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Justice

Meurtre de Lola : la piste d’un différend avec la mère évoquée par la principale suspecte

Meurtre de Lola à Parisdossier
Mise en examen lundi 17 octobre, notamment pour «meurtre sur mineure de moins de 15 ans», Dahbia B. a donné sa version des faits aux enquêteurs dans un discours fluctuant. Elle évoque un différend futile avec la mère de Lola comme origine de l’agression de la jeune fille.
Des personnes se recueillaient ce lundi devant la résidence où vivait Lola, dans le XIXe arrondissement de Paris. (Stringer /AFP)
publié le 18 octobre 2022 à 13h04
(mis à jour le 18 octobre 2022 à 16h07)

Le profil de la suspecte se précise mais l’histoire reste floue. Dahbia B. a présenté sa version des faits aux enquêteurs à la suite de sa mise en examen, lundi 17 octobre, pour «meurtre sur mineure de moins de 15 ans», en lien avec un viol commis avec actes de torture et de barbarie et recel de cadavre. Selon des informations de BFMTV, la principale suspecte, âgée de 24 ans, a évoqué un mobile possible pour le meurtre de la jeune Lola, 12 ans, retrouvée dans la soirée du vendredi 14 octobre dans une malle en plastique.

«Entre reconnaissance et contestation des faits»

La suspecte, de nationalité algérienne, a expliqué aux enquêteurs avoir été hébergée temporairement par sa sœur, qui habitait dans la même résidence que Lola et sa famille, dans le XIXe arrondissement de Paris. N’ayant pas accès aux lieux, la suspecte aurait demandé un pass à la gardienne de l’immeuble, la mère de Lola, qui aurait refusé. Ce vendredi, en croisant Lola, elle aurait confondu la jeune fille avec sa mère et s’en serait alors prise à elle. Une information qui reste à confirmer, tant le discours de la principale suspecte paraît décousu. Dans un communiqué, la procureure de la République de Paris évoque des «déclarations fluctuantes […] oscillant entre reconnaissance et contestation des faits». Depuis, la suspecte a été placée à l’isolement au centre pénitentiaire de Fresnes. Sa sœur aînée, placée un temps en garde à vue, la décrit comme «difficilement insérée» et a raconté aux enquêteurs que Dahbia B. a eu «des réveils nocturnes le mois passé au cours duquel (elle) tenait des propos incohérents».

Par ailleurs, ce mardi matin sur RTL, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a confirmé que «la suspecte n’est pas connue des services de police». «Elle est arrivée régulièrement en tant qu’étudiante sur le territoire national. Il y a à peine un mois qu’elle a une obligation de quitter le territoire, donc les choses se sont faites dans des conditions qui sont malheureusement non prévisibles, d’autant plus que cette personne est vraisemblablement elle-même connue comme victime de violences conjugales.» Des faits qui, selon une source judiciaire, remontent à 2018, deux ans après son arrivée en France.

Le 21 août dernier, Dahbia B. avait été interpellée dans un aéroport français pour défaut de titre de séjour. Une obligation de quitter le territoire français (OQTF) lui avait alors été délivrée automatiquement. Mais comme elle n’avait aucun antécédent judiciaire et qu’elle n’était connue de la police qu’en tant que victime, l’OQTF avait été délivrée avec un délai de retour de 30 jours dans son pays.

Asphyxie

L’affaire, atroce, émeut depuis maintenant quatre jours. Vendredi, peu après 23 h 15, un homme de 42 ans découvrait le corps de Lola dans une caisse en plastique à roulettes déposée dans les parties communes de l’immeuble de la famille, dans le nord de la capitale. L’autopsie a révélé que la jeune fille est morte suite à une «défaillance cardiorespiratoire avec manifestation asphyxique et signe de compression cervicale». De multiples lésions ont été constatées au visage, au dos et de larges entailles au niveau du cou qui, selon le médecin légiste, ne sont pas la cause du décès. Les chiffres 1 et 0 ont été inscrits en rouge sur les pieds de Lola, sans que l’on ne puisse interpréter une quelconque signification pour le moment.

Dès le lendemain, six personnes étaient placées en garde à vue, dont une femme, interpellée le matin à Bois-Colombes (Hauts-de-Seine). A ce jour, elle est la principale suspecte du meurtre de Lola. Dahbia B., présenterait de «potentiels troubles psychiatriques». Une information qui devra être confirmée par l’expertise qui doit avoir lieu prochainement. A ce propos, l’avocat de la suspecte a assuré, lundi soir, que «l’irresponsabilité pénale qui va être soulevée au cours de l’instruction est une procédure habituelle en matière criminelle» et qu’«il n’y a pas lieu d’en déduire, en l’état, quoi que ce soit». Selon plusieurs médias, la suspecte aurait donné une multitude de détails morbides sur les faits sans qu’il ne soit possible pour le moment de les vérifier. Elle serait ensuite revenue sur ses propos, expliquant «avoir raconté un rêve et non la réalité», avançant qu’elle «a pu se défendre face à une agression au couteau tout en indiquant s’être battue contre un fantôme». Il est «impossible qu’elle tue une enfant», aurait-elle affirmé tout en ne montrant aucune empathie à l’égard de la victime. Contacté à ce sujet, son avocat n’a pas encore souhaité répondre à nos questions.

Un autre homme, Rachid N., 43 ans, est mis en examen depuis lundi soir pour recel de cadavre. Il a reconnu «avoir transporté cette dernière à sa demande ainsi que deux valises et la caisse en plastique dans son véhicule de fonction depuis Paris jusqu’à son domicile situé à Asnières-sur-Seine, et avoir également accueilli l’intéressée chez lui avec les valises et la caisse». Le quadragénaire a confié également «avoir appelé un chauffeur de VTC pour que la suspecte retourne à Paris avec les valises et la caisse environ deux heures après son arrivée».

Dimanche, un rassemblement a été organisé en hommage à Lola. Des bougies et des messages ont été déposés. Depuis, la fédération des conseils de parents d’élèves du XIXe arrondissement s’est organisée pour soutenir élèves et parents. Une cellule psychologique est mise en place au collège Georges-Brassens et une psychologue va venir visiter toutes les écoles maternelles et primaires du secteur dans la semaine. Les journalistes sont par ailleurs invités à ne pas approcher du collège pour laisser les élèves en paix. Selon les informations de Libération, une cellule psychologique est mise en place depuis mardi par la mairie du XIXe, à l’espace Pierre-Girard, pour toute personne en ressentant le besoin.

Signe de l’ampleur de l’émoi provoqué par ce drame, les parents de Lola ont été reçus ce mardi à l’Elysée par Emmanuel Macron. Le président de la République leur a présenté ses condoléances et «a assuré de toute sa solidarité et de son soutien dans l’épreuve qu’ils traversent et qui nous bouleverse tous».

Mis à jour à 17 h 40 : avec des éléments supplémentaires sur la personnalité et les auditions de la principale suspecte.