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Mort d’Yvan Colonna: après son agression en prison, la famille attaque l’Etat en justice

Le militant indépendantiste corse est mort le 21 mars deux semaines après avoir subi une agression ultraviolente d’un codétenu dans sa prison d’Arles.
A Bastia, le 13 mars. (Pascal Pochard-Casabianca/AFP)
publié le 6 avril 2022 à 16h15
(mis à jour le 6 avril 2022 à 16h28)

Dès les premiers jours ayant suivi l’agression ultraviolente et mortelle d’Yvan Colonna en prison, les avocats du militant indépendantiste corse alertaient sur une possible «défaillance» de l’Etat. Alors que le berger de Cargèse est mort le 21 mars des suites de ses blessures, sa famille a engagé «une action en responsabilité contre l’Etat» devant le tribunal administratif de Marseille, font savoir ce mercredi leurs avocats. Les parents, l’épouse, le frère, la sœur et les deux enfants d’Yvan Colonna «considèrent que l’administration pénitentiaire est juridiquement responsable de son décès», a expliqué Me Patrice Spinosi, l’un des avocats de la famille, dans un communiqué consulté par Libération.

«Une série de dysfonctionnements administratifs»

Yvan Colonna, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat du préfet Claude Erignac en 1998, est mort à 61 ans deux semaines après avoir été attaqué par un codétenu de sa prison d’Arles (Bouches-du-Rhône). «Les différents éléments d’enquête rapportés par la presse et les auditions parlementaires n’ont fait qu’entretenir le soupçon selon lequel l’agression dont a été victime Yvan Colonna est en lien direct avec une série de dysfonctionnements administratifs», poursuit le même communiqué.

L’avocat cite l’article 44 de la loi du 24 novembre 2009, qui prévoit que l’administration pénitentiaire «assure à chaque personne détenue une protection effective de son intégrité physique». Patrice Spinosi déclare ainsi dans son texte : «Un tribunal indépendant et impartial a désormais la charge de juger des liens entre l’inaction de l’Etat et la mort d’Yvan Colonna.» Il réclame 200 000 euros de dommages et intérêts pour Yvan Colonna et 100 000 euros pour chaque membre de sa famille.

Malgré leur inscription au répertoire des détenus particulièrement signalés, Yvan Colonna, comme son agresseur, Franck Elong Abé, sont restés seuls pendant huit longues minutes dans la salle de sport de la prison, sous le regard d’une caméra de surveillance, sans qu’aucun gardien n’intervienne. Le nationaliste corse a été victime «d’une strangulation à mains nues puis d’un étouffement» avec un sac plastique, avait alors précisé le procureur de Tarascon, Laurent Gumbau. L’agresseur présumé, un Camerounais de 36 ans, était décrit dans les différents rapports pénitentiaires comme violent et solitaire. Il avait été condamné en 2016 pour des faits de «participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme».

Selon plusieurs sources, l’agresseur d’Yvan Colonna a justifié son acte par le fait que le militant corse aurait blasphémé et «mal parlé du Prophète». Une version jugée cependant «peu crédible» par le directeur de la maison centrale d’Arles, Marc Ollier. Ce dernier a estimé, lors d’une audition devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, que le suspect «voulait se payer quelqu’un de connu». L’agression a provoqué une explosion de colère à travers toute la Corse.

Mise à jour : ajout ce mercredi 6 avril à 17 h 04 de contexte sur l’agression.