Devant le collège-lycée privé Notre-Dame-de-Toutes-Aides.

«Il ne parlait jamais de sa vie.» Derrière le guidon de sa trottinette électrique, Alesio, 19 ans, fait partie de ceux qui s’expriment à la suite du drame. Il n’est pas scolarisé dans le lycée privé sous contrat, mais connaît l’agresseur présumé «depuis août» et un repas partagé au McDo, avec des amis en communs. Depuis, le groupe communique sur Snapchat lors de parties de PlayStation. Selon le jeune homme, l’auteur présumé des coups de couteau «ne parlait jamais de sa vie». Il décrit cette connaissance comme se sentant «mal» ou «tout seul», esquivant les tentatives de rapprochement amical. Selon Alesio, l’agresseur leur partageait parfois du contenu TikTok violent, nazi ou ayant attrait à l’environnement et à la politique. «On rigolait sans se dire qu’il était vraiment sérieux. Jamais ne n’aurais pensé qu’il arrive ça.» Mi avril, lors d’un appel de groupe sur Snapchat, l’agresseur aurait recommandé au petit groupe de «prendre soin de [leurs] parents», tout en leur souhaitant une longue vie. Par notre envoyé spécial Léonard Cassette.

Plus de 70 auditions déjà menées. Depuis le lycée Notre-Dame-de-Toutes-Aides à Nantes où il s’est rendu, le ministre de l’Intérieur a déclaré «qu’une cinquantaine d’enquêteurs» étaient actuellement mobilisés sur ce dossier et «travaillent d’arrache-pied». Bruno Retailleau a également précisé que «plus de 70 auditions » avaient déjà été menées.

L’installation de portiques à l’entrée des établissements scolaires «est une piste» pour Bayrou. François Bayrou a estimé que l’installation de portiques à l’entrée des établissements scolaires était «une piste» pour éviter de nouvelles attaques au couteau dans les écoles. «Un couteau, une arme blanche potentiellement dangereuse et même létale (...) ces armes-là, elles doivent être bannies, donc elles doivent être pourchassées. Tout le monde doit savoir qu’elles sont interdites et les contrôles nécessaires doivent être conduits», a déclaré le Premier ministre devant la presse.

L’agresseur décrit comme «discret» et «parfois absent plusieurs jours». Un groupe de quatre ados patiente devant la rue, barrée de policiers, permettant d’accéder au lycée. Tous ont dans les mains une ou deux rose blanche emballée dans une feuille de plastique : «On attend que ça ouvre pour accéder au portail.» Parmi le petit groupe une seule étudie à Notre-Dame de Toutes-Aides. Élève de seconde dans la classe de l’agresseur, elle ne souhaite pas s’épancher mais glisse tout de même quelques mots. Elle décrit un garçon qui ne parle pas à grand monde, si ce n’est à son groupe de quatre ou cinq garçons discrets. Selon elle, l’auteur présumé des coups de couteaux était parfois absent plusieurs jours. Il aurait d’ailleurs touché un de ses amis. La jeune fille termine en indiquant que les cours sont suspendus jusqu’à nouvel ordre. Et s’éclipse vers le bâtiment : les policiers ont levé le dispositif de sécurité. Par notre envoyé spécial Léonard Cassette

«Pas de garantie» qu’un des jeunes blessés soit «totalement tiré d’affaire», selon Elisabeth Borne. La ministre de l’Education Elisabeth Borne a souligné jeudi qu’on ne pouvait «garantir» qu’un des jeunes blessés à Nantes soit «totalement tiré d’affaire», à la suite de l’agression au couteau où une lycéenne a perdu la vie. «On ne peut pas aujourd’hui garantir que tous les jeunes sont, notamment un des jeunes, totalement tiré d’affaire», a-t-elle déclaré lors d’un point presse au collège-lycée Notre-Dame de Toutes-Aides, où un élève armé d’un couteau s’est attaqué à quatre de ses camarades, tuant l’une d’entre elles.

