Faudra-t-il attendre quatre décennies pour un jugement ? L’association de lutte contre les violences faites aux enfants Mouv’Enfants a lancé une pétition jeudi 7 août adressée à Emmanuel Macron dans le but de réclamer «une salle adaptée en 2025 pour le procès aux assises des parents» d’Inass Touloub, plus connue sous le surnom de «petite martyre de l’A10». Près de 12 000 personnes ont déjà apposé leur signature au texte.
Agenda
Dans un communiqué transmis à Libération, Mouv’Enfants juge «inacceptable» que les autorités n’aient pas encore trouvé un lieu adapté afin d’organiser un procès très attendu dans le Loir-et-Cher. Une marche blanche devrait par ailleurs être organisée le 6 septembre prochain à Suèvres, «pour que justice soit faite».
«De qui se moque-t-on ?»
Le corps martyrisé de cette fillette de 4 ans avait été retrouvé en 1987 au bord de l’autoroute A10, à Suèvres, sans que jamais les enquêteurs ne parviennent à vérifier une quelconque piste ou même n’arrivent à mettre un nom sur la victime. Après deux non-lieux, en 1991 et en 1997, et plusieurs appels à témoins, Inass Touloub est finalement identifiée grâce à l’ADN d’un de ses frères, interpellé dans une tout autre affaire, et ses parents sont finalement arrêtés le 12 juin 2018.
En septembre 2024, la Cour de cassation décide qu’Ahmed Touloub et Halima El Bakhti seront renvoyés devant une cour d’assises. La mère pour «actes de torture et actes de barbarie ayant entraîné la mort». Le père pour «complicité».
Et depuis ? Statu quo. S’il a un temps été question de délocaliser l’audience, décision a été prise le 29 avril dernier que cette dernière ait bien lieu dans le Loir-et-Cher. Mais aucune date n’a été entérinée. «De qui se moque-t-on ? On en appelle au Garde des sceaux Gérald Darmanin. Des moyens doivent être alloués, exige Mouv’Enfants dans son communiqué. Nous refusons de vivre dans une société qui n’est pas aux côtés des enfants victimes.»
«Procès sensible»
Auprès de Libération, le ministère de la Justice balaie toute accusation de laxisme et précise qu’il est «bien en lien avec la cour d’appel d’Orléans pour les accompagner dans l’organisation de ce procès, pour lesquelles les modalités et sa mise en œuvre sont en cours». Selon la même source, ce futur procès bénéficie d’une labellisation «procès sensible», qui «implique la mobilisation de tous les services compétents de la Chancellerie pour aider et conseiller la juridiction dans l’organisation matérielle du procès, notamment sur les volets immobiliers, numérique, sûreté et accompagnement des victimes».
Ainsi, le ministère de la Justice adapte au cas par cas la réponse immobilière et financière en fonction du type de procès, de son niveau de sensibilité, du nombre de mises en cause ou de parties civiles. Par principe, le déroulement du procès au sein d’une enceinte judiciaire est privilégié. Mais «des solutions d’externalisation totale ou partielle peuvent exceptionnellement être recherchées dans le cas où la juridiction ne serait pas à même d’accueillir un procès». En l’espèce, neuf parties civiles se sont constituées - en juin 2025 - selon la Chancellerie. Le procès ne devrait donc pas être externalisé, contrairement à d’autres audiences médiatiques comme les affaires Carton rouge - plus de 900 parties civiles -, Le Scouarnec – près de 300 parties civiles – ou Adecco – 6 420 parties civiles.
Mise à jour : à 14h50, avec la réaction du ministère de la Justice.