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Sécurité

Macron giflé à Tain-l’Hermitage : le risque du bain de foule

Emmanuel Macron giflé lors d'un déplacement à Tain-l’Hermitagedossier
La gifle reçue par le président de la République ce mardi dans la Drôme rappelle que, malgré d’importants services de sécurité, les bains de foule, réels marqueurs politiques, peuvent toujours déraper.
Emmanuel Macron face à des habitants de Martel (Lot), jeudi. (Lionel Bonaventure/AFP)
publié le 8 juin 2021 à 17h38

Il est tout de suite reparti au combat. Chemise blanche, cravate et masque noirs, le président de la République reçoit cette gifle et plonge en arrière, sûrement plus surpris par le geste que traumatisé. Après de longues secondes de confusion, les effectifs de sécurité s’assurant que la menace ne soit pas plus sérieuse, on retrouve Emmanuel Macron contre la barrière qui le sépare de la foule, resserrant des paluches comme si rien ne s’était passé. L’Elysée a tout de suite cherché à minimiser l’incident, parlant plutôt d’une «tentative de gifle». «Macron voulait être au contact des Français, à portée de gifle, à portée de baffe», a justifié un conseiller de l’exécutif à Libération, qui reconnaît que «le risque zéro n’existe pas. On ne pourra jamais éviter qu’un dingue s’en prenne au Président».

Les bains de foule restent des grands classiques des campagnes électorales. Les candidats ou élus à l’aise dans cet exercice se voient ainsi qualifiés de «proches des gens», de «combattants» prêts à aller sentir le peuple là où il est, en l’occurrence au sens propre. Au contraire, celles et ceux qui rechignent à un contact physique ou verbal un peu trop proche peuvent traîner une image de personnage hautain, impropre à comprendre la population.

Il n’en reste que ces événements représentent de vrais casse-têtes pour des groupes de sécurité entraînés à ne jamais être dépassés, conscients aussi que l’exercice présente des risques. «Une gifle, c’est imparable !» assure même un ancien membre de la sécurité de plusieurs présidents. Pour ce professionnel, il n’y a eu aucune erreur de la part du service de sécurité d’Emmanuel Macron. «Vous pouvez imaginer ce que vous voulez dans la main de la personne en face du Président, sur le coup, on ne peut rien faire.» Seule solution alors, un filtrage des personnes en amont et l’organisation d’un «faux bain de foule», pour s’assurer que seuls des sympathisants seront présents. «Cela arrive régulièrement, mais si vous l’apprenez, vous serez les premiers à dénoncer les bains de foule aseptisés», s’amuse le policier.

«Dans le cœur de la bête»

«On imagine tout à fait que plus les périodes d’élections se rapprochent, plus les dispositifs de sécurité sont importants, présume quant à lui le sociologue Mathieu Zagrodzki. Mais les forces de l’ordre demeurent dépendantes de la personnalité des présidents, qui restent les derniers décideurs. Et l’on connaît le caractère d’Emmanuel Macron, très tactile, qui aime se prendre la tête avec les gens.»

On se souviendra de la phrase d’Emmanuel Macron candidat à l’élection présidentielle de 2017, voyant sa rivale Marine Le Pen aller à la rencontre des salariés de Whirlpool à Amiens. Contre l’avis de son équipe de sécurité, le futur président de la République décide d’aller au contact plutôt que de rester enfermé dans des bureaux avec les syndicats. «Les mecs de la sécurité, ce n’est pas eux qu’il faut écouter. Je ne serai jamais en sécurité, parce que le pays est comme ça aujourd’hui. Donc il faut prendre le risque, il faut aller dans le cœur de la bête à chaque fois. […] Parce que si vous écoutez les mecs de la sécurité, vous finissez comme Hollande : peut-être que vous êtes en sécurité, mais vous êtes mort.»