La maire de Nantes refuse de «faire de la politique». Interrogée par des journalistes sur «l’ensauvagement» dénoncé par le ministre de l’Intérieur, Johanna Rolland, la maire de Nantes, a assuré ne pas vouloir faire de «politique ce soir». «Je suis la maire, cette ville est endeuillée, je suis d’abord dans la compassion, le soutien», a-t-elle réagi. Selon elle, des responsables politiques nationaux ont déjà instrumentalisé l’affaire sur les réseaux sociaux. A l’instar d’Eric Ciotti, chef de l’UDR, qui a affirmé vouloir «ne rien s’interdire» concernant la mise en place de «portiques de sécurité ou vidéoprotection avec reconnaissance faciale» au sein des établissements scolaires. Pour Johanna Rolland, «des questions vont se poser, je pense notamment à la santé mentale des adolescents de ce pays».

Bruno Retailleau a pris la parole devant les journalistes, dénonçant «l’ensauvagement» au sein des écoles. «Ce drame nous bouleverse et toute la nation se tient à côté des familles de victimes», a affirmé le ministre de l’Intérieur, soulignant que «perdre un enfant, c’est la pire des douleurs». Bruno Retailleau a tenu à rendre hommage au courage de l’équipe pédagogique, qui est parvenue à maîtriser le meurtrier. Il a également salué les intervenants qui sont arrivés «très vite», les policiers, les sapeurs pompiers et les médecins du service des urgences «qui ont tenté de sauver des vies.» Le ministre a rappelé la mort d’un adolescent devant un lycée en Essonne, il y a mois, se disant «bouleversé par cet ensauvagement» dans ces lieux de vie. Ensauvagement, a-t-il dit, qui est «une question profonde, un fait de société, pas un fait divers.» Il a aussi estimé que la société «a encouragé le laxisme, déconstruit l’ordre, la hiérarchie, et a accouché de toutes ces violences.» Finalement, il a assuré que le profil psychologique de l’assaillant serait étudié de près, tout en affirmant vouloir dénoncer «cette violence.»

Emmanuel Macron remercie les professeurs. Le président de la République a salué le «courage» des «professeurs» qui ont «sans doute empêché d’autres drames». «J’adresse mes pensées émues aux familles, aux lycéens et à toute la communauté éducative dont la Nation partage le choc et la peine», a écrit Emmanuel Macron sur X.

Aux abords de l’établissement scolaire Notre-Dame de Toutes-Aides.

Les ministres sont arrivés sur place. Elisabeth Borne, ministre de l’Education et Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, sont arrivés à Notre-Dame de Toutes-Aides selon notre correspondante à Nantes.

François Bayrou veut «une intensification des contrôles» aux abords des écoles. Le Premier ministre demande «une intensification des contrôles mis en place aux abords et au sein des établissements scolaires» après l’attaque au couteau qui a coûté la vie à une lycéenne à Nantes, a annoncé Matignon dans un communiqué. Le chef du gouvernement, qui «appelle à un sursaut collectif» face à la «violence endémique» dans «une partie de notre jeunesse», veut également que «des propositions concrètes en matière de prévention, de réglementation et de répression, lui soient soumises sous quatre semaines» autour des «violences commises par les mineurs avec des armes blanches», a fait savoir Matignon.

La maire de Nantes dit son émotion «immense». Dans un post sur le réseau social Bluesky, la maire de Nantes, Johanna Rolland, a tenu à faire part de son soutien aux victimes. «Mon émotion est immense face au drame atroce survenu au collège-lycée Notre Dame de Toutes Aides. Mes pensées et mon soutien aux victimes et à leurs proches face à l’horreur qui les frappe», a-t-elle écrit, précisant être sur place depuis le début d’après-midi aux côtés du préfet.

«C’est une vraie dinguerie. Tout est allé si vite.» Dans le quartier pavillonnaire de Doulon, entre les petites maisons et les ruelles, les parents affluent à vélo, en trottinette ou en voiture. Beaucoup sont venus directement du travail et cherchent la sortie où leurs enfants, scolarisés à Notre-Dame de Toutes-Aides, pourront enfin quitter l’établissement. Postés à la sortie principale, arrêt mairie de Doulon, au beau milieu de l’attroupement, mêlé de larmes et d’inquiétude, Ethan et Maël ont accouru dès la sortie du lycée de la Colinière, tout proche. Ils sont venus chercher leurs copains de handball, des lycéens de seconde. Ils ont été prévenus par message de l’horreur survenue à la pause midi. «L’agresseur est entré dans une première classe, celui de notre pote puis dans une seconde. Notre pote a couru quand il a vu. Il y avait du sang partout», racontent les adolescents. La police a prévenu que les témoins ne sortiraient pas tout de suite car ils doivent être interrogés. «Nous, on est juste venus pour les voir, savoir s’ils vont bien, parler de tout et de rien, sans trop leur poser de questions. Ils risquent d’être choqués», ajoute le groupe de jeunes. A quelques pas de là, les forces Sentinelle sont postées devant la crèche Babilou. Une lycéenne, en pleurs, craque dans les bras de sa mère. «C’est une vraie dinguerie. Tout est allé si vite.» Par Marine Dumeurger, correspondante à Nantes.

Un examen psychiatrique en cours. Le suspect interpellé lors de l’attaque, un élève de seconde né en 2009 et scolarisé dans l’établissement, a été placé en garde à vue, rapporte une source policière interrogée par Libération. Il va faire l’objet d’un examen psychologique, obligatoire.

«Il adorait Hitler.» Une collégienne a livré un témoignage auprès de Agence France-Presse, alors qu’elle était confinée dans l’établissement : «J’étais au self avec mes amies et on nous a dit qu’un lycéen avait poignardé des élèves de seconde dans plusieurs classes. On nous a demandé de ne pas sortir du self pendant une vingtaine de minutes puis on nous a confinés dans un gymnase. Ça fait longtemps qu’on est là mais on a pu appeler nos parents et les rassurer. Dans un autre gymnase, il y a les 4e et 5e, les secondes ne sont pas avec nous», a déclaré cette collégienne de 3e. «Le lycéen, les gens le connaissaient comme dépressif, il disait qu’il adorait Hitler. Il a envoyé un mail de 13 pages à tout le monde pour expliquer tous ses problèmes à midi», a-t-elle ajouté.

La conférence de presse est reportée. La conférence de presse du procureur, Antoine Leroy, initialement programmée à 19 heures ce jeudi 24 avril est reportée à «un moment ultérieur», annonce le parquet de Nantes sans plus de précisions pour l’instant.

Le ministère de l’Education veut durcir les règles en matière de port d’armes à l’école. La répétition de drames dans ou autour d’établissements scolaires impliquant ces derniers mois des adolescents avec des couteaux a conduit le gouvernement à vouloir s’attaquer à ce phénomène. La ministre de l’Education nationale a annoncé son intention de durcir les règles concernant les élèves pris en possession d’une arme blanche dans un établissement scolaire. Ils passeront à l’avenir systématiquement en conseil de discipline. Dans un télégramme adressé fin mars aux préfets et recteurs d’académies, les ministres de l’Education nationale et de l’Intérieur ont appelé à mener «des contrôles aléatoires aux abords des établissements scolaires» d’ici à «la fin de l’année scolaire». Toutefois, les meurtres à l’intérieur des établissements scolaires restent rares. En février 2023, un lycéen avait poignardé son enseignante avec un couteau de cuisine dans un établissement privé de Saint-Jean-de-Luz, dans les Pyrénées-Atlantiques.

Etablissement de 2 000 élèves. Notre-Dame de Toutes-Aides est un groupe scolaire privé sous contrat situé dans l’est de Nantes qui accueille environ 2 000 élèves, de l’école maternelle au lycée, d’après son site internet.

Le secteur bouclé par les forces de l’ordre. Sur place, la rue menant à l’établissement est bouclée par un périmètre de sécurité surveillé par de nombreux policiers et des militaires de Vigipirate. Des parents inquiets se massent également aux abords du lycée. Ludivine, 48 ans, a dit avoir appris que sa fille est dans la classe de Seconde concernée par l’attaque. «Moi qui suis une mère anxieuse et qui ne la laisse pas sortir seule, je ne pensais pas qu’il lui arriverait quelque chose dans son lycée», a-t-elle dit à l’Agence France-Presse, qualifiant l’établissement de «calme et correct à tous les niveaux».