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Bilan

Mort de Nahel : d’importants dégâts après une quatrième nuit de violences, Lyon et Marseille particulièrement touchés

Mort de Nahel, tué par un tir policier à Nanterredossier
Des milliers de véhicules et de bâtiments ont été incendiés dans la nuit de vendredi à samedi 1er juillet. En peu partout en France, des scènes de pillages ont marqué la nuit.
A Lyon, vendredi soir. (Jeff Pachoud/AFP)
publié le 1er juillet 2023 à 12h37

Une nouvelle nuit de tensions quatre jours après la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué par un tir policier mardi à Nanterre. Des heurts ont éclaté dans la nuit de vendredi à samedi 1er juillet, entraînant de gros dégâts matériels. Résultat, quelque 1 350 véhicules ont été incendiés, 234 bâtiments ont été dégradés ou pris par les flammes, et 2 560 feux comptabilisés sur la voie publique, selon le ministère de l’Intérieur. Des chiffres très importants mais selon les autorités en retrait par rapport à ceux de la nuit précédente. Il y a eu a par ailleurs 31 attaques de commissariats, 16 attaques de postes de police municipale et 11 de casernes de gendarmerie, et 79 policiers et gendarmes ont été blessés dans les échauffourées. Selon une source policière, Lyon et Marseille ont été les deux agglomérations les plus touchées lors de cette quatrième nuit consécutive de violences. Libération fait le point.

Provence-Alpes-Côte d’Azur

Dès vendredi soir, Marseille a été à nouveau le théâtre de heurts et de scènes de pillages, du centre-ville puis plus au nord dans ces quartiers populaires longtemps laissés pour compte que le président Emmanuel Macron a visités en début de semaine. Quelques armes de chasse ont également été dérobées dans une armurerie mais sans munition, selon la préfecture de police. Ce samedi matin, la préfecture annonce 95 interpellations et 4 policiers blessés, des groupes de jeunes, souvent masqués et «très mobiles» pillant, ou tentant de le faire, plusieurs enseignes. Dans la nuit, le maire de la ville, Benoît Payan, avait exigé plus de renforts policiers au vu de la situation.

Auvergne-Rhône-Alpes

Lyon s’est réveillé samedi matin avec la gueule de bois. La mairie dénombre une vingtaine de commerces pillés. Des groupes de jeunes, certains cagoulés, armés de mortiers d’artifices ou de barre de fer, ont pris tout leur temps pour vider le contenu de plusieurs enseignes dans les rues piétonnes du centre-ville. A pied, à trottinette ou à vélo, plusieurs dizaines ont embarqué des jeux vidéo, des bouteilles, des sous-vêtements et des chaussures après avoir brisé des vitrines en poussant des cris de joie. Le maire de la ville, Grégory Doucet, s’est rendu samedi à la rencontre des habitants et des commerçants.

Dans le IVe arrondissement de Lyon, près du centre-ville, un poste de dépôt de plaintes «a fait l’objet d’une intrusion et de dégradations», selon la préfecture. A Vénissieux, les CRS ont été pris à partie par des dizaines de personnes, et les affrontements ont aussi gagné plusieurs autres localités dont Villeurbanne ou Givors. A Vaulx-en-Velin, dans la banlieue de Lyon, un émeutier a tiré au fusil à grenailles en direction de trois policiers qui ont été blessés.

A Grenoble, 28 personnes ont également été interpellées, a indiqué la préfecture. Jusque tard dans la nuit, des affrontements ont opposé des bandes de jeunes souvent cagoulés, se déplaçant en courant ou à trottinette et tirant des dizaines de mortiers vers les policiers qui répliquaient par des grenades lacrymogènes. Les rues de l’hypercentre de Grenoble étaient jonchées de boîtes de chaussures abandonnées, de mannequins en morceaux et de verre brisé après le passage des casseurs et des pilleurs qui couraient, les bras chargés de leur butin.

Un peu plus tôt, des voitures avaient été incendiées dans la proche banlieue d’Echirolles, où les heurts ont été parfois violents, selon des images du quotidien régional le Dauphiné. Des épisodes de violences urbaines ont également eu lieu dans le quartier sensible de La Villeneuve, selon la préfecture de l’Isère.

En Ardèche, les violences ont également affecté plusieurs communes dont Privas, où un camion du bailleur social Ardèche Habitat a été incendié, Annonay où 12 véhicules ont été brûlés. Les forces de l’ordre ont répliqué par des tirs de LBD et des lacrymogènes. Le procureur de la République a été saisi.

Ile-de-France

La région parisienne n’a pas été épargnée par les flammes, notamment Colombes (Hauts-de-Seine), enveloppée d’une forte odeur de brûlé, et ou la situation était tendue. En Seine-Saint-Denis, des heurts ont éclaté dans de nombreuses communes avec une «activité importante» dans les secteurs d’Aulnay-sous-Bois, Sevran et Bondy, selon une source policière. Dans le centre-ville de Bobigny, des tirs de mortiers sporadiques ont résonné pendant près de deux heures passé minuit. A Saint-Denis, un centre administratif a été touché par un incendie, et dans le Val-d’Oise, la mairie de Persan-Beaumont et le poste de police municipale ont été en partie détruits par les flammes.

Parmi les autres faits marquants relevés par le ministère de l’Intérieur, une crèche a été dégradée à Conflans-Sainte-Honorine et un local des Restos du cœur à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines). Des bureaux et véhicules d’Enedis ont par ailleurs été brûlés à Nanterre, où est mort Nahel, mardi matin. Une tentative d’intrusion a eu lieu dans les locaux de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), situés à Nanterre. A Evreux (Eure), un hypermarché a été pillé et un poste de police visé par des engins incendiaires, selon la préfecture.

Occitanie

A Montpellier, plusieurs centaines de personnes ont bravé l’interdiction de manifester vendredi soir, défilant dans la ville à l’appel de plusieurs mouvements de gauche. En fin de manifestation, sur la place de la Comédie, la police a tiré des gaz lacrymogènes et les manifestants se sont dispersés en courant vers la préfecture, certains d’entre eux pillant au passage un magasin de bijoux.

Pour la troisième soirée consécutive, des violences ont éclaté à Toulouse avec cinq véhicules et beaucoup de poubelles incendiées, rapporte France Bleu Occitanie. Un magasin de moto a aussi été dégradé et pillé. Une crèche et un bâtiment associatif du quartier ont aussi été ciblés. Trois policiers ont été légèrement blessés par des tirs de mortiers et des jets de projectiles. 31 personnes ont été arrêtées dans la nuit de vendredi à samedi.

Dans le Gard, les pompiers sont intervenus dans la nuit sur 32 feux de voie publique dont un visant la brigade de gendarmerie de Quissac. Huit véhicules ont été brûlés selon la presse locale. Quatre bâtiments ont été incendiés dont un opticien, un bureau de tabac, une agence du Crédit agricole à Nîmes. Une partie du bâtiment de la Direction départementale des territoires et de la mer a été détruite par le feu. A Alès, le commissariat a été attaqué à coups de cocktail molotov et des incendies sur la voie publique ont été constatés.

Nouvelle-Aquitaine

La nuit à Bordeaux a été plus calme cette fois. Les principales dégradations ont été commises dans le centre-ville : pillages, vitrines brisées, poubelles incendiées… Des magasins, mais également deux postes de police, ont été dégradés. Selon la préfecture, 11 personnes ont été interpellées au cours de la nuit.

Dans le reste de la région, les autorités ont surtout recensé des voitures ou du mobilier urbain brûlés, comme à Agen, Poitiers ou Niort, touchée pour la première fois depuis mardi. La préfecture des Deux-Sèvres condamne l’incendie de baraques de chantier et sept véhicules, ainsi que la dégradation d’une maison de quartier, d’un magasin de grande distribution, d’un bureau de poste, d’une boulangerie, d’un bureau de tabac, d’un lieu de restauration rapide et de plusieurs commerces de proximité.

A Bayonne ou Pau, la préfecture des Pyrénées-Atlantiques a fait état de sept interpellations mais les incidents «restent d’ampleur très limitée, sans commune mesure avec les événements de la nuit précédente». A Limoges, une dizaine de voitures et poubelles ont été brûlées et deux magasins pillés, selon la police qui a placé 14 personnes en garde à vue. Dans les Landes, où les pompiers sont intervenus à une quinzaine de reprises pour des faits liés aux émeutes, la préfecture fait état notamment de tirs de mortier d’artifice sur les forces de l’ordre à Dax et Mont-de-Marsan.