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Récap

Opération Trident : retrouvez nos articles sur ce fiasco aux conséquences dévastatrices pour la lutte antidrogue

Au printemps 2023, des policiers sont suspectés d’avoir importé près de 400 kilos de cocaïne en France. Dans une enquête en quatre volets, «Libération» dévoile les rouages de cette affaire hors norme.

(Bruno Mangyoku/Liberation)
Publié le 18/10/2025 à 9h15

C’est un scandale majeur qui pourrait en entraîner d’autres. Au printemps 2023, des policiers de l’Office antistupéfiants (Ofast) sont suspectés d’avoir importé puis participé à la vente de près de 400 kilos de cocaïne en France. Toute la marchandise a disparu et aucune interpellation n’a eu lieu. Nom de code de cette opération qui avait pour but affiché de piéger un narcotrafiquant d’envergure : Trident. Depuis, cinq policiers ont été mis en examen, dont deux ont été placés en détention provisoire.

Pendant plusieurs semaines, Libération a épluché des centaines de documents, rencontré des acteurs de premier plan de cette affaire et enquêté sur une débâcle inédite, révélant l’implication de la Drug Enforcement Administration (DEA), la puissante agence antidrogue américaine, dans ce trafic. L’enquête a aussi mis en lumière le rôle de protagonistes troubles qui se sont activés dans l’ombre pour écouler la drogue. Retour sur les quatre volets de notre série.

Episode 1 : l’effarante genèse d’un trafic de coke piloté par les flics

«Tout dans cette affaire est hors des clous»

C’est une commissaire aguerrie à la carrière prestigieuse qui franchit la porte de la police des polices, ce 15 mai 2025, pour être interrogée comme témoin dans une affaire hors norme. Depuis de longs mois, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) enquête sur un vaste scandale qui ébranle la police judiciaire marseillaise. Entendue durant plus de sept heures, Stéphanie Cherbonnier, qui fut durant près de cinq ans la cheffe de l’Office antistupéfiants, se dit «atterrée» par les découvertes de la Division nationale des enquêtes, chargée des investigations sur la corruption des agents…

Episode 2 : les flics pris la main dans les sacs de drogue et de billets

«Il reste 285 kilos faut pas être regardant… faut que ça parte…»

«C’est parti !!!» Ce 5 mars 2023, Arnaud D., policier à l’Office antistupéfiants de Marseille, envoie ce message enjoué à ses cinq collègues du groupe 8 pour les informer que le tanker Olivia 1 vient de quitter les côtes colombiennes. Ce bateau qui part de Carthagène prend la direction du port de Marseille avec à son bord un conteneur qui les intéresse tout particulièrement : près de 400 kilos de cocaïne sont cachés au milieu d’une cargaison de bananes…

Episode 3 : l’indic fantôme et l’ombre d’un sulfureux commandant

«Concentrez-vous sur Robert. La marchandise était tout le temps entre ses mains»

Sa véritable identité reste encore une énigme. Mais son rôle dans l’opération Trident apparaît, au fil des investigations, de plus en plus essentiel. Seul son surnom affleure au détour de nombreux messages compromettants exhumés par l’Inspection générale de la police nationale : «Robert». Il est suspecté d’être le principal logisticien du trafic mis en œuvre par les policiers. Avec, dans son sillage, l’ombre d’un officier sulfureux, Nicolas H., considéré comme une figure emblématique de la lutte antidrogue…

Episode 4 : derrière le trafic de cocaïne, le serrurier préféré des stups marseillais et une enquête emblématique en sursis

«Une bizarrerie dans le paysage [de la] police»

L’homme, bricoleur de génie, est surnommé «Passe-Partout». Serge L., 61 ans, n’est pas policier mais s’est imposé en quelques années comme une pièce maîtresse de l’Ofast Marseille, travaillant jour et nuit pour ses agents. «Depuis le temps qu’il était en lien avec l’Ofast, il faisait partie des meubles», a résumé le directeur de la police judiciaire à Marseille. Serrurier depuis plus de trente ans, Serge L. a peu à peu élargi ses compétences à la pose discrète de micros et de caméras, investissant dans du matériel haut de gamme toujours plus performant. En s’intéressant à lui, l’IGPN va découvrir que les policiers lui demandaient d’intervenir en dehors de tout cadre légal. Ces méthodes des agents antistups menacent désormais de fragiliser une procédure emblématique contre le narcotrafic, à l’origine de la chute du clan Yoda et de son chef Félix Bingui…