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Justice

Peter Cherif, «architecte» de l’attentat contre «Charlie Hebdo», condamné à la réclusion criminelle à perpétuité

Le jihadiste de 42 ans a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité ce jeudi 3 octobre par la cour d’assises spéciale de Paris, notamment pour avoir participé à la formation au Yémen de Chérif Kouachi, l’un des assaillants de la tuerie du 7 janvier 2015.
Un membre d'Al-Qaeda au Yemen en mars 2012. (Photo/AFP)
publié le 3 octobre 2024 à 19h18

Le jihadiste Peter Cherif a été condamné ce jeudi à la réclusion criminelle à perpétuité par la cour d’assises spéciale de Paris, pour le rôle qu’il a pu jouer au Yémen auprès de Chérif Kouachi, l’un des assaillants de Charlie Hebdo en 2015, et pour la séquestration de trois humanitaires en 2011.

L’accusé de 42 ans était jugé depuis le 16 septembre pour association de malfaiteurs terroriste criminelle entre 2011 et 2018, période de sa présence au Yémen au sein d’Al-Qaeda dans la Péninsule arabique (Aqpa). Il lui est reproché d’avoir rejoint les rangs de cette organisation jihadiste et, dans ce cadre, d’avoir participé à la formation de son ami d’enfance Chérif Kouachi, un des auteurs de l’attentat commis le 7 janvier 2015 à Charlie Hebdo, dans lequel 12 personnes ont été assassinées. L’attaque a été revendiquée par Aqpa.

L’avocate générale Aurélie Valente avait requis mercredi la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 22 ans pour le jihadiste. A l’issue d’un réquisitoire à deux voix, rendu avec son collègue Benjamin Chambre, elle avait demandé à la cour de reconnaître Peter Cherif «coupable» de l’ensemble des charges qui lui sont reprochées.

Peter Cherif comparaissait aussi pour la séquestration en bande organisée en 2011, pendant plus de cinq mois, de trois ressortissants français, membres de l’ONG Triangle génération humanitaire. Le jihadiste, qui a usé la plupart du temps de son droit au silence, a toutefois reconnu pendant le procès avoir été l’un des geôliers des trois humanitaires, ayant servi de «traducteur» pour faire l’interface entre les otages et leurs ravisseurs yéménites d’Al-Qaeda.

«Le parfait CV du jihadiste accompli»

Le vétéran du jihad français, qui a grandi dans le XIXe arrondissement de Paris, a en revanche réfuté avoir joué un rôle dans l’attentat de Charlie Hebdo. Mais il s’est retranché derrière le silence quand les questions se sont faites plus précises.

Pendant plus de quatre heures, les deux représentants du ministère public ont dressé le portrait d’un «jihadiste intégral» qui fut «la pierre angulaire de la préparation» de l’attentat de Charlie Hebdo. Pour preuve, en 2011, il «était le seul Français membre d’Aqpa», une organisation «paranoïaque» qui depuis sa création n’a intégré que «très peu d’étrangers».

Au cours des sept ans qu’il a passés au Yémen, Peter Cherif a endossé toute une série de rôles : «cadre» de l’organisation, «logeur», «recruteur» de candidats pour commettre des attentats, «traducteur», «propagandiste», «membre de la branche des opérations extérieures», «artificier», «instructeur militaire» et enfin «geôlier», a énuméré l’avocate générale. «Le parfait CV du jihadiste accompli», a-t-elle résumé, l’accusant aussi d’être l’«architecte» de l’attentat contre Charlie Hebdo.

«Son jihad, il n’en sortira pas»

Le journal satirique, qui avait publié des caricatures de Mahomet en 2006, est devenu à partir de 2010 une «obsession» pour Aqpa, a souligné de son côté Benjamin Chambre. «Mais ce n’est que postérieurement à l’arrivée de Peter Cherif (au Yémen) que cette obsession se fera plus précise et nominative», a-t-il relevé, rappelant que le nom complet du dessinateur Charb, directeur de la rédaction de Charlie Hebdo assassiné le 7 janvier 2015, a été publié en 2013 dans Inspire, le magazine de propagande de l’organisation jihadiste, le désignant comme cible à abattre. Or, pour l’accusation, nul autre que Peter Cherif ne pouvait connaître ce nom au Yémen.

De même, seul Peter Cherif a pu «jouer l’entremetteur» entre son ami d’enfance Chérif Kouachi, qui avait rejoint le Yémen à l’été 2011, et l’un des plus hauts cadres d’Aqpa qui lui a confié la mission de commettre un attentat contre le journal, selon les avocats généraux. Il a ensuite servi de «traducteur» quand Chérif Kouachi a suivi un entraînement militaire dans un camp, et est resté en lien avec lui quand ce dernier est rentré en France. Depuis son arrestation, Peter Cherif «n’a entamé aucune remise en cause», selon l’avocate générale. «Son jihad, il n’en sortira pas».