Une vague de recours devant la justice. Deux détenus contestent ce lundi 25 août devant le tribunal administratif de Lille leur placement dans le nouveau quartier de haute sécurité de la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), alors que ces procédures se multiplient partout en France contre ces transferts et les conditions de détention.
A Lille, Me Delphine Boesel plaidera en référé-suspension pour ses deux clients lors d’audiences prévues dans l’après-midi. «Nous contestons ces décisions de placement au QLCO [quartier de lutte contre la criminalité organisée, ndlr], mes clients n’ont pas à y être. L’un est un condamné définitif engagé dans une démarche de réinsertion, rendue impossible ou extrêmement compliquée. L’autre ne répond pas aux critères», a déclaré cette avocate à l’AFP.
Deux autres recours similaires seront examinés mardi matin à Lille. D’autres juridictions ont déjà été saisies, notamment à Caen, Versailles, Amiens, mais aussi Paris, où une requête a déjà été rejetée. Les juges devront se prononcer sur le fond dans les prochains mois.
Me Fabien Arakelian, qui défendra mardi un détenu à Lille, dénonce des procédures «en dehors de la loi». «On a voulu faire de lui un exemple», a-t-il affirmé, fustigeant un transfert motivé par «des raisons populistes, électoralistes», relevant du «fait du prince, du garde des Sceaux». «L’opération de communication est réussie, mais c’est un recul de l’Etat de droit», selon lui.
«Ce régime, j’ai extrêmement de mal à le vivre»
En visio-audience à Versailles vendredi, le détenu Sofiane Boukhedimi a décrit ses nouvelles conditions de détention à Vendin : «Je me retrouve d’une situation respectueuse avec l’administration pénitentiaire à l’isolement, à l’enfer. Je suis fouillé deux fois par jour, c’est extrêmement difficile. Ce régime, j’ai extrêmement de mal à le vivre».
Entre fin juillet et début août, 88 détenus, majoritairement en détention provisoire, ont rejoint ce nouveau quartier pour narcotrafiquants. Parmi eux figurent Mohamed Amra, dont l’évasion sanglante en mai 2024 dans l’Eure a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, ou encore Salah Abdeslam, condamné à la perpétuité incompressible pour les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis. Une vingtaine de détenus ont déjà saisi la justice administrative pour contester leur transfert à Vendin, selon l’entourage du garde des Sceaux.
Parallèlement, l’Association des avocats pénalistes a saisi le Conseil d’Etat pour obtenir l’annulation du décret autorisant ces quartiers, et le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, est visé par une plainte pour abus d’autorité devant la Cour de justice de la République. Le Conseil d’Etat avait rejeté fin juillet un référé-suspension visant à suspendre ce décret, dans l’attente d’un examen sur le fond.
D’autres recours, introduits devant des juges de la liberté et de la détention, ont quasiment tous été jugés irrecevables, selon l’administration pénitentiaire, qui précise que des appels ont été interjetés dans le cas contraire.