Menu
Libération
En résumé

Mort du petit Emile : gardes à vue, «phase de vérifications», personnalité du grand-père… Ce que l’on sait du rebondissement dans l’affaire

Disparition du petit Émiledossier
Des grands-parents et deux oncles ou tantes du garçon de 2 ans sont entendues ce mardi 25 mars pour homicide volontaire et recel de cadavre, dans le cadre de la mort d’Emile, qui avait disparu le 8 juillet 2023 dans le hameau du Haut-Vernet.
Le grand-père d'Emile, Philippe V., alors âgé de 58 ans, au Vernet, le 27 mars 2024. L'homme est toujours présumé innocent. (Laurent Carré/Libération)
publié le 25 mars 2025 à 7h35
(mis à jour le 25 mars 2025 à 16h43)

Plus d’un an et demi après la mystérieuse disparition du garçonnet dans le hameau du Haut-Vernet, l’enquête sur la mort du petit Emile Soleil a connu un développement inattendu ce mardi 25 mars à l’aube, avec le placement en garde à vue de quatre personnes. Libération fait le point sur ce que l’on sait de ce rebondissement, et des incertitudes qui demeurent.

Qui sont les personnes placées en garde à vue ?

Les deux grands-parents maternels du garçonnet, Anne et Philippe V., ont été placés en garde à vue ce mardi, aux alentours de 6 heures du matin. Les deux autres personnes sont «deux des enfants majeurs» des grands-parents, précise le communiqué du procureur. L’identité de ces derniers, oncle ou tante de l’enfant, n’était pas immédiatement connue. Le couple a eu dix enfants, dont Marie, l’aînée, la mère d’Emile. Tous ont été scolarisés à la maison.

Le garçonnet de 2 ans et demi était sous la responsabilité d’Anne et Philippe V. au moment de sa disparition le 8 juillet 2023 dans le hameau du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence), quelques heures après son arrivée pour les vacances d’été. Plusieurs autres membres de la famille étaient également présents mais pas les parents d’Emile.

Où en est l’enquête judiciaire ?

Les placements en garde à vue de ce mardi matin ont eu lieu pour des chefs d’«homicide volontaire» et de «recel de cadavre», a annoncé le procureur de la République d’Aix-en-Provence dans un communiqué. Selon cette même source, «ces placements en garde à vue s’inscrivent dans une phase de vérifications et de confrontations des éléments et informations recueillis lors des investigations réalisées ces derniers mois».

L’avocate des grands-parents, Me Isabelle Colombani, a confirmé leur placement en garde à vue. «Je n’ai aucun commentaire à faire, je viens de l’apprendre», a-t-elle déclaré. La procédure peut durer jusqu’à 48 heures.

«Les enquêteurs procèdent par ailleurs à des opérations criminalistiques en divers lieux du territoire», ajoute le procureur. Une perquisition était en cours dans la matinée au domicile des grands-parents d’Emile, un cossu mas provençal situé à La Bouilladisse, commune de 6 000 habitants entre Aix-en-Provence et Aubagne, dans les Bouches-du-Rhône. Originaire de ce village provençal au pied du massif du Garlaban, la famille maternelle d’Emile passe depuis une vingtaine d’années ses vacances au Haut-Vernet, où les grands-parents maternels possèdent une résidence secondaire.

Le 13 mars, la présence des enquêteurs dans le Haut-Vernet avait relancé les spéculations. Les gendarmes avaient alors, selon plusieurs médias, saisi une jardinière disposée à l’entrée d’une chapelle du hameau. Le parquet s’était alors refusé à toute confirmation. Le procureur, Jean-Luc Blachon, affirme ce mardi auprès de Libération que les gardes à vue de ce jour n’ont néanmoins «pas de lien direct avec la découverte de traces sur la jardinière».

Pourquoi le grand-père est-il au centre de l’attention ?

Interrogé peu après la disparition de l’enfant, le maire de La Bouilladisse, José Morales, parlait d’une famille catholique «très croyante, très discrète, qui vivait un peu en autarcie». Selon un voisin des grands-parents, interrogé par la presse mardi, ils vivaient «reclus» depuis la disparition inexpliquée de leur petit-fils. Adepte de la messe en latin, la famille n’a «pas honte d’aimer la messe traditionnelle», déclarait Marie Soleil, la mère d’Emile, à Famille Chrétienne fin août 2023, dans sa première prise de parole.

Le patriarche, Philippe V., 59 ans, se présente comme kinésithérapeute. Sur les pages jaunes, il est inscrit comme ostéopathe. Son passé est également remonté à la surface : il avait été placé il y a plusieurs années sous le statut de témoin assisté dans le cadre d’une enquête sur des soupçons de violences et d’agressions sexuelles au début des années 90 dans la communauté religieuse de la Sainte-Croix de Riaumont à Liévin (Pas-de-Calais), où il était chef scout.

«Forcément je passe pour un dominateur qui terrorise tout le monde… Tout cela est faux mais je m’en moque», disait-il dans une interview au même hebdomadaire chrétien, en septembre 2023. Sur les insinuations sur son éventuelle responsabilité dans la disparition d’Emile, il disait en mars 2024, selon des propos rapportés par son avocate Me Isabelle Colombani : «Ce n’est pas grave ce que je subis moi. J’espère juste que les enquêteurs ne perdront pas trop de temps sur moi au détriment d’autres pistes.»

Que s’est-il passé le 8 juillet 2023 ?

Emile, âgé de 2 ans et demi, a disparu le 8 juillet 2023 alors qu’il venait d’arriver pour les vacances d’été chez ses grands-parents maternels, dans leur résidence secondaire du hameau du Haut-Vernet, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Malgré plusieurs jours de battues citoyennes et de «ratissages judiciaires», aucune trace de l’enfant n’avait été retrouvée. Pendant neuf mois, l’enquête n’avait rien donné de concret, jusqu’à la découverte fin mars 2024 par une promeneuse du crâne et de dents de l’enfant, à environ 1,7 km du hameau, à 25 minutes de marche pour un adulte.

Les obsèques du garçonnet avaient été célébrées le 8 février 2025 dans la basilique de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume (Var), en présence de toute la famille. Plusieurs centaines de personnes assistaient à l’office religieux célébré selon le rite de Saint Pie V, conformément à la volonté des parents d’Emile, fervents catholiques traditionalistes tout comme ses grands-parents. Quelques heures seulement après la cérémonie, les grands-parents d’Emile avaient publié un communiqué, clamant que «le temps du silence doit laisser place à la vérité». «Dix-neuf mois se sont écoulés, dix-neuf mois sans certitude. Nous avons besoin de comprendre, besoin de savoir», écrivaient-ils.

Mis à jour à 16h30, avec l’ajout d’éléments de contexte sur le grand-père d’Emile.