de 200 000 d’amende et de cinq ans d’interdiction professionnelle avec interdiction provisoire, qui s’appliquera de toute façon. Son avocate Marie-Alix Canu-Bernard a annoncé son intention de faire appel.