Une prise de parole rare, à la hauteur de la polémique. Le président du tribunal de Marseille a appelé lundi 24 juillet à tenu à rappeler que «l’indépendance de la justice est un principe constitutionnel», après les propos du patron de la police estimant qu’un policier n’avait «pas sa place en prison avant un éventuel procès». Le président Olivier Leurent appelle «à la mesure afin que l’institution judiciaire puisse poursuivre les investigations indispensables à l’enquête à l’abri des pressions et en toute impartialité», écrit-il dans un communiqué.
Soupçonnés d’avoir roué de coups un jeune homme en marge des émeutes début juillet, quatre policiers ont été mis en examen, et l’un d’eux placé en détention provisoire, la semaine dernière. Depuis, certains agents marseillais ont entamé une «grève du zèle».
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Plus tôt dans la journée, l’affaire avait déjà suscité colère et indignation parmi les magistrats. «Le directeur général de la police nationale, sous la tutelle du ministre de l’Intérieur, fait pression sur l’autorité judiciaire dans une affaire individuelle. Gravissime. Strike pour l’indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs et l’égalité devant la loi. Le Président de la République doit réagir», a tweeté lundi le Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche).
L’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) exhorte elle aussi le «plus haut niveau de l’Etat» à réagir «pour remettre les pendules à l’heure», selon Cécile Mamelin, vice-présidente de l’USM, estimant que les propos du patron de la police nationale sont «scandaleux» et «gravissimes dans un état de droit».
Macron botte en touche
Lors de son interview du jour sur TF1 et France 2, Emmanuel Macron a tenté d’esquiver la question brûlante en refusant de commenter. «Dans notre pays, les policiers servent la bonne application de la loi» et «l’état de droit suppose la présomption d’innocence». Le président de la République a tenu à rappeler que «nos policiers et nos gendarmes ont été présents durant ces nuits [d’émeutes] face à un déferlement de violence inédit».
Le chef de l’Etat a en revanche souligné qu’«il faut être intraitable quand il y a des débordements, quand la déontologie n’est pas respectée». Et, enfin, que «nul en République n’est au-dessus de la loi».
Décryptage
Cette polémique a été provoquée par Frédéric Veaux, directeur général de la police nationale (DGPN), qui a souhaité la libération d’un policier de la BAC de Marseille, sous le coup d’une enquête. «De façon générale, je considère qu’avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail», a déclaré Frédéric Veaux, dans un entretien au Parisien, ajoutant : «Le savoir en prison m’empêche de dormir».
«Je partage les propos du DGPN», a tweeté un autre très haut cadre, le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ancien préfet de police de Bouches-du-Rhône. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a également ce lundi «assuré toute sa confiance» au patron de la police.