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Disparition

Mort de Philippine : précédente condamnation pour viol, OQTF… Ce que l’on sait du suspect du meurtre de l’étudiante à Paris

Un homme de 22 ans a été interpellé mardi 24 septembre dans le canton de Genève. Il est soupçonné d’avoir tué Philippine, 19 ans, dont le corps avait été retrouvé samedi dans le bois de Boulogne, à Paris.
Au bois de Boulogne lors des recherches du corps de Philippine, le 23 septembre. (Delphine Goldsztejn/MAXPPP)
publié le 24 septembre 2024 à 20h20
(mis à jour le 26 septembre 2024 à 16h15)

Trois jours après la découverte du corps de Philippine, 19 ans, étudiante enterrée dans le bois de Boulogne à Paris, un suspect de 22 ans a été interpellé mardi 24 septembre en Suisse. Ses antécédents judiciaires ainsi que la procédure administrative qui a conduit à sa remise en liberté, suscitent de vives réactions.

Les faits

Le corps de Philippine avait été découvert samedi 21 septembre au cours d’une battue organisée par ses proches dans le bois de Boulogne, dans l’ouest de la capitale, à 500 mètres environ de l’université de Paris-Dauphine où elle étudiait.

La jeune femme avait été vue pour la dernière fois vendredi à 14 heures. Elle devait ensuite se rendre chez ses parents, à Montigny-le-Bretonneux, dans les Yvelines. Inquiets de ne pas voir Philippine arriver, ils avaient alors alerté des amis de la jeune femme, ne parvenant pas à joindre leur fille sur son téléphone. Une enquête pour homicide volontaire a été ouverte et confiée à la brigade criminelle de la police judiciaire de Paris.

Selon une source policière, des témoins avaient raconté avoir vu un homme muni d’une pioche dans le secteur.

Le suspect

Le parquet de Paris a confirmé qu’un suspect avait été «identifié et interpellé [mardi] dans le canton de Genève». «Une demande d’extradition va être adressée aux autorités suisses», a-t-il ajouté. La police genevoise ne s’est pas encore exprimée.

Contacté par Libération, le parquet de Paris a précisé que cet homme de 22 ans, né au Maroc, était «en situation irrégulière sur le territoire français». «Il a été condamné en octobre 2021, pour des faits de viol commis en 2019 – alors qu’il était mineur – et libéré, en fin de peine, au mois de juin 2024.» Le suspect était également ciblé par une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

Un juge d’instruction est chargé depuis mardi de l’enquête ouverte notamment pour homicide et viol. L’information judiciaire porte notamment sur les infractions de meurtre précédé, accompagné ou suivi d’un autre crime, viol, vol et escroquerie, le tout en état de récidive légale.

Les éventuels manquements

Selon une source proche du dossier citée par l’AFP, après avoir purgé ses cinq ans de prison, le suspect était sorti de détention le 20 juin et avait été placé en centre de rétention administrative (CRA) à Metz. Selon Le Parisien, l’homme serait né à Oujda, au Maroc, près de la frontière algérienne, mais n’aurait aucun document d’identité prouvant sa nationalité marocaine. Avant même la sortie de prison du suspect, les autorités françaises auraient sollicité une «demande de reconnaissance aux fins de délivrance d’un laissez-passer» aux autorités marocaines, en vue d’une expulsion. Or, le Maroc n’aurait pas répondu à cette sollicitation, pas plus qu’aux deux relances françaises, le 16 juillet et le 27 août.

En attendant, le placement en CRA du jeune est prolongé plusieurs fois. Après 75 jours de rétention - et une limite légale de 90 jours - Jusqu’au 3 septembre, quand une juge des libertés et de la détention valide la sortie du CRA le 3 septembre malgré une nouvelle demande de prolongation, de 15 jours, émanant du préfet de l’Yonne. La mesure est assortie d’une assignation à résidence et d’une obligation de pointer au commissariat. Le 4 septembre, le Maroc fait «parvenir l’autorisation d’expulsion» aux autorités françaises.

Selon le Parisien, la demande de délivrance d’un laissez-passer consulaire au Maroc aurait été faite dans le mauvais service, le ministère de l’Intérieur ayant centralisé ces demandes au sein d’une «task force» pour certains pays. Le Maroc aurait notifié à la France que la demande n’avait pas été faite correctement et celle-ci n’aurait été effective que le 18 juillet, soit un mois plus tard.

Selon une source proche du dossier, la veille de la mort de Philippine, le 19 septembre, le suspect avait été inscrit au fichier des personnes recherchées, parce qu’il ne respectait pas son obligation de pointer.

Quelles réactions ?

Plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche, ont également mis en cause «la chaîne pénale et administrative», jugeant que le suspect n’aurait pas dû être libéré avant l’obtention du laissez-passer permettant son expulsion vers le Maroc.

Le nouveau ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a mentionné sa volonté de voir «évoluer notre arsenal juridique, pour protéger les Français […] S’il faut changer les règles, changeons-les. Ensemble, avec le Ministre de la Justice, dans le périmètre de nos responsabilités respectives, et sous l’autorité du Premier ministre.»

Mise à jour le 26 septembre à 15 h 27, la France aurait perdu un mois en faisant la demande de délivrance d’un laissez-passer consulaire au Maroc dans le mauvais service